Performance
“Songs for Takashi”, le temps des fleurs de Raimund Hoghe

“Songs for Takashi”, le temps des fleurs de Raimund Hoghe

27 November 2015 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Dans le cadre de l’excellent festival Les Inaccoutumés qui se déroule chaque automne à la Ménagerie de Verre, le chorégraphe Raimund Hoghe présente sa nouvelle création, sensible et forte, qui semble être la suite logique de An Evening with Judy.

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La dernière fois, Hoghe devenait Judy Garland en petite robe chic. Et jamais son handicap, il a une malformation congénitale qui lui donne l’allure fragile, ne venait troubler le glamour de ce spectacle. Il en est de même ici, où Hoghe qui fut le dramaturge de Pina Baush, offre un nouveau portrait, comme il en a l’habitude depuis 1994. Après La Callas ou Dominique Bagouet. C’est sous forme de playlist à son danseur-muse Takashi Ueno qu’il nous invite à découvrir l’homme qui virevolte.

Le kitsch est un moteur de l’avant garde. Songs for Takashi utilise ce ressort efficace. Hoghe arrive, on entend Liza Minnelli chanter Every Time We Say Goodbye. Le spectacle s’étire, dans une sensation d’infini. On pourrait penser qu’il est trop long et pourtant, en en sortant, on est remplis de joie. Hoghe est un magicien qui de son corps débordant d’angles occupe le plateau, nous interdisant totalement de regarder autre chose que le ballet de cet homme blessé qui pose des œillets pour Pina au sol. Il se munira d’accessoires, devenant plus gay que gay dans une nostalgie qui peut être celle d’un spectacle de vieux travestis à la Platel. Il offre à Takashi des monuments de la culture populaire : Aznavour (“Sa Jeunesse”), Dalida (“Mein Lieber Herr”) ou encore la reprise qu’Ozon donne à Huppert de “Message Personnel” d’Hardy dans Huit Femmes.

Takashi Ueno est ici à la fois le pion de la musique et de Hoghe, il est la poupée aimantée de la boite à musique qui se remonte jusqu’à la casse, jusqu’à taper contre le mur.

Hoghe nous attrape, les yeux s’embuent, les larmes coulent. En mettant en commun ces chansons qui toutes résonnent en nous et en les associant à la radicalité d’un plateau lent, où chaque geste (un voile qui se pose sur un visage, de l’eau versée…) devient un acte à la douceur inébranlable, somptueux. C’est un spectacle qui nécessite le temps de la réflexion pour prendre dans nos corps la place nécessaire.

Visuel : Raimund Hoghe ©Rosa Frank

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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