Actu
« L’homme de Vitruve » sera bien exposé au Louvre pour la rétrospective sur De Vinci !

« L’homme de Vitruve » sera bien exposé au Louvre pour la rétrospective sur De Vinci !

18 October 2019 | PAR Chloé Coppalle

Coup de théâtre ! La semaine dernière, le tribunal administratif régional (TAR) de Vénétie suspendit le prêt de l’Homme de Vitruve, qui devait venir en France pour l’exposition « Léonard de Vinci », démarrant le jeudi 24 octobre au Musée du Louvre. Heureusement l’Italie décida mercredi 16 octobre d’accepter le prêt !

Le prêt de L’Homme de Vitruve : pourquoi ça pose problème ?

En 2017, un accord entre la France et l’Italie autorisait l’échange de nombreuses œuvres de Léonard de Vinci et de Raphaël pour célébrer les deux grands peintres italiens. À Paris, « Léonard de Vinci » se tiendra au musée du Louvre du 24 octobre au 24 février 2020 pour célébrer les 500 ans de la mort du peintre florentin, décédé au Château du Clos Lucé en 1519. Rome, quant à elle, accueillera de mars à juin 2020 une grande exposition dédiée à Raphaël, mort en 1520. 

Mais plusieurs facteurs compliquèrent la sortie du territoire d’un dessin, celui de L’Homme de Vitruve, réalisé vers 1490. Tout d’abord, l’association italienne Italia Nostra, organisation italienne à but non lucratif, qui travaille sur la protection et la promotion du patrimoine national. L’organisme réclamait l’annulation du prêt en faisant référence à l’article 66 du code des biens culturels visant à contrôler les sorties du territoire des œuvres majeures pour les musées italiens. En effet, cette sortie ne doit être possible que si le prêt n’altère pas l’oeuvre. Or, les dessins tout comme les pastels, nécessitent des règles de conservation très strictes : pour trois mois consécutifs d’exposition maximum, le retour aux réserves est de trois à cinq ans pour préserver le papier de la lumière, de l’atmosphère, ou du changement de température. Pour empêcher le prêt, c’est d’ailleurs sur ce point que s’appuie l’association, notamment dans son dernier article « Sentenza TAR sull’Uomo Vitruviano. Oggi ha perso la tutela », publié mercredi 16 octobre sur son site internet. 
D’autres acteurs ralentissent les échanges, comme Matteo Salvini, ancien vice-président du Conseil des ministres et ancien Ministre de l’Intérieur, ainsi que le parti nationaliste qu’il dirige, la Ligue du Nord, se proclamaient publiquement contre cet envoi. Pour les mouvements populistes, les grandes œuvres italiennes ne doivent pas quitter les murs des musées nationaux. Avec le changement de gouvernement, présenté le 5 septembre 2019 par le Premier Ministre italien Giuseppe Conte, les tensions se sont cependant calmées. 

Mais la semaine dernière, le 8 octobre, la presse apprenait que le tribunal administratif de la Vénétie décida de suspendre de nouveau le prêt, à deux semaines seulement de l’ouverture de l’exposition du Louvre. L’actuel Ministre de la Culture en Italie, Dario Franceschini n’avait d’ailleurs pas soutenu cette suspension. Finalement, la justice italienne a finit par débloquer la situation, en annonçant hier, ce mercredi 16 octobre, que le dessin quitterait bien l’Italie pour la France ! En effet, comme l’oeuvre n’est pas exposée en permanence, elle ne participe pas au « caractère identitaire » de Venise. De plus, l’exposition du Louvre a été reconnue comme mettant à l’honneur le patrimoine italien à l’international. Selon le magazine La Croixle dessin bénéficieraient également de conditions d’expositions particulières, peut-être une diminution du temps de présence au sein du parcours, pour lui permettre de sortir du territoire. Dario Franceschini s’est félicité de la nouvelle sur Twitter : « La grande opération culturelle italo-française des deux expositions Leonardo à Paris et Raphaël à Rome peut maintenant commencer », a-t-il déclaré.

Léonard de Vinci, la France et l’Italie : des rapports compliqués.

L‘Homme de Vitruve fut réalisé vers 1490 à la plume, encre et lavis sur papier. A partir d’un modèle masculin, il représente le corps humain selon les proportions décrites par le traité d’architecture dédié à l’empereur Auguste ( 27 av JC, 14 ap. JC) De architecturaécrit vers -15 par l’architecte romain Vitruve, de son vrai nom Marcus Vitruvius Pollio. Dans ce dessin, il superpose deux positions du même corps, lui même inséré dans deux formes géométriques, le carré et le cercle. Le cercle est lié à l’infini par sa forme ronde, qui renvoie aux corps célestes, à l’Univers, alors que le carré a plusieurs significations plus liées à l’échelle humaine, à la Terre. En plaçant son modèle au centre de ces deux figures, Léonard de Vinci situe l’Homme au centre de tout, de l’Univers comme de la Terre. C’est pourquoi on qualifie ce dessin d’ “humaniste” : à la Renaissance, l’humanisme est un courant de pensée positionnant l’Homme, et non plus Dieu, au centre du monde, comme il est représenté dans ce dessin.

Les difficultés liées au prêt de cette oeuvre résultent de nombreux différents entre les deux pays quant à la place de grandes œuvres de Léonard de Vinci en France. Arrivé dans les Pays de la Loire en 1516 sous le mécénat du Roi de France, François Ier, il meurt trois ans plus tard en léguant à l’Etat français trois tableaux tardifs : La Joconde, Le Saint Jean Baptiste, et La Sainte AnneD’autres œuvres font également partie des collections françaises, comme La Belle Ferronnière. L’Homme de Vitruve, quant à lui, a été acheté en 1822 par la Gallerie dell’Accademia de Venise, où il est toujours conservé.

L’exposition de ce dessin au Louvre est une chance unique pour les visiteurs ! À cause de sa fragilité, il n’est pas exposé de façon régulière à la Gallerie dell’Accademia. La majorité des publics n’ont donc jamais vu l’original. De son côté, La Joconde ne sera pas accrochée dans le parcours de l’exposition « Léonard de Vinci », mais sera visible dans sa salle habituelle, située à Denon dans les collections permanentes. En effet, tout mouvement du tableau est absolument exceptionnel à cause de sa fragilité, mais surtout, la Joconde attire un public beaucoup trop nombreux pour qu’elle puisse être exposée ailleurs que dans la salle des États où elle est actuellement. Ainsi, pour des raisons de conservations et surtout pour des raisons de flux et de circulations des visiteurs, le tableau restera dans le parcours permanent. 

Visuel : ©Attribution 2.0 Generic (CC BY 2.0), CreativeCommons

« Eurydice n’est pas revenue », mais peu importe…
Première grande exposition personnelle de Kiki Smith à la Monnaie de Paris
Chloé Coppalle

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration