Théâtre

Une version terne de Derniers remords avant l’oubli

13 October 2010 | PAR Christophe Candoni

Le collectif In Vitro s’est formé récemment mais n’en est pourtant pas à sa première production. Julie Deliquet présente une mise en scène minimaliste de « Derniers remords avant l’oubli » une des pièces phares de l’œuvre de Jean-Luc Lagarce. Le spectacle, repris jusqu’au 20 novembre au Théâtre Mouffetard, a reçu le prix du public du Festival du Théâtre 13.

Un dimanche à la campagne, une journée revigorante… Trois individus se retrouvent au moment où deux d’entre eux (Hélène et Paul) veulent se séparer d’un bien commun, une demeure qu’ils ont achetée autrefois ensemble, alors que le troisième (Pierre) y vit, y est resté et s’y accroche. Faire table rase d’un temps désormais révolu. On reconnaît un petit air tchekhovien dans cette histoire de maison comme symbole et vestige d’un passé à balayer qui refait surface et provoque une crise inévitable.

Le caractère intimiste de la pièce trouve sur le plateau du Théâtre Mouffetard un espace adéquat qui favorise un rapport de proximité entre la salle et la scène. L’absence volontaire de décor figure un lieu en jachère, c’est une drôle d’idée, peut-être pour accentuer le mode de vie marginal et isolé de Pierre, le personnage que joue avec subtilité Serge Biavan, parfois bourru, avec un mélange de calme et de lassitude. La maison, en chantier comme sa vie où tout reste à construire, demeure un lieu peu accueillant, inhospitalier, dont le sol est recouvert de polyane, sans meuble et où une vieille porte sur deux tréteaux fait office de table pour le repas improvisé.

Les acteurs sont dirigés vers une « anti-théâtralité » assumée, se coupent la parole, prennent un ton cinématographique, pour donner l’illusion d’une parole spontanée et réaliste. Les dialogues si particuliers et très écrits chez Lagarce supportent assez difficilement le bavardage et ça passe mal car ils paraissent ici banalisés. Les acteurs travaillent très justement sur la véhémence alors ils s’engueulent continuellement. Tout est dit trop vite, sans retenue. C’est souvent drôle mais trop souvent le jeu est uniformément emporté. On retrouve le style tendu et sensible de Lagarce mais son texte est plus complexe, sa parole n’est pas seulement agressive, il y a un large sous-texte à explorer comme tout ce qui n’est pas dit car la force de ce texte dramatique est d’écrire la difficulté à s’exprimer, l’incommunicabilité entre les personnages.

La représentation manque de propositions radicales dans le passage du texte à la scène à part quelques illustrations par vidéo inutiles. Le rapport au texte de Julie Deliquet est fidèle (et c’est une qualité) mais trop littérale, voire neutre, induisant du prévisible. Les personnages sont dessinés à gros traits. Olivier Faliez dynamite la soirée par une approche nette et drôle du personnage d’Antoine, qui comble son manque d’étude par son baratin commercial, Annabelle Simon possède une fraicheur qui rend Lise très crédible.

Derniers remords avant l’oubli, au Théâtre Mouffetard, du mercredi au samedi à 21h et le dimanche à 17h. 73 rue Mouffetard (5 arr. M° Place Monge), 01 43 31 11 99.

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Christophe Candoni
Christophe est né le 10 mai 1986. Lors de ses études de lettres modernes pendant cinq ans à l’Université d’Amiens, il a validé deux mémoires sur le théâtre de Bernard-Marie Koltès et de Paul Claudel. Actuellement, Christophe Candoni s'apprête à présenter un nouveau master dans les études théâtrales à la Sorbonne Nouvelle (Paris III). Spectateur enthousiaste, curieux et critique, il s’intéresse particulièrement à la mise en scène contemporaine européenne (Warlikowski, Ostermeier…), au théâtre classique et contemporain, au jeu de l’acteur. Il a fait de la musique (pratique le violon) et du théâtre amateur. Ses goûts le portent vers la littérature, l’opéra, et l’Italie.

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