Politique culturelle
Une ouverture réussie pour Mons, ville européenne de la Culture 2015

Une ouverture réussie pour Mons, ville européenne de la Culture 2015

27 January 2015 | PAR Yaël Hirsch

A une heure de route de Lille et de Bruxelles, à 2h30 de Paris, le chef-lieu de la province de Hainaut est avec Plzen, ville Européenne de la culture 2015. Toute la Culture était en Belgique samedi 24 janvier pour vivre l’ouverture de cette année de culture intense que les Montois préparent depuis presque une décennie. Un moment fort, où l’on s’est réjoui avec une foule venue en masse, où l’on a presque réussi à oublier les déboires du 24 décembre où la monumentale sculpture de Arne Quinze, emblématique de Mons 2015 avant son ouverture s’est effondrée. Un mois plus tard, alors que la fête d’inauguration a dépassé largement les 90 000 habitants de la ville, on peut dire qu’en 2015, nous serons tous un peu montois…

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Sur le slogan “Je suis Montois, et toi ?”, les habitants de la ville belge de Mons semble être nombreux à être partie prenante de cette année où leur ville est capitale européenne de la Culture. Riche de 6 sites classés au patrimoine mondial de l’Unesco, habituée aux parades avec la fameuse “Ducasse” (ou “le Doudou” pour les locaux) qui reprend la légende de la lutte de Saint-Georges contre le dragon), l’ancienne capitale d’une région minière : le Borinage.

Mons 2015 et l’avenir de la ville
Capitale culturelle de la Wallonie depuis 2002, Mons a encore du mal à se remettre économiquement de la fin de l’activité minière. Sa nomination officielle comme capitale européenne de la culture pour l’année 2015 (en 2010), a permis aux organisateurs de cet événement de penser non seulement le nouveau souffle culturel de la ville mais également d’y appuyer un renouveau économique. Ainsi des deux grands projets architecturaux prévus dans ce programme : une gare (qu’on attend pour 2018) signé par l’architecte espagnol Santiago Calatrava et un centre de congrès imaginé par l’architecte américain Daniel Liebeskind.

Le numérique est également un atout essentiel pour utiliser la culture comme levier économique. Dans les bâtiments Microsoft situé au cœur du digital valley montois, Pascal Keiser nous a parlé du programme de création d’entreprises innovantes Technicité et de la manière dont 800 millions d’euros de dépenses ont été programmées pour créer des jeunes entreprises numériques. Avec 1000 emplois déjà créés, cet entrepreneuriat d’innovation s’adosse à l’année où Mons est ville européenne de la culture avec deux grands projets : “Café europa” qui repense notre café européen pour le meubler de manière collaborative et permettre à cet espace public d’entrer en réseau entre diverses villes d’Europe. La deuxième initiative numérique qui permet à Mons 2015 de se propager dans le virtuel est le Mons Street Review où Antonia Taddei et Ludovic Nobileau ont utilisé google street pour cartographier les montois. Durant l’année de nombreux débats sur les enjeux numériques devraient avoir lieu à Mons, en partenariat avec Technocité et le Forum d’Avignon.

L’histoire de Mons mise en valeur
Alors que deux des nombreuses expositions prévues cette année étaient déjà visibles, Mons 2015 est l’occasion pour la ville de rappeler et d’ouvrir au monde entier son patrimoine. A l’occasion du 150 anniversaire de sa mort, Mons 2015 rappelle ainsi que Van Gogh a vécu de 1878 à 1880 dans le Hainaut, au Borinage et que ces deux ans assez mystiques à côtoyer chaumières et mineurs  ont été capitaux pour voir l’avènement de l’artiste. C’est ce que montre la très fine exposition “Van Gogh au Borinage” aux Beaux-Arts de Mons  (BAM) où l’on suit l’évolution de l’artiste, ses copies de maître, ses collections de gravures et ses esquisses de paysans tisserands. Et l’on découvre voit avec surprise qu’à 26 ans Van Gogh n’est pas encore un peintre, que son génie n’est pas inné, mais qu’il est le fruit d’un long travail de formation difficile. L’autre exposition déjà en place à Mons au moment M de l’ouverture des festivités est localisée dans les abattoirs de la ville. Sous le titre pop “Mons Superstar!” cette grande installation en deux parties permet d’aller à la rencontre des Montois d’aujourd’hui à travers des portraits photos de montois par Olivier Cornil et une galerie de personnalités venues de Mons (le scientifique Jean-Charles Houzeau, l’atsronome Charles Malapert, la féministe Isabelle Blume…

