Le musée du Jeu de Paume accusé de faire “l’apologie du terrorisme”
L’artiste palestinienne Ahlam Shibli fait actuellement les frais d’une attaque qui trouble par sa violence. Le CRIF accuse le musée du Jeu de Paume qui présente en ce moment l’exposition “Foyer fantôme” de faire “l’apologie du terrorisme”
Après Jérusalem Plomb Durci qui voyait la performeuse israélienne dénoncer l’acte de vivre dans un pays en guerre, c’est Ahlam Shibli, photographe palestinienne qui décide de regarder en face le terrorisme dans son pays.
Cette dernière propose au Jeu de Paume son “foyer fantôme”. La photographe travaille depuis les années 90 sur les enjeux de mémoires et d’identité blessée. Ici, elle affronte les « martyrs » devenant héros en atteignant le statut de kamikazes, les orphelins de onze établissements polonais, les images des travestis et transsexuels devant quitter leur pays (La Palestine, le Pakistan, le Liban, la Turquie ou la Somalie) car menacés de mort à cause de leurs préférences sexuelles, les images de l’armée israélienne où juifs et arabes combattent ensemble et les enjeux commémoratifs en France.
Le parcours est d’une violence saisissante qui vient vous confronter face au miroir. La photographe ne juge jamais et vous livre son pays brut de décoffrage.
Et voici que l’exposition déchaîne les passions.
Joint par téléphone, l’historien, chercheur au CRIF Marc Knobel a accepté d’éclairer la réaction du CRIF. Il ne remet pas en cause la “démarche interrogative” inhérente à l’art mais regrette vivement l’absence de légende accompagnant la série “Death”. Selon lui “Ces légendes sont autant de fautes, on ne peut pas les présenter comme des martyrs, alors que des attentats ont eu lieu”. Il regrette que la douleur ne soit pas dite côté israélien et que les morts soient tus.
Ce qu’affirme le CRIF c’est que le sujet nécessite une attention particulière. “On ne parle pas de cela comme si on exposait des photographies de fleurs, il y a des morts et cela mérite des explications ». Marc Knobel ajoute “Ces photographies sont une réalité sociologique, je ne mets pas en doute cette réalité. Mais, cette exposition est ” inadmissible ” car elle efface “le contexte historique”, “elle utilise le terme « martyr » sans l’expliquer, elle ne dit pas que ces hommes sont des criminels. Cette exposition est une apologie du terrorisme
Le Jeu de Paume se sentant insulté et menacé a répondu aux attaques du CRIF par un communiqué : “Le Jeu de Paume qui veille, depuis sa création, à promouvoir la pluralité des expressions artistiques autour de l’image sous toutes ses formes, regrette la polémique naissante autour de l’exposition “Foyer Fantôme” de l’artiste Ahlam Shibli.
Ces derniers jours, l’institution a reçu de nombreux messages de protestation à propos de cette exposition et plus particulièrement de l’une des séries présentées, intitulée Death.
Le Jeu de Paume réfute fermement les accusations d’apologie du terrorisme ou de complaisance à l’égard de celui-ci, et portera plainte contre toutes les personnes lui adressant des menaces.”
Visuel : (c) Sans titre (Death n° 3)
Quartier de Rafediya, 15e Rue, Naplouse, 22 février 2012.
Courtesy de l’artiste, © Ahlam Shibli