Cinema
Bas fonds d’Isild le Besco, un film très dérangeant

Bas fonds d’Isild le Besco, un film très dérangeant

18 December 2010 | PAR Olivia Leboyer

Le troisième film d’Isild le Besco (après “Demi-tarif” en 2000 et “Charly” en 2007) s’inspire d’un fait divers. Trois jeunes femmes, vivant totalement en marge, comme des animaux, passent un jour à l’acte en tuant un boulanger. Le film est profondément repoussant et dérangeant (il a créé un choc lors de sa présentation au Festival de Locarno), mais très maîtrisé. Sortie le 29 décembre.

Avec Bas fonds, Isild le Besco nous force à regarder une réalité que l’on n’a aucune envie de voir. Le quotidien de Magalie, Barbara et Marie-Steph est sordide, horrifiant : les trois filles se traînent à longueur de journées dans la crasse, entre un vieux matelas et une télé où défilent des images porno. Leur seul plaisir consiste à se bourrer de raviolis en boîte, sans rien échanger d’autre que des cris et des insultes. La grosse Magalie exerce sa domination sur les deux autres, qu’elle traite comme ses poupées. Il y a Barbara, une jeune paumée au look de simili-Maryline, et Marie-Steph, la petite sœur attardée de Magalie. Trois « personnes » sans plus grand chose d’humain, qui occupent le même espace réduit. Pour se distraire, elles ont la bière, un chien, une carabine. Un jour, ce très fragile déséquilibre dérape pour de bon.

Isild le Besco est claire dès l’ouverture du film : en voix off, elle explique, posément, qu’il existe deux catégories de personnes, les gens aimables que l’on a envie de connaître, et ceux que l’on fuit spontanément, parce qu’ils n’ont rien, ne sont rien, ne représentent rien. Ceux qui n’inspirent rien d’autre que du malaise. Ce sont eux qu’Isild le Besco veut montrer, justement parce que personne ne souhaite poser les yeux sur eux. Ont-ils quelque chose de bien en eux ? Peu importe. Ce sont des hommes et, à ce titre, ils méritent notre attention. C’est le propos du film, et cette intention a quelque chose de vibrant et d’admirable. Tout est laid, dans ce film, mais tout se laisse quand même regarder. C’est d’autant plus triste et glaçant. Isild le Besco filme à la hauteur de cette désolation, de ce dénuement : des rapports de force ineptes, violents, effarants. Puis, par instants, des pauses aérées où la voix off récite des passages bibliques. On pense à Sous le soleil de Satan de Pialat ou à Breaking the waves de Lars von Trier. Ce désir de montrer le monstrueux, dans sa banalité, est évidemment louable.


BAS FONDS bande annonce isild le besco
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Bas fonds, d’Isild le Besco, avec Valérie Nataf, Ginger Roman, Noémie le Carrer
France, 68 minutes, Drame
Sortie le 29 décembre.

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Olivia Leboyer
Docteure en sciences-politiques, titulaire d’un DEA de littérature à la Sorbonne  et enseignante à sciences-po Paris, Olivia écrit principalement sur le cinéma et sur la gastronomie. Elle est l'auteure de "Élite et libéralisme", paru en 2012 chez CNRS éditions.

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