Féerique fête d’ouverture
Et c’est un montois célèbre qui a ouvert les festivités, samedi 24 janvier 2015 : juste après l’ouverture officielle en collégiale Sainte-Waudru par le roi et la reine de Belgique, Salvatore Adamo, local illustre, a chanté son tube “Tombe la neige” au cœur de l’installation imaginée par le collectif Het Pak “Song lines“. Il a ainsi donné le coup d’envoi à cette oeuvre à la fois belle et mélancolique, où les photos de montois pris les yeux fermés s’étendaient comme du linge dans toute la rue de la poterie, tandis qu’on entendait ces montois d’horizons divers interpréter la chanson d’Adamo.
Plus festive, mais tout aussi jolie à la nuit tombée l’installation du marché au herbes, “Keyframes“, proposait sur une voix disco tonique de suivre les pas de danse lumineux de petits bonshommes à la Keith Haring, suspendus au-dessus de la mignonne place.
Dans la majestueuse Cour du carré des arts remplie de monde, “le mapping à 360 °” des Dirty Monitors a subjugué le public qui a suivi une sorte de pythie leur lire l’avenir sur 4 murs et dans un ciel parfaitement étoilé. Un feu d’artifice vidéo très applaudi.

Un peu plus loin, le collectif lillois Maison Folie a imaginé un lieu de bric et de broc où l’on faisait longuement la queue pour se perdre. Autour de la grand place, l’esprit hippie régnait avec un revival de Woodstock au théâtre le Manège et des vrais bains chauds finlandais permettant aux participants de se baigner en maillots par zéro degré, dans la cour de la maison dédiée à l’espace presse… Côté concerts, les salles étaient bondées, avec un parcours classique-baroque rendant hommage à un compositeur montois, Roland de Lassus dans la cour des anciens abattoirs et une expérience plus pop et décalée avec un “concerto de public” très prisé dans l’Eglise Sainte-Elisabeth.

Enfin, c’est à travers des fanfares et des performances majestueuses que Mons a vraiment ravi la foule parée de ponchos argentés qui reflétaient la lumière, en cette fête d’inauguration, avec des illuminations à tomber dans les jardins du Beffroi, une répétition du “Doudou” qui impressionnait avec un dragon cracheur de feu, une “installation de feu” absolument époustouflante mise en place avec des grues incroyables par la compagnie Carabosse, et surtout une “Envolée Chromatique” toute de blanc alimentée, qui a réuni l’ensemble de la ville sur la Grand Place à 21h10. Envoyant des fantasias tout de blanc vétus , le tableau imaginé par Jean-Pierre David et déjà expérimenté à Chalon en 2013, faisait danser de grands bibendums en ballons blancs, ainsi que des grappes d’aérosculptures blanches qui montaient vers le ciel comme des dos de dauphins. Tous étaient invités à danser de concert, au son d’un accordéon électrique. Le clou du spectacle a été la vision à la Méliès de deux acrobates : l’une collée comme un animal mythique à la nef du ballon et allongée comme un sphinx et l’autre sortant d’une nacelle perchée dans les cieux une corde en tissu où elle s’est mise à danser à la verticale et sans filet. Un moment de pure poésie et de musique vraiment festive qui a fait exulter la foule pendant près d’une heure. Après un tel moment de grâce, les feux d’artifices sont venus sonner le début d’une longue nuit où les Montois ont erré dans les rues de leur ville comme dans un rêve de lumière…

Si l’inauguration de Mons 2015 a été un grand succès, les événements n’ont fait que commencer ce week-end et la capitale européenne de la culture 2015 étale sa très riche programmation en 4 phases que Toute la Culture suivra attentivement. Nous reviendrons vers vous avec les moments clés de cette année de culture à Mons dont la Ducasse, une exposition sur Saint-Georges, et des performances théâtrales hors et dans via…

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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