Cinema

Exposition Burton : Les jeunes sont dans la place !

14 March 2012 | PAR Margot Boutges

Mercredi 7 mars s’ouvrait l’exposition Tim Burton à la Cinémathèque française, à Paris. A l’heure de sa consécration, le cinéaste, découvert en 1988 avec Beetlejuice, exerce toujours autant d’attractivité sur le jeune public.

Premier samedi pour l’exposition Burton (voir la critique sur Toute la culture). Il y a foule devant la Cinémathèque. La file de visiteurs, rectiligne, s’élance à l’horizon. « 3 heures d’attente », l’info circule dans les rangs. Mais on est loin des queues interminables du Grand Palais où les détenteurs de billets coupe-fil et les visiteurs freestyle se livrent à une véritable guerre des tranchées. L’ambiance est ici décontractée et bon enfant. Les personnes âgées, qui sillonnent habituellement les expos parisiennes en essaim d’abeille, sont presque absentes. Les jeunes (20-30 ans de moyenne d’âge) ont pris le pouvoir, prêts à se plonger dans l’œuvre du maître qui a illuminé leur enfance et leur adolescence.

On rentre dans le hall. Tiphaine Coll, directrice des relations avec les publics commente l’affluence derrière la vitre :

« Ça marche très fort. On a déjà accueilli 2000 personnes depuis ce matin pour une capacité journalière maximum de 3000.Et encore, ce n’est rien à côté de la séance de dédicace du dimanche 4 mars. Les gens faisaient la queue jusqu’au métro Bercy. Essentiellement des moins de 25 ans. Certains ont dormi sur place. »

Ces jeunes passionnés, on les remarque de loin. Sept compagnons, « fans purs et durs » du cinéaste depuis l’enfance, sont venus spécialement de Dijon pour voir l’exposition. Ces étudiants en art ou en langues étrangères pratiquent régulièrement le cosplay, se travestissant en personnages burtoniens. Aujourd’hui, ils ont misé sur la sobriété, se contentant de détails gothiques dans leur habillement. Nicolas arbore toutefois un look qui rappelle celui du Chapelier fou en hommage à Alice aux pays des merveilles. Chacun vante les qualités du réalisateur, qui a su créer un univers « glauque et attachant » et évoquer la mort d’une manière humoristique. « Avec la conjoncture actuelle, le monde des morts est plus gai que celui des vivants », plaisante Isabelle.

Dans l’autre file, la vision d’un quatuor chatoyant nous pique les yeux : nœud rose et robe de princesse destroy pour l’une, cheveux arc-en-ciel et t-shirt de monstre pour l’autre, maquillage charbonneux pour tous. Un hommage à l’univers « sombre et enfantin » de Burton qui inspire tant ces lycéens. Ceux-ci aiment à reprendre les chansons du film d’animation L’étrange Noël de Mr Jack à la batterie et au piano.

Grâce à nos billets coupe-file, on entre assez vite dans l’expo. Et, ô miracle ! Les salles ne sont pas surpeuplées. On peut admirer les créations du cinéaste/plasticien sans marcher sur son voisin. L’exposition, conçue par le Museum of Modern Art (MOMA) de New York et qui marque à Paris sa seule escale européenne, nous livre une vision chronologique de l’œuvre de Burton. Dessins, accessoires, costumes, courts-métrages dialoguent dans une scénographie ludique et macabre. Des groupes de potes s’interpellent, des jeunes parents conduisent leurs bambins à la rencontre des gentils monstres et des ados escortent leurs grands-mères. La boutique, dernière étape intégrée à l’exposition, ne désemplit pas. Sont proposés à la vente t-shirts, bouquins, posters et figurines. L’entreprise Disney, avec laquelle Burton a collaboré pour plusieurs films, est la grande prêtresse du produit dérivé. La multitude de sacs Jack Skellington se balançant aux bras des fans vient en témoigner.

A la sortie, les visiteurs sont enthousiastes, presque unanimes : « on s’en est pris plein les yeux ». Cassandre, 20 ans, gothique de pied en cap aimerait refaire l’expo une seconde fois avant de reprendre son train pour Angers. « Je me suis sentie comme dans les films, déconnectée, c’était magique, ou oublie la réalité », explique-t-elle. « Ça fait plaisir de voir ça, ça rappelle des souvenirs », raconte Simon, 30 ans, qui se définit comme un « ancien fan » du cinéaste. « Burton, c’est mon adolescence. Mais je n’ai pas aimé ses derniers films. Il ne se renouvèle plus du tout », explique-t-il. Le jeune homme a notamment la dent dure pour évoquer le dernier projet en date du réalisateur : la reprise en stop motion d’un de ses court-métrages de jeunesse, Frankenweenie, qui raconte les aventures d’un Dr Frankenstein en culotte courte (sortie pour Halloween 2012). « J’aimerais qu’il aborde des thèmes plus matures comme il a pu le faire un temps avec Big Fish, confie-t-il. C’est peut-être parce que je vieillis. » Un peu plus loin, Marion, vingt ans de plus que lui, n’est pas d’accord : « S’il faisait quelque chose d’autre, cela ne serait plus Tim Burton. Il a créé un univers comme il n’en existe nulle part ailleurs. Est ce qu’on va demander à un artiste d’être différent ?  »

« Artiste », le mot circule dans toutes les bouches. N’est-ce pas le dessein de l’exposition de montrer que Burton a su apposer son monde imaginaire sur tous les médiums auxquels il s’est frotté (dessins, peintures, films, animation) ? Valentine et Sophie, 23 ans, étudiantes en cinéma, se disent déçues de cette approche « réductrice », qui se contente de donner de Burton l’image d’un créateur seul devant l’éternel :

« On voit plein de noms de collaborateurs revenir dans les textes mais on ne nous dit rien sur eux. On a l’impression en ressortant que Burton travaille en solo. On aurait aimé qu’on nous parle un peu de ses équipes, de son industrie. Au final, on n’en sait pas plus sur la manière dont il fait ses films qu’en arrivant. »

Mais c’est bien l’œuvre du maître que les foules sont venues admirer. Dehors, le ciel s’est éclairci et la file d’attente s’est allongée. Un groupe d’adolescents entonne l’hymne « This is Halloween ». Un chant de nuit automnale qui n’en est pas moins annonciateur de journées ensoleillées pour l’expo.

 

Copyright photo ©Margot Boutges

 

Exposition « Tim Burton », du 7 mars au 5 août 2012

Cinémathèque française (51, rue de Bercy, 75012 Paris)

 

 

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