La vie est un songe de Calderon mise en scène Clément Poirée à la Tempête

A la direction de la Tempete la transition dans la continuité de Philippe Adrien vers son ancien assistant Clément Poirée se poursuit. Après Vie et mort de H de Hanok Levin, Clément Poirée s’attaque au texte puissant de Calderon. Et c’est presque parfait.

Il y a toujours un authentique plaisir à découvrir ou à redécouvrir le chef-d’oeuvre du théâtre baroque espagnol du 17e siècle avec Calderón. Le jeune Sigismond, héritier du trône d’une Pologne fictive, vit enfermé dans une tour depuis qu’une prédiction a promis au roi Basile que son fils le destituerait pour plonger le royaume dans la violence. Joueur, le roi décide de tenter le sort en offrant à Sigismond la place de prince. Le fils confirmera la malédiction, il deviendra un tyran et le père le jettera de nouveau au cageot en lui faisant croire que tout ceci n’était qu’un songe. Mais une révolte éclate et le peuple, libérant Sigismond, le proclame son souverain. De grands changements se sont produits en lui. L’amour, sous les traits de Rosaura, sa jumelle en infortune aura été le grand agent de sa métamorphose. Victorieux sur lui-même, Sigismond rétablit l’ordre, pardonne à son père, et fait par la sagesse de ses décisions l’admiration de tous.

Entre rêve et réalité, la pièce de Calderon manie l’invraisemblable du mythe et les passions extrêmes de  l’épopée. Clément Poirée avec bonheur respecte le texte et appuie le trait de l’humour et rend Basile plus Triboulet le bouffon que Roi de France.

La mise en scène où l’on retrouve son expertise des déplacements, ces invisibles chorégraphies de la troupe sur l’immense plateau de la Tempête, se situe entre le théâtre de rue, l’opéra et les films d’Heroic-fantasy, drôle, sombre aussi, parfois angoissante. Elle est une merveille de la proposition, car elle restitue l’univers de Calderon et honore l’œuvre qui s’occupe de philosophie, de métaphysique, qui fouille les questions du pouvoir et de son mésusage, de la justice, de l’honneur et de la liberté, et plus loin de l’énigme du destin des hommes.

Le spectacle est splendide. Chaque comédien incarne son personnage entre songe et réalité procurant un joyeux plaisir de théâtre. Mention spéciale à Morgane Nairaud (dommage que sa plus belle tirade ne soit entendue que dans notre dos) et à John Arnold, un Roi Basile et comique et sage. Avouons un décor déjà vu et une façon ancienne de faire clamer, parfois crier le texte.  Il n’empêche. Clément Poirée a su joindre tous ces talents au sien. Et la pièce, où on ne s’ennuie jamais, honore Calderon et offre de merveilleux moments de théâtre.

Crédit Photos : Antonia Bozzi

avec
John Arnold Basile
Louise Coldefy Étoile
Thibaut Corrion Clairon
Pierre Duprat Astolphe
Laurent Ménoret Clothalde
Morgane Nairaud Rosaura
Makita Samba Sigismond
Henri de Vasselot Le Musicien
scénographie Erwan Creff
lumières Kevin Briard assisté de Laurent Cupif
costumes Hanna Sjödin assistée de Camille Lamy
musiques et son Stéphanie Gibert assistée de Michaël Bennoun
maquillages et coiffures Pauline Bry
collaboration artistique Margaux Eskenazi
régie générale Farid Laroussi
habillage Emilie Lechevalier

Infos pratiques :
La vie est un songe
Au théâtre de la Tempête
Route du Champ de Manoeuvre
75012 Paris

Salle Serreau • Durée : 2h25
du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h

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