Théâtre
Un Macbeth flamboyant pour fêter 50 ans de soleil

Un Macbeth flamboyant pour fêter 50 ans de soleil

30 May 2014 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Pouvoir, résistance et folie. Quelle brillante idée de monter Macbeth à la façon des grandes heures du Théâtre du Soleil pour fêter 50 ans de spectacles, 50 ans d’émotions, 50 ans de souvenirs, 50 ans de filiation. Hier, 29 mai, l’harmonie était parfaite entre le public et les comédiens. Ariane était à sa table, liseuse attentive, scribe critique. 29 mai 1964-29 mai 2014, 50 ans, et ça ne fait que commencer.

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« Quand la bataille sera-t-elle gagnée ?  » demande une drôle de dame, disons une sorcière sur un champ de bataille fait en peau de bête. Bientôt elles seront trois, prophétiques pythies à livrer à Macbeth (Serge Nicolaï) et Banquo (Vincent Mangado) les oracles : le premier sera duc de Cawdor et de Glamis, mais aussi roi. Son fidèle compagnon est à la tête d’une descendance de rois. Le général vrille, devient fou, prend cette hallucination vécue à deux pour argent comptant et devient un tyran assoiffé de pouvoir, capable de tuer à la chaîne pour que son dessein se réalise. Il a avec lui son épouse( Nirupama Nityanandan), avide également avant de sombrer dans la folie.

Arianne Mnouchkine nous offre une mise en scène monstre et étonnamment contemporaine. Celle qui sait créer une forêt avec le détail d’une branche choisit ici de mêler sa grammaire, Jean-Jacques Lemetre est toujours dans sa jungle d’instruments de musique et n’a pas perdu sa longue barbe blanche, mais elle nous donnera l’occasion de nous délecter d’une scène montrant Lady et Lord Macbeth vautrés devant trois écrans plats. Plus tard, Macbeth aura une conversation skype avec Dieu ou le Diable, vous choisirez ! Il y a surtout des torrents de beauté. C’est elle qui a su transformer la soie en eau, faisant du tissu aux ondulations légères un acteur essentiel, et cela depuis longtemps. Un incroyable sauvetage en mer se fera de la sorte. Il y a un bal aussi où même les tables tourneront, dans une esthétique très « Bauschienne »

Ils sont plus de 40 sur scène, et la méthode Mnouchkine opère. Ils font tout, jouent d’abord mais font danser les décors qui sont ici comédiens. Les entrées et les sorties se font en courant, dans une énergie palpable. Les rideaux se soulèvent pour laisser passer des dizaines de lustres, une roseraie entière, un tank ou une maison. Le feu d’artifice dure quatre heures. Quatre heures passées à sombrer avec Macbeth sans pouvoir le retenir. « Pour tromper l’époque, il faut ressembler à l’époque ». Le couple est au commencement, en apparence, tout à fait conforme au protocole

La part psychanalytique de la pièce est particulièrement soignée. On est face à un fou qui hallucine,on entend « avant on mourrait, il y avait une fin » . Le délire de Lady Macbeth somnambule loquace nous happe. Aucune autre solution que le retrait du monde n’est envisageable Comment arrêter la bête immonde.

Macbeth au Soleil revêt une saveur particulière, nous questionnant sur les dangers du désir de pouvoir total et nous ramenant à une réalité qui résonne particulièrement en ce moment : oui, la résistance est possible.

Macbeth au Théâtre du Soleil jusqu’au 13 juillet. Reprise en octobre.

Visuel : © Michèle Laurent

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