Théâtre
[Avignon Off] Des “Z’ombres” et des nuages simples, denses, théâtraux

[Avignon Off] Des “Z’ombres” et des nuages simples, denses, théâtraux

25 July 2015 | PAR Geoffrey Nabavian

Très peu, très légèrement, et pourtant. En Avignon, ce spectacle imaginé par Marie Frémont et sa sœur Aurore, autour d’un texte d’Isabelle Pirot (La Dame d’Ithaque), a su se montrer d’une belle densité.

[rating=4]

z-ombresUn spectacle qui flotte. Sans véritablement d’action. Et pourtant traversé de sentiments et d’impressions très vraies. Touchantes. Un spectacle qui commence par mettre en avant la jeunesse intérieure. Isabelle Pirot, 58 ans sans doute, s’avance vers nous : « J’ai 18 ans », lance-t-elle. Avant de continuer sur les préjugés liés au grand âge. « On a pitié des vieux. Au premier rêve innocent… ». Elle, elle veut « mourir vivante ». Et son souvenir va être bien présent, sur scène. Joué par l’excellente Marie Frémont.

On se sent de citer le texte – créé en 2005 – car certaines répliques marquent beaucoup. C’est qu’Isabelle Pirot est comédienne et auteur, depuis de longues années (on avait vu d’elle La Dame d’Ithaque au Off, l’an dernier). Et sa prose, très orale, produit du mouvement sur scène, et de l’animation en nous. Les passages narratifs sont splendides. Et surtout, splendidement rendus. Au début, lorsque notre personnage va voir une amie à l’hôpital, on a tout à imaginer, du fait du côté non figuratif de la scénographie. Et on est touchés lorsqu’elle s’adresse à nous et raconte que, dans cette situation, elle a « fait la morte ». De belles idées comme celle-ci, Z’ombres en compte beaucoup. Une histoire de grain de blé notamment, rendue ultra théâtrale. Marie Frémont, graphique comme un personnage dessiné, anime les mots de sa présence physique forte. Et nos deux interprètes de jouer allègrement une même personne…

Un bémol : les passages abstraits, où les histoires laissent la place à du discours, n’ont pas toujours la même saveur que les moments narratifs. On aurait aimé davantage de récit. Mais on oublie assez vite, pour tomber sur des surprises. Tout à coup, on rencontre Pierre, pédagogue. Ou on s’étonne qu’au milieu d’une histoire, l’expression « c’est la merde » prenne un sens grave, inattendu, assez monumental… Le ton du spectacle, symbolisé par le « Z » en apostrophe, sait nous rattraper. Et faire resurgir des choses enfouies. Chez nous, comme chez tout spectateur, et c’est un pari qu’on fait…

Z’ombres, un texte d’Isabelle Pirot. Mis en scène par Aurore Frémont. Avec Marie Frémont et Isabelle Pirot. Scénographie : Claude Lenoir. Lumière : Geneviève Soubirou. Régie : Sébastien Lebert. Avec les voix d’Aurore Frémont, et de Serge Barbuscia. Durée : 1h10.

Visuel : © D.R.

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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