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#CarnetDeVoyage : Littoral charentais, chemins alternatifs

#CarnetDeVoyage : Littoral charentais, chemins alternatifs

23 August 2019 | PAR Sabina Rotbart

Tout le monde connaît La Rochelle, ses festivals, son port. Mais on y court plutôt pour la musique manquant ses musées originaux et on passe à côté d’alentours pas banals comme Rochefort, le pays des demoiselles et de Loti l’extravagant. On manque aussi Fouras, cité balnéaire incroyablement créative, riche en festivals pointus comme la Route des carrelets actuellement ..

Bien sûr, avant d’aborder des rivages moins courus, impossible de faire l’impasse sur la Rochelle. A condition de la parcourir autrement. Le passant avisé s’y rendra à l’aube, avant le flot des visiteurs, dans les parfums iodés d’un zéphyr caressant. Et sans doute à vélo, dont cette ville est pionnière (230 kilomètres de pistes cyclable. A moins de lézarder sur la plage accessible depuis le centre en 25 minutes grâce à un un passeur solaire.

Rebelle, bastion du protestantisme, la ville possède un cœur ancien où s’entremêlent bâti médiéval, arcades voûtées XVIIème où se vendaient sucre et fourrures venus du Canada et des Antilles, luxueux hôtels particuliers construits au XVIIIème par des armateurs enrichis. Des tours monumentales gardent l’entrée du Vieux-Port, la Tour Saint Nicolas et la Tour de la Chaîne, à la fois phare et prison (des graffitis en témoignent, accès gratuit, www.charentestourisme.com ).

Terriblement indépendante, la Rochelle a résisté au pouvoir royal jusqu’au Grand siège de 1627 mené par Richelieu. Les vestiges de cet épisode célèbre ont failli disparaître en 2013 dans l’incendie dramatique (déjà!) de l’hôtel de ville Renaissance, un des plus beaux de France, qui rouvrira au public en décembre, enfin remis en état. En s’enfonçant davantage au cœur de la cité, le Quartier des Halles apparaît, hautement recommandable pour les gourmands car producteurs locaux et ostréiculteurs y tiennent table ouverte (comme Roumegous, bar à huîtres fréquenté par les locaux).

Des français dans la Ruée vers l’or
La Rochelle possède un trésor, Le Musée du Nouveau monde, logé dans un hôtel particulier de style Louis XV. Il raconte l’histoire du développement commercial de cet important port négrier, le commerce avec les Antilles et le Canada, cette « Nouvelle France ». Un pan de l’histoire rarement montré. Encore plus étonnant, le dernier étage permet de découvrir ces nombreux français qui ont participé à la Ruée vers l’or en Californie à partir de 1848. (www.musees.larochelle.fr ).

Impossible de ne pas être séduit, par le célèbre Café de la Paix, au décor 1900 intact. C’était le fief de Georges Simenon, l’écrivain a écri ici le Testament Donadieu, inspiré d’une rencontre avec un riche armateur … Quant à loger, pourquoi ne pas le faire dans une ancienne fabrique de filets de pêche transformée en hôtel ( www.hotellafabrique.com, 100 euros la double) car elle est située en plein centre.

Des poissons beaux comme un tableau
Irrésistible aussi, le marché de la Rochelle fait penser au célèbre tableau de Chardin, la Raie, pour ne pas le nommer, tant le poisson a l’œil vif, presque moqueur. Des fromages de chèvre sublimes y prennent la forme du Fort Boyard et les gâteaux pralinés inventés par des moniales gourmandes sont un péché charmant. Bref, à la Rochelle, on se délecte. Notamment au Prao, l’endroit où foncer le soir (réserver absolument, www.prao.biz), dans le quartier Saint Nicolas, un ancien quartier de pêcheurs, ultra branché, peuplé d’artisans d’art. La cuisine est gouteuse, décalée (mayonnaise à l’encre de seiche, quasi de veau à la sauce cognac), les ingrédients viennent en direct du producteur. Et la boutique de design local éponyme pourrait tenir la dragée haute à bien des boutiques parisiennes! La fabuleuse cantine, juste ouverte, parie elle aussi sur le local et programme deux soirs par semaine des musiciens issus de la scène locale ou d’horizons plus lointains ( www.lafabuleusecantine.fr)

Ile ou Presqu’île, le choix impossible…
A une encablure de la Rochelle, vous pouvez rejoindre l’île d’Oléron la sauvageonne où vient d’être filmé Thalasso avec Depardieu et Houellebecq. Un lieu à ne pas manquer, le Phare de Chassiron, qu’il faut grimper pour se maintenir en forme (224 marches tout de même !) rayé comme un bagnard et réputé mener les navires au désastre. Mais surtout, le site ostréicole de Fort Royer où à l’initiative heureuse d’une poignée de femmes entreprenantes, réunies en association, on vous expliquera absolument tout de l’élevage des huîtres en claires, qui fait la spécificité locale, un gout pas trop salé (T : 05.46.47.06.48). A partir de septembre, les plages sont moins fréquentées.(www.fort-royer-oleron.fr)

