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Procès de l’attentat contre Charlie Hebdo : “Nous ne renoncerons jamais”

Procès de l’attentat contre Charlie Hebdo : “Nous ne renoncerons jamais”

09 September 2020 | PAR Alice Martinot-Lagarde

Le 2 septembre, alors que débutait le procès des attentats de Charlie Hebdo, de Montrouge et de l’Hyper Cacher, le journal satirique a décidé de republier les caricatures de Mahomet pour lesquelles il avait reçu des menaces djihadistes. 

C’est un procès historique qui a commencé ce mercredi 2 septembre. Il durerait jusqu’au 10 novembre, à la cour d’assise spéciale de Paris où 14 personnes seront jugées, accusées d’avoir apporté leur soutien logistique aux responsables des attaques contre Charlie Hebdo, à Montrouge et à l’Hyper Cacher. Ce sera le premier procès pour terrorisme filmé pour les archives audiovisuelles de la justice; cinq caméras suivront l’intégralité des audiences. 

“Nous ne nous coucherons jamais. Nous ne renoncerons jamais.”

La symbolique est forte. Cinq ans après les attaques qui ont fait 12 victimes à la rédaction de Charlie Hebdo, l’hebdomadaire satirique est toujours en colère. “Il n’y a pas de résilience” affirmait Maryse Wolinski sur franceinfo, mais ils veulent montrer qu’ils sont encore debout, avec courage et fermeté. Mercredi dernier, le journal republiait les caricatures de Mahomet qui leur avait valu de nombreuses critiques et avaient encouragé l’attentat du 7 janvier 2015. Publiées tout d’abord dans le quotidien danois Jyllands-Posten en 2005, nous les avons vues en France pour la première fois dans les pages de Charlie Hebdo dans le numéro du 8 février 2006, sous le titre de “Mahomet, débordé par les intégristes”. Depuis, le journal était la cible d’attaques régulières, jusqu’aux tragiques évènements qui bouleversèrent à jamais le journal et les Français. 

Alors qu’au moment de l’attentat, beaucoup avaient reproché ces caricatures à Charlie Hebdo, affirmant que le journal n’aurait pas dû les publier, les revoilà en kiosques, fièrement assumées. “Nous ne nous coucherons jamais. Nous ne renoncerons jamais” affirme Riss, directeur de l’hebdomadaire, dont les larges lettres de la une, “Tout ça pour ça”, sont inratables au milieu des autres. Ce numéro spécial sera aussi l’occasion de revoir des dessins signés par Cabu, dessinateur emblématique de la rédaction de Charlie Hebdo, tué pendant l’attaque. 

« On nous a souvent demandé depuis janvier 2015 de produire d’autres caricatures de Mahomet, explique la rédaction de Charlie Hebdo dans son édition du 2 septembre. Nous nous y sommes toujours refusés, non pas que cela soit interdit, la loi nous y autorise, mais parce qu’il fallait une bonne raison de le faire, une raison qui ait un sens et qui apporte quelque chose au débat. Reproduire, cette semaine de l’ouverture du procès des attentats de janvier 2015, ces caricatures, nous a alors semblé indispensable. »

Déjà des réactions violentes 

Alors que, dans la Tribune de Genève, le dessinateur suisse Gérald Herrmann rendait hommage à Charlie Hebdo et aux victimes par une autre caricature, les réactions n’ont pas toutes été favorables. Le Pakistan a d’ores et déjà exprimé son opposition quant à la republication de ces caricatures, expliquant que la revendication de la liberté d’expression ne devait pas être un droit à offenser la population musulmane. La représentation du prophète, strictement interdite dans l’islam, est passible de la peine de mort dans plusieurs pays, dont le Pakistan, deuxième pays musulman le plus peuplé. La Turquie, l’Egypte et l’Iran ont, eux aussi, condamné les caricatures republiées par Charlie Hebdo, car selon eux, elles inciteraient à la haine contre l’islam. 

De nombreuses protestations du peuple ont suivi les critiques des autorités, accusant le journal de blasphème. En déplacement au Liban le 1er septembre, Emmanuel Macron a tenu à réaffirmer la liberté de la presse et à défendre le “droit de blasphémer” en France : “Un président de la République n’a jamais à qualifier le choix éditorial d’un journaliste ou d’une rédaction, jamais, parce qu’il y a une liberté de la presse à laquelle vous tenez, à juste titre, profondément.” Le blasphème reste une question très sensible qui est réactivée par la tenue du procès des attentats de janvier 2015. On se souvient de la condamnation à mort d’Asia Bibi, chrétienne pakistanaise accusée de blasphème envers l’islam en 2009 et dont l’acquittement avait provoqué des manifestations dans tout le pays. 

À la barre, le procès se tient sous haute surveillance. Les tensions se font déjà sentir dès les premiers jours des audiences, notamment en raison d’une programmation des auditions des témoins qui ne ferait pas sens, selon Maitre Isabelle Coutant- Peyre. La question du respect des mesures sanitaires est aussi cruciale pendant le déroulé d’un “méga procès” comme celui-ci en temps de pandémie. Une dérogation a donc été accordée aux avocats, accusés et témoins par le président Régis de Jorna, pour ceux qui le souhaitent, mais brièvement puisque dès ce lundi, plus aucune dérogation n’a été acceptée afin de faire respecter la circulaire gouvernementale. 

 

Pour aller plus loin… 

La rédaction a sélectionné quelques liens pour mieux comprendre l’affaire et les enjeux procès qui se déroulera jusqu’au 10 novembre. 

  • Attentats de Charlie Hebdo, de Montrouge et de l’Hyper Cacher : rappel des faits : à lire dans Le Monde. 
  • Comprendre le déroulement du procès : à lire dans L’Obs et sur France Inter
  • La dessinatrice Coco, rescapée de l’attentat, raconte l’attaque : à lire sur franceinfo
  • Comprendre l’importance de l’attentat de l’Hyper Cacher comme acte antisémite : à lire dans Libération

Retrouvez aussi le dossier de la rédaction réalisé en janvier 2015. 

 

Visuel : Une de Charlie Hebdo numéro du 2 septembre 2020

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Alice Martinot-Lagarde

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