Théâtre

Mélanie Laurent et Jérôme Kircher dans une comédie douce-amère

03 March 2010 | PAR Christophe Candoni

C’est au Théâtre La pépinière dans « Promenade de santé », la nouvelle pièce de Nicolas Bedos que Mélanie Laurent joue pour la première fois sur les planches. Elle a commencé jeune et mène une carrière exemplaire dans le cinéma français (poignante dans Je vais bien ne t’en fais pas, sublime dans Le concert) et internationale avec dernièrement Inglourious Blasterds. L’espoir des César 2007 continue de tenir ses promesses sans jamais décevoir à l’écran et désormais au théâtre. Mise en scène par l‘auteur de la pièce, elle est accompagnée par l’excellent Jérôme Kircher.

 

 

Elle est assise sur un banc et écoute la radio. Il entre et discute avec elle. Le dialogue d’abord conflictuel s’établit difficilement. Chacun se méfie de l’autre mais le charme finit par opérer : un vrai scénario de comédie romantique. La jolie courette qu’a imaginée de manière très stylisée la scénographe Sophie Jacob est celle d’un hôpital psychiatrique. Ils sont en cure, sous médocs, ils reconnaissent en l’autre leur fêlure et s’apprivoisent, se désirent. Ce sont deux personnes en marge, à la fois pathétiques et touchants, cabossés par la vie qu’ils ne savent pas prendre, inadaptés au bonheur.

« Promenade de santé » est une comédie douce-amère, au sujet profond. Le texte de Nicolas Bedos n’est pas toujours suffisamment élaboré. La pièce courte ne dure qu’un petit peu plus d’une heure et pourtant l’auteur n’évite pas quelques banalités dans les dialogues. C’est souvent incisif, déroutant mais parfois inutilement grossier. Cependant, il décrit très bien l’instabilité névrotique de ses personnages. Il réunit de merveilleux acteurs qu’il dirige simplement avec tendresse. Mélanie Laurent et Jérôme Kircher forment un couple impossible, lumineux et intense.

Jérôme Kircher joue avec finesse et séduction un alcoolique bagarreur qui a cumulé les tentatives de suicides. C’est un rôle peu évident qu’a offert Nicolas Bedos à Mélanie Laurent pour sa première apparition sur les planches. Elle campe un personnage trouble et instable, une nymphomane en plein trouble identitaire. Elle se rêve danseuse interprétant le cygne noir, on la voit dans une scène muette d’une grâce infinie enfiler ses chaussons de danse et monter sur les pointes. Très à l’aise avec la langue franche et crue, elle excelle dans ce rôle écrit pour elle. Avec fièvre et douceur, elle plonge dans la dépression et la solitude de cette jeune amnésique et joue avec une intuition juste son irrépressible envie de vivre et d’aimer qui la pousse vers l’homme qu’elle rencontre. Les deux acteurs rendent palpables le chaos intérieur et la violence contenue des personnages grâce à une gestuelle toquée intelligente et hyper crédible. On aime être transporté ainsi au théâtre, recevoir de si belles émotions même naïves. C’est le cas ici avec cette histoire, à la fois légère et grave, drôle et étrange. Cette pièce est une confusion entre la vie et le fantasme, une sorte de rêve éveillé. Après un coup de théâtre très bien amené et imprévisible, Mélanie Laurent finit les larmes aux yeux, irradiante et tellement vulnérable, elle est magnifique.

Promenade de santé, du mardi au samedi à 19H, au théâtre de la pépinière, 7 rue Louis le Grand, 2 arr. M° Opéra. 01 42 61 44 16, 29 €

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Christophe Candoni
Christophe est né le 10 mai 1986. Lors de ses études de lettres modernes pendant cinq ans à l’Université d’Amiens, il a validé deux mémoires sur le théâtre de Bernard-Marie Koltès et de Paul Claudel. Actuellement, Christophe Candoni s'apprête à présenter un nouveau master dans les études théâtrales à la Sorbonne Nouvelle (Paris III). Spectateur enthousiaste, curieux et critique, il s’intéresse particulièrement à la mise en scène contemporaine européenne (Warlikowski, Ostermeier…), au théâtre classique et contemporain, au jeu de l’acteur. Il a fait de la musique (pratique le violon) et du théâtre amateur. Ses goûts le portent vers la littérature, l’opéra, et l’Italie.

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