Théâtre
Antoine m’a vendu son destin/Sony chez les chiens

Antoine m’a vendu son destin/Sony chez les chiens

27 February 2017 | PAR Marianne Fougere

Dédale textuel troublant, la pièce de Dieudonné Niangouna déploie une poétique bruyante et accidentée qui, à force de mots, risque d’être inaudible.

[rating=3]
Dieudonné Niangouna a toujours voué une admiration infinie pour l’écrivain congolais Sony Labou Tansi. Pour ne pas gâcher cette rencontre post-mortem, il l’a retardée, attendant le temps de la maturité pour pouvoir la partager.

La découverte, en entrant dans la petite salle du Théâtre de la Colline, d’un dispositif tri-frontal, facilitant donc la proximité avec le public, donnait à penser que ce partage était placé sous les meilleures auspices. Le spectacle comporte en fait quatre textes qui se répondent et s’entrelacent, ce qui complique grandement la bonne réception du récit, pourtant poétique,

L’intrigue déployée par la pièce politique de Sony Labou Tansi est pourtant on ne peut plus simple. Antoine, président sur le déclin, simule un coup d’Etat pour démasquer ses ennemis. Mais rien ne se passe comme prévu : sa fausse détention en prison s’étire dans le temps si bien qu’Antoine finit par vouloir y rester de son plein gré. C’est autour de cette histoire que Dieudonné Niangouna noue un dialogue entre deux écrivains, entre deux générations, entre deux genres. Le récit quitte alors la prison d’Etat et le spectateur retrouve Antoine/Sony, sous la plume de Dieudonné Niangouna, chez les chiens…

Dans ce dédale textuel, les ennuis commencent, pour le héros de la farce d’une part, pour le témoin pris en otage, d’autre part. Difficile, en effet, de se réorienter quand les mots sont mitraillés plutôt que soigneusement pesés, vociférés plutôt que déclamés ; trop plein de mots qui, paradoxalement, compromet la lisibilité de la résurrection du grand auteur congolais et qui, malheureusement, condamne le spectateur à tenter de déchiffrer sans avoir pourtant toutes les clés. Cherchant des symboles là où ils ne sont peut-être pas, ratant des indices sans doute incontournables, le spectateur, trop occupé à réassembler les différentes pièces du puzzle, risque de passer à côté de ce bel exercice d’admiration.

Car, en creux de la fureur et de la colère, c’est une tentative d’éclairer le présent par le passé que déploie l’écriture incisive de Dieudonné Niangouna. Dans le silence des mots, on pressent l’amour que voue Niangouna à son pays et la relation houleuse qui les unit. Amour vache qui oblige, malgré les difficultés et les obstacles, l’écrivain à ne pas dissocier démarche artistique et engagement politique. En somme, une belle et troublante réflexion sur le pouvoir des mots et de la littérature. Dommage qu’elle ne se donne pas si facilement à lire.

Visuel: © Christophe Raynaud de Lage

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