Sinon, vous pouvez faire une virée à l’île d’Aix, une île bijou, fleurie comme un jardin, d’où Napoléon voulut fuir vers les Etats-Unis, ou à Fouras-les-bains, la discrète, qui a, elle, la douceur des stations balnéaires XIXème préservées sans en avoir la nostalgie. Presqu’île paisible, bien protégée des flots rageurs par les îles de Ré et d’Oléron en avant-poste, Fouras est la villégiature de Rochefort, cité militaire à 20 minutes dans les terres (www.rochefort-ocean.com).

Chalets aux mosaïques colorées, castels de conte de fées et créneaux pour rire, cottages Art nouveau et belvédères se succèdent sur le boulevard de l’Océan. Le Casino est enfoui dans une forêt touffue, le Bois vert, où se cachent de sublimes demeures bourgeoises. C’est la station balnéaire idéale pour un week-end à deux, par exemple au Grand Hôtel des bains, ancien relais de postes doté d’un mini spa très fun (www.grandhotel-desbains.fr).

C’est aussi une commune vivante qui invente de petits festivals pointus, comme les Arts fous en juillet, éclectique en diable (groove et jazz www.rencontresdesartsfous.org) ou la Route des carrelets, les 23 et 24 aout, quand les cabanes sur pilotis des pécheurs sont mises en lumière le soir, entourées le jour d’interventions artistiques et de nourritures délectables (www.territoires-imaginaires.fr.)

 

 

Rochefort, militaire et pétulante
De Fouras-les-bains, vous rejoindrez Rochefort, à l’intérieur des terres, une ville que Louis XIV choisit sur le conseil de Colbert pour abriter son arsenal de guerre, d’où ce chapelet de forts qui ceinturent son accès, Fort boyard, Fort Royer, Fort Louvois et Fort de la pointe. Au Musée Hebre, il faut se faire raconter devant le superbe plan relief de la ville la naissance de la marine de guerre française dont l’arsenal de Rochefort fut le point de départ (Michel Basse, guide conférencier T : 05.46.82.91.60).

Loti, l’hurluberlu
Et monter ensuite à l’étage découvrir une des plus belles visites virtuelles actuelles. C’est celle de la Maison de Pierre Loti, écrivain et académicien (élu contre Zola !) désormais plus connu pour le romanesque de sa vie que pour ses écrits à l’orientalisme lascif. Constat détonnant, la visite virtuelle est plus intéressante, beaucoup mieux expliquée et surtout plus confortable que ne l’était la demeure de l’écrivain dont la dimension et le fouillis savamment désorganisé s’accordait mal à des visites de masse ! Le visiteur découvre les fêtes incroyables données par cet écrivain hurluberlu… Loti imposait à ses invités de venir déguisés de la gare jusqu’à son domicile pour la plus grande joie de la population locale…

On l’aura compris, à Rochefort, sous l’apparence d’un tracé au cordeau, une certaine folie douce affleure. C’est d’ailleurs ici, en 1966, que Jacques Demy, séduit par l’immense carré de la place Colbert, a filmé les Demoiselles de Rochefort, la première comédie musicale française. Avec Gene Kelly, Catherine Deneuve et Françoise Dorléac. Les volets étaient repeints en rose tendre, bleu ciel et jaune paille. Il n’y a guère que le pont transbordeur, célèbre exemplaire d’architecture métallique, qui a échappé de peu à une couche de rose tyrien !

A côté des bassins où l’Hermione se refait parfois une beauté avant de prendre le large, un bâtiment extrêmement élégant, la Corderie royale, dont la scénographie, passionnante, vient d’être entièrement renouvelée. Vous apprendrez là ce qu’est une encablure et verrez les mateloteurs faire de très beaux objets contemporains en nœuds marins…
Tout près des magasins aux vivres, une luxueuse résidence de tourisme vient d’ ouvrir www.corderieroyalerochefort.fr)et on trouve une bonne table, Le Cap nell où goûter la jonchée, ce fromage blanc au goût d’amande amère lié dans les joncs des marais proches, des zones naturelles préservées.

S’informer : www.infiniment-charentes.com
www.rochefort-ocean.com
www.corderie-royale.com
www.larochelle-tourisme.com

Sabina Rotbart

 

Visuel : Fouras, Rochefort Océan, Route des Carrelets©Nicolas Patault

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Sabina Rotbart
journaliste en tourisme culturel, gastronomie et oenotourisme. [email protected]

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