Théâtre
Légendes de la foret de Ödön Von Horváth Mise en scène par Yann Dacosta.

Légendes de la foret de Ödön Von Horváth Mise en scène par Yann Dacosta.

22 October 2017 | PAR David Rofé-Sarfati

La compagnie du Chat Foin avec audace monte le texte difficile de Von Horváth, une saga avant la catastrophe dans la Vienne pré Anschluss. Sournoisement, dans un spectacle d’une grande richesse et derrière la musique, les chants, les danses et les rires se tissent le drame inaugural de la désintégration de l’Europe. Un  feuilleton faussement innocent par un brillant Yann DaCosta.

Ödön Von Horváth romancier hongrois est peu connu. Il est souvent connu à la marge parce que le 1er juin 1938, il est tué, mort pathétiquement idiote,  par la chute d’une branche d’arbre devant le théâtre Marigny à Paris Partisan de la République, antinationaliste convaincu, Horváth se veut dans une certaine mesure au dessus des partis. Il n’aime guère la social-démocratie, et comprend vite qu’il s’agit de se méfier du sectarisme et du fascisme du Parti communiste allemand. Il est l’un des premiers et rares auteurs à attaquer les nazis.

L’histoire est une histoire populaire, un drame social. Dans une rue tranquille une boucherie, un marchand de jouets et un tabac se côtoient. Marianne, fille de Magicus, tenancier du magasin de jouets, projette de se fiancer avec le boucher Oscar lorsqu’elle a un coup de foudre pour le loulou Alfred, ancien amant de la vieille buraliste Valérie. Et elle aura un enfant avec Alfred; celui ci papa inconséquent met le bébé, le bâtard en pension chez sa grand-mère à la campagne où il mourra bientôt d’un refroidissement. Marianne effondrée essuie le refus obstiné de son père déshonoré qui refuse de la reprendre avec lui. Abandonnée, elle se retrouve danseuse au cabaret Chez Maxim. Un soir, Magicus sort avec son ami et découvre Marianne dansant nue au Maxim. Marianne, pour avoir tenté de délester l’ami américain d’un billet de cent schillings, se retrouve en prison. Valérie réussit finalement à réconcilier Marianne et son père. L’enfant de la honte étant mort, Oscar le boucher propose à nouveau d’épouser Marianne.

La mise est scène est minimaliste quoique rigoureuse, car le propos de Da Costa est de privilégier le jeu des comédiens. En cela sauf à regretter un manque de rythme dans la première partie due certainement au démarrage (pièce vue à la première) le texte est défendu admirablement par la troupe et l’on rit autant que l’on frémit. La scénographie intelligente compose à chaque fois un fond de plateau en aveugle qui symbolise le hors champ du nazisme en marche.

Surtout la réussite de Da Costa tient à ce qu’il a su rendre compte de l’univers et du propos de Horvath, l’univers des petites gens modestes assommées par la morale religieuse et la loi patriarcale chez qui rien ne vient faire obstacle à la bêtise, à l’inculture, à la méchanceté, au silence des sentiments et au désespoir des égoïsmes. La force de l’adaptation de Da Costa tient à ce que ces personnages là, éléments d’un tout préfigurent la catastrophe à venir. Une pièce intelligente et précieuse.

Auteur : Ödön Von Horváth

Metteur en scène : Yann Dacosta
Distribution : Théo Costa-Marini, Laëtitia Botella, Dominique Parent, Sandy Ouvrier, Jean-Pascal Abribat, Maryse Ravera, Jade Collinet, Pierre Delmotte, Florent Houdu, Jean-François Levistre, Pablo Elcoq et Pauline Denize

Dates et horaires : 18-19-20 octobre 2017 : CDN Normandie-Rouen
8 et 9 novembre 2017 : Trident, Scène Nationale-Cherbourg
15 novembre 2017 : Scène Nationale 61 Alençon
23 novembre 2017 : DSN
28 novembre 2017 : CDN-Vire
17 décembre 2017 : Le Tangram, Scène Nationale Évreux
12 et 13 décembre 2017 : CDN-Caen
Durée : 3h

Crédit photos© Arnaud Bertereau Agence Mona

Infos pratiques

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