Politique culturelle
La question de la commémoration de la Guerre d’Algérie en France

La question de la commémoration de la Guerre d’Algérie en France

31 October 2012 | PAR Marie Pichereau

Cette année est charnière pour la commémoration de la guerre d’Algérie, puisque l’on fête les cinquante ans de son indépendance. La France met à l’honneur le pays et sa culture depuis le 5 juillet 2012, date historique qui marqua le départ de la puissance coloniale française des terres d’Algérie (5 juillet 1962). Différents hommages seront rendus durant un an, passant par la littérature ou encore le cinéma et l’art Algérien.

La guerre d’Algérie est depuis de longues années devenue l’enjeu d’une bataille mémorielle entre la France et l’Algérie. Petit à petit transformée en guerre des mémoires, l’histoire, les enjeux et les commémorations chez les deux pays sont différents. Au moment où l’on parlait d’un projet de loi sur le « Rôle positif de la colonisation » en 2005, en Algérie on célébrait les martyrs tombés sur le champ de bataille et leurs luttes pour la liberté et la justice. Dernier évènement en date qui démontre la divergence des points de vue autour de cette période de l’histoire: la reconnaissance par François Hollande du massacre des manifestants pro-FLN, le 17 octobre 1961. Cette déclaration a été suivie de vives polémiques et pour certains, a une fois de plus, mis en lumière le manque de courage de la France face à son histoire coloniale. Rappelons que la France avait accepté de qualifier et de reconnaître ces «opérations de maintien de l’ordre» comme une guerre, qu’à partir de l’année 1999. Le 25 octobre dernier une proposition de loi était examinée par le sénat. Le projet de loi proposait la reconnaissance du 19 mars (entrée en vigueur du cessez-le-feu au lendemain de la signature des accords d’Evian, 1962) comme: « journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc ». On peut donc légitimement, s’interroger sur la mémoire collective Française quant aux évènements d’Algérie et la manière dont la nation met à l’honneur ce pays anciennement colonisé.

Le 17 octobre dernier, à l’occasion d’une commémoration du 17 octobre 1961, s’ouvrait l’exposition Vies d’exils à Paris à la Cité Nationale de l’Histoire et de l’immigration. Ce moment de l’histoire est particulier, puisqu’il s’agit de la première grande manifestation coloniale en plein cœur de la capitale à cette période là. Ces deux événements ont relancé, une fois de plus, le débat autour de la manière de commémorer ce passé sensible. Que mettre en avant ? Le discours positif des Algériens qui s’installaient à Paris pour la première fois ou la violence qui régnait pendant ces années là ? L’histoire coloniale Française et précisément celle de l’Algérie pose problème dans son récit même, la manière dont on l’a racontée. De ce fait, la façon dont on va le commémorer est sujet à des divisions d’opinions.

Christophe Prochasson, historien Français était interrogé à ce sujet par France Culture le 17 octobre dernier. Pour le spécialiste de l’histoire politique et culturelle des XIXe et XXe siècles : « Les historiens ne sont pas les mieux placés pour dire ce qu’il faut commémorer et comment le commémorer. Ils doivent se dégager de l’impérialisme de la mémoire, ce qui n’est pas facile dans une histoire coloniale qui renvoie à des plaies identitaires encore vives et des enjeux politiques très forts. Cette histoire est encore très imprégnée par le commerce de la mémoire, qui est un élément fondamental dans la transmission, avec un attachement à mettre en évidence des images ou des films. »

La France paye d’une certaine manière le prix de sa repentance à l’égard de son passé colonial. Elle est perpétuellement présente dans les esprits et resurgit par les témoignages d’acteurs liés à l’histoire coloniale, l’édification de lieux de mémoires, ou par des textes de loi qui organisent cette mémoire officielle. Pascal Blanchard  auteur de La Fracture coloniale, explique d’ailleurs à ce sujet que : « La longue occultation de ce pan de l’histoire nationale explique le caractère désordonné et compulsif de son dévoilement, qui se déploie aujourd’hui dans la confrontation de mémoires concurrentes, (cf: l’Algérie et la France) chacune tentant d’imposer sa « part de vérité ».

Crédit: Capture Dailymotion

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Marie Pichereau

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