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Le cinéma au Collège des Bernardins: une nouvelle séance du cycle Jeune création

Le cinéma au Collège des Bernardins: une nouvelle séance du cycle Jeune création

31 October 2012 | PAR La Rédaction

 

Le cinéma s’installe au Collège des Bernardins. Nous connaissons la qualité des expositions et des spectacles de danse contemporaine programmés dans les magnifiques espaces de l’ancienne bâtisse cistercienne au cœur du 5ème arrondissement. Un nouveau rendez-vous mensuel s’inscrit dans l’agenda. Le réalisateur et critique de cinéma Rodolphe Olcèse lance, dans le cadre de la programmation Questions d’artistes, un cycle de projections intitulé Jeune création. A une semaine de la prochaine séance, qui aura lieu le 5 novembre à 20h, l’occasion est trouvée de revenir dans cet entretien sur les origines de cette belle aventure.


 

 

Nous suivons avec intérêt la nouvelle programmation cinéma du Collège des Bernardins. Comment s’est-elle mise en place ?

Je me suis rapproché du groupe de recherche « La parole de l’art » après avoir lu l’édito du premier numéro de la revue Questions d’artistes, publiée par le Collège des Bernardins. J’ai trouvé dans ce texte un regard sur la pratique artistique et sur son enjeu profond assez proche de ce que je peux moi-même attendre du cinéma, lorsque j’écris sur des films (pour la revue Bref notamment ) ou que je cherche les moyens d’en réaliser. J’ai ainsi pris connaissance de la programmation, très exigeante dans tous les domaines, de ce lieu incroyable. Nous avons commencé à évoquer, avec Jérôme Alexandre, qui anime ce groupe de recherche, le fait qu’il y avait quelque chose à faire autour du cinéma, et plus singulièrement autour de la jeune création. Par la suite, les choses se sont faites d’elles-mêmes. Cette idée de la Jeune création ne signifie évidemment pas que nous n’allons montrer que de jeunes réalisateurs, selon des critères empiriques d’âge ou de nombre de films réalisés, mais que nous sommes attentifs à des gestes de cinéma qui sont proches ou ont su rester à l’écoute de leur commencement. Cette programmation est très attachée, de mon point de vue, au pole de recherche sur La parole de l’art. Elle doit permettre de faire résonner ou relancer les questions qui sont les nôtres lors de nos rendez-vous mensuels. De rencontrer également la parole des auteurs. Ce qui fait le prix de ces séances, c’est en effet qu’elles permettent d’échanger avec les cinéastes à l’issue des projections.

Quelles sont les lignes directrices de cette programmation ?

L’idée a tout de suite été de donner accès à des films qui, s’ils peuvent être diffusés dans des festivals ou par le biais d’associations dont le travail autour des films est vraiment très important, comme l’Agence du court métrage, le Collectif Jeune Cinéma, etc., souffrent pour la plupart assez cruellement d’un espace de visibilité. La programmation se nourrit donc dans cet inépuisable réservoir de films que représente ce que l’on appelle, sans pouvoir dire quelle réalité recouvre réellement cette expression, le court métrage. Ceci étant dit, il y a une volonté assez précise de montrer un cinéma de recherche. Les films qui m’intéressent sont dans une proposition formelle assumée. En même temps, ils peuvent relever d’une facture assez classique, comme c’est le cas avec les films d’Antoine Parouty par exemple. Il faut en tout cas qu’ils prennent le pari de quelque chose, qu’ils se mettent en danger. Le documentaire de création trouve donc aux Bernardins une place de choix, peut-être parce que c’est un lieu du cinéma qui peut vraiment s’affranchir des contraintes de production qui, y compris pour le court métrage, sont vraiment lourdes et grèvent le désir des auteurs.

La première séance, intitulée Filiations et mémoires, proposait des premiers ou second films de jeunes réalisateurs comme Astrid Adverbe ou Arthur Harari. La seconde, qui s’est construite autour d’artistes distribués par le label Lowave, réunissait, sous le titre L’eau et les reflets du monde, des films pour la plupart réalisés par des plasticiens, comme Marylène Negro ou Ismaïl Bahri, dont les travaux, qui me paraissent très importants, peuvent nourrir des formes de cinéma plus fictionnelles. A travers cette programmation, il s’agit avant tout de travailler sur la transversalité des disciplines dans la pratique contemporaine de l’image en mouvement. A cet égard, la séance qui a lancé la saison 2012/2013, autour de plusieurs films de Jacques Perconte, était vraiment exemplaire. Elle nous a permis de prendre la mesure d’une recherche plastique radicale et d’être dans une pure expérience de cinéma.

