Cinema

When You’re Strange : portrait d’une génération

18 March 2010 | PAR Gary Serverian

A travers son documentaire consacré aux Doors, dont la sortie est prévue pour le 9 juin, Tom DiCillo raconte l’histoire d’un groupe ancré dans une époque dont il a su dégager l’essence.

The Doors aurait du être la version américaine des Rolling Stones. Mais son étoile s’est consumée. Au whisky et à l’héroïne. Entre temps ils ont enregitré cinq albums ( Strange Days, Waiting For The Sun, The Soft Parade, Morisson Hotel, LA Woman) et vendu 80 millions de copies qui leur ont valu 4 disques d’or. Et ce en l’espace de 5 ans. Prodigieux. Mais plus que tout The Doors a été la bande son de toute une génération. En associant sessions live, interviews, ou certaines séances en studios, à des images et des séquences illustrant le contexte social des 60’s DiCillo en livre un instantané.
Coincé entre la frange puritaine d’une Amérique conservatrice et le mouvement hippie, le groupe est un produit pur jus des années 60. S’il n’entend pas délivrer un message politique, The Doors est de fait politisé. Car le groupe se nourrit d’un contexte social marqué par la guerre au Vietnâm et le mouvement de lutte pour les droits civiques. Jonché sur les cadavres de Martin Luther King et Bobby Kennedy, le conservatisme d’une Amérique violente tente d’éteindre la flamme qui anime The Doors. Et c’est en reconstituant le contexte des sixties que DiCillo dégage l’essence du groupe.
Essence à la croisée de diverses influences. Du Blues au Jazz en passant par le Flamenco, The Doors repousse les limites du rock. Car si Morisson rêvait d’Elvis Presley, la formation musicale de John Densmore se fait au rythme de Mingus et Coltrane. Robby Krieger a quant à lui commencé avec une guitare sèche entre les mains. Sur des influences latines. En constante mutation, The Doors était avant tout un melting pot musical. D’ailleurs Densmore soulignait que s’ il était impossible de faire cohabiter rock et jazz, The Doors tentait l’impossible.

Quatre membres. Quatre influences. The Doors c’était avant tout quatre potes. Quatre potes un peu surpris par la soudaineté de leur succès. Et légèrement déboussolés par les à côtés d’une exposition médiatique pas nécessairement souhaitée. Notoriété dont Jim Morrison entendait bien profiter. Superstar des 6O’s il redéfinit le dicton Sex, Drug and Rock and Roll. Jusqu’à s’en brûler les ailes. Et parfois en perdant de vue l’essentiel. Car son addiction au LSD puis à la cocaïne ainsi que sa dépendance à l’alcool limitent les ambitions d’un groupe aux cadences infernales. Cadences que Jim Morrison a du mal à suivre. Mais les autres sont là. Ils sont là quand le chanteur s’effondre sur scène. Là encore pour lui rappeler ses responsabilités. Car The Doors existent avant tout à travers Jim Morrison. Et les autres le savent.

Le succès du groupe tient à la personnalité de sa star. Rock star qui choque une Amérique puritaine à mesure qu’elle embrase sa jeunesse. A sa façon Morrison était l’idôle des jeunes. Surtout des jeunes filles. Ses postures pacifistes et humanistes mêlées à son j’m’en foutisme naturel séduit les foules. JM, c’est la rencontre de deux philosophies. Peace and Love et Fuck the World. Deux extrêmes. Et ce sont justement ses excès qui le conduiront à sa perte.

Utilisant la métaphore de l’allumette, DiCillo résume idéalement la vie de ce fils de militaire. En combustion. Pendant que son père commande une division au Vietnâm, Morrison insulte le flic qui l’interrompt en plein rapport sexuel dans sa loge. Il déteste obéir. Et incite son public à la désobéissance. Le leader des Doors boit, fume, se drogue. Et il écrit. Des chansons et des poèmes. En avril 71, en compagnie  de Pamela Courson, sa compagne, il traverse l’Atlantique et se rend à Paris. Pour écrire. La rock star boit toujours autant. Bien qu’handicapé par une toux aigüe liée à une trop forte consommation d’alcool, Morrison fait fi des recommandations médicales. La dépendance est trop forte.  Un jour de mauvaise cuite, le chanteur ne se sent pas bien. Il va prendre un bain. Et succombe d’une crise cardiaque dans la baignoire. Mort a 27 ans. Comme Jimmy Hendrix. Jim Morrison emporte avec lui l’esprit des Doors. Mais aussi celui d’une génération. Les hippies sont devenus des has been. Une page se tourne. Nixon est Président. L’Amérique a gagné. Et le film se termine comme il avait commencé. Sur l’image d’une allumette en combustion qui se consume  progressivement pour finir par s’éteindre.

When You’re Strange, film écrit et réalisé par Tom DiCillo, en salle à partir du 9 juin.

 

Infos pratiques

WE ARE THE ROMANS : 25 mars à Paris
France Soir à la relance
Gary Serverian

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration