Théâtre
Donner de la confiture aux cochons : Biopigs au Théâtre du Rond-Point

Donner de la confiture aux cochons : Biopigs au Théâtre du Rond-Point

18 April 2017 | PAR Marianne Fougere

Des scènes finales et des applaudissements à gogo ou comment la compagnie du Zerep revisite, sans se prendre au sérieux, le subconscient théâtral.


[rating=4] 

Du l’ard et du cochon, telle pourrait être résumée, en quelques mots, la nouvelle provocation de la compagnie du Zerep. Habituée du grand n’importe quoi, avec Biopigs, cette dernière ne déçoit pas : costumes kitsch à souhait, groins en guise de nez, scènes trash et humour caustique, tous les ingrédients sont réunis pour concocter un cabaret déjanté dont seuls Sophie Perez et Xavier Boussiron ont le secret.

Qui dit cabaret, pense inévitablement numéros, mais ici le contenu de ceux-ci n’a que peu d’importance, nos deux compères n’en retenant que la fin. Le principe de Biopigs est, en effet, de la plus radicale simplicité : faire de l’état de frustration qui, à chaque représentation, envahit inexorablement le spectateur le modus operandi d’une pièce carnavalesque. Dans une succession de numéros parodiques autour de la figure titulaire de l’artiste, Biopigs se présente comme une arme d’auto-réduction massive du répertoire classique ou contemporain, comme une réduction ad absurdum de l’espace théâtral tout entier concentré entre les mains du public.

De Weber à Chéreau, de Bérénice à En attendant Godot, nul n’échappe au jeu de massacre et à la trombe d’applaudissements pré-enregistrés. Hommage, critique, parodie ou moquerie ? On hésite tant la compagnie du Zerep se fait un malin plaisir à déjouer les codes du genre, à tordre le cou au bon goût ; ne cédant pas à la tentation de se joindre à la bande son – et donc de frapper dans ses mains, on se contente de rire et de jouir. Nombreux sont, en effet, les moments hilarants dans Biopigs. Par exemple, la reprise de Clôture de l’amour de Pascal Rambert est particulièrement réussie ainsi réduite aux fameuses coiffes de plumes de la mise en scène originale et à un échange d’insultes entre deuch amants qui vraisemblablement ne ch’aiment plus. Mais, s’il est bien connu que la culture c’est comme la confiture, l’étalage et l’accumulation de références a de quoi désorienter un spectateur, accablé par le poids de son ignorance – car honnêtement, il est impossible de saisir toutes les private joke du tandem, de reconnaître tous les protagonistes de ce renversant name-dropping.

A la fin, toute en queue de poisson, les applaudissements du public – le vrai, cette fois-ci – paraissent bien timides comparés à ceux qui ont ponctué la représentation. Signe peut-être du sentiment de lassitude face à un tel zapping. Preuve aussi que la compagnie du Zerep a encore une fois touché là où ça fait mal, en nous rappelant à notre ordinaire suffisance…!

Visuel : © Ph. Lebruman

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