Opéra
Rien ne va plus! Mais l’élégance est là, dans le Joueur à l’Opéra des Flandres

Rien ne va plus! Mais l’élégance est là, dans le Joueur à l’Opéra des Flandres

16 June 2018 | PAR Yaël Hirsch

C’est avec une grande cohérence que l’Opéra des Flandres achève sa saison 2017-2018 « Rien ne va plus » avec l’opéra inspiré à Prokofiev par le roman de Dostoïevski. Toute la culture était à Gand et adoré la mise en scène de Karin Henkel.

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Composé en 1915 et 1916 Le joueur devait avoir lieu au Mariinsky mais n’a pas pu être produit avant 1929 à cause de la Révolution. Et c’est à Bruxelles que la première a eu lieu. Rien ne va plus, donc, vraiment dans cet opéra caractéristique du « Court 20e siècle » (E. Hobsbam). Adaptation partielle du roman de Dostoïevski (1866) le Joueur se déroule en quatre actes où l’on entre dans les affres de la passion pour le jeu du Général (excellent Eric Halfvarson), du précepteur de la famille Aleksej Ivanovