Théâtre
Dans Vers Wanda, Marie Rémond enquête à son tour sur Barbara Loden

Dans Vers Wanda, Marie Rémond enquête à son tour sur Barbara Loden

09 October 2013 | PAR Christophe Candoni

Marie Rémond, Sébastien Pouderoux et Clément Bresson reforment, après le beau succès d’André, leur trio gagnant dans Vers Wanda une nouvelle création présentée à la Colline.

Après les contrariétés du tennisman André Agassi, ce sont les déboires d’une personnalité complexe et éperdue qui ont passionné Marie Rémond, ceux de l’actrice américaine Barbara Loden. Celle qui fut l’épouse d’Elia Kazan a tourné devant sa caméra quelques très bons films mais a aussi dû essuyer nombre d’affronts comme lorsqu’elle fut retirée du casting du film L’Arrangement alors qu’elle avait elle-même inspirée le rôle qui lui était destiné. Par la suite, Barbara Loden devient elle-même réalisatrice. Son unique film, Wanda, âpre et de prime abord sans séduction, reçoit un tollé général à sa sortie avant un prix de la critique à la Mostra de Venise et une réhabilitation de Marguerite Duras et d’Isabelle Huppert. A partir du film et d’une enquête romanesque sur l’actrice signée Nathalie Léger, à quoi s’ajoutent de nombreux documents d’archives, le projet de faire un spectacle s’est établi sur un travail d’improvisation, d’écriture, de montage de textes. L’ensemble a débouché sur une narration très originale, solide même décousue, qui joue d’enchâssements permettant de faire se croiser les errances de la comédienne et du personnage qu’elle interprète au cinéma telles des doubles, renforçant le brouillage entre la réalité et la fiction et la confusion entre l’art et la vie.

La pièce s’ouvre sur la rencontre improbable entre une femme visiblement à la dérive et un gangster nommé Mr. Denis dans un bar minable. Elle va quitter foyer, mari, enfant pour le suivre sur les routes d’une existence brutale et médiocre. Barbara Loden interprète le rôle éponyme qu’elle s’est écrit. Marie Rémond à son tour lui prête sa silhouette frêle et blonde non dénuée d’une certaine ressemblance mais peu importe puisqu’elle ne joue pas Barbara Loden mais joue avec Barbara Loden comme d’une matière. La règle de jeu est valable pour les trois acteurs et c’est réjouissant. Pas d’authenticité dans la représentation, pas de mimétisme ni d’incarnation des personnages mais le plaisir du jeu, créatif et distancié, pour restituer à la fois la situation et son commentaire. Tout fonctionne formidablement. Car les comédiens sont bons, complices, ils jouent bien ensemble. Elle est une fille nature, sensible, vive, fine et si bien entourée de ses acolytes issus de la même promotion de l’école du TNS, Clément Bresson, devenu en un quart de seconde un voyou rustre ou Kurt Cobain au moyen d’une perruque blonde surfer et d’une chemise hawaïenne, et Sébastien Pouderoux en Kazan égocentrique et suffisant à souhait mais charmeur malgré tout.

Le plateau de la petite salle de la Colline est dégagé et en chantier (Marie Rémond en tenue de bricoleuse du dimanche tape du marteau et fait de la perceuse pendant l’entrée du public), un vieux canapé, un bar et un haut tas de charbon serviront de décor de fortune. Une simplicité totale qui n’empêche une forme d’accomplissement dans le ton, le style. Voilà ce qu’il y a d’admirable dans la proposition simple et savoureuse, sans chichi, des acteurs et auteurs de ce spectacle bien pensé, bien construit, inventif, ingénieux, drôle en plus, touchant, qui manque encore un peu de rythme mais ça viendra.

Au théâtre de la Colline. les mardis à 19h, du mercredi au samedi à 21h et le dimanche à 16h. Durée : 1h30.

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