Pouvez vous nous dire quelque chose des prochaines séances ?

La séance du 5 novembre s’intitule Cinémas de l’intime. Seront projetés trois films, qui ont chacun, par leur support de tournage ou leurs partis pris de narration, une facture singulière : Ici rien de Daphné Hérétakis, film de fin d’études remarqué cette année au festival de Lussas, Aveuglés beuglent de Marie Vermillard, qui a déjà signé plusieurs longs métrages et qui revient depuis quelques temps à une pratique filmique très légère, rendue possible par les outils comme le téléphone portable, et enfin Nous n’irons pas à Buti d’Arnaud Dommerc, programmé en 2008 au FID de Marseille, et qui repose lui aussi sur un principe de simplicité, du moins en apparence. Ces trois films disent quelque chose du cinéma comme lieu de partage d’une solitude ou d’une intimité, et comme moyen de se situer quand les repères affectifs ou sociaux semblent se déliter autour de nous.

La séance de décembre, Le commencement et le risque, s’est élaborée avec le GREC, association fondée par Jean Rouch, Pierre Braunberger, etc., qui propose un environnement de production permettant à de jeunes auteurs de réaliser un premier film sans être inquiétés par avance par des questions de réussite ou de rentabilité économique. Cette séance sera l’occasion de montrer des fictions qui échappent aux modes de narration habituels, souvent imposés par des formes télévisuelles de cinéma, que l’on voit notamment dans la plupart des films distribués en salle, ou dans beaucoup de courts métrages de réalisateurs qui aspirent à faire des longs métrages.

Pour le reste, les choses ne sont pas encore fixées. Je peux toutefois dire deux mots de la séance de mars, qui s’inscrit dans un important projet curatorial qui investira tous les espaces du Collège des Bernardins. J’ai demandé à plusieurs auteurs, dont certains ont déjà été programmés dans le cycle Jeune création, de réaliser des films en concordance avec le thème de l’exposition. Je sais que Marylène Negro et Jacques Perconte sont déjà au travail. Marie Vermillard, Orlan Roy et Jeremie Schneider vont également proposer quelque chose. D’autres cinéastes ont été sollicités pour enrichir ce panel.

Comment en êtes -vous venus à programmer des films ?

Après des études de philosophie, j’ai commencé à écrire sur le cinéma, sur les formes courtes en particulier. Cela m’a permis de rencontrer beaucoup de jeunes réalisateurs. Ces amitiés m’ont naturellement conduit à la question de la réalisation. J’ai commencé à faire des films, d’abord plus ou moins solitairement, avec une caméra super 8, puis, plus tard, en équipe. J’ai monté une première société de production, avec laquelle j’ai réalisé deux moyens métrages, Petite (2010) et Tremble (2012) dans des conditions financières et logistiques devant lesquelles beaucoup auraient renoncé. Ce sont des films qui circulent dans le même réseau que celui dans lequel je puise pour construire les séances de cinéma du Collège des Bernardins. J’ai mis en place un outil de production que j’essaie désormais de partager avec des réalisateurs de mon entourage, confrontés à la difficulté de faire leurs films.

Faites -vous un lien entre l’acte de faire des films et celui d’en montrer ?

Oui, de même que ces deux gestes ont à voir avec celui d’écrire. Dans les trois cas, il s’agit de transmettre le cinéma. Les films que je fais ou veux faire sont pétris, traversés par ce que j’ai pu voir ou des rencontres que j’ai pu faire. Même lorsqu’il est à la tâche, un réalisateur n’est jamais seul, il ne cesse de communiquer avec ce qui est venu avant lui et ce qui viendra après. Je crois que montrer des films, faire communiquer des formes a priori hétérogènes, participe de cette conscience là. Le cinéma est un art engagé. Cela se voit avec beaucoup plus de relief dans les premières tentatives. Lorsque personne n’attend rien de vous, vous ne pouvez faire autrement que vous mouiller. Sinon, c’est que quelque chose est déjà mort dans votre désir de cinéma. Je crois que c’est le témoignage que nous apportent les films que j’ai la chance de pouvoir montrer dans le cycle Jeune création.

 

Edith Marrast

 

visuels courtesy Marylène Negro, Elding et Jacques Perconte, Pauillac, Margaux

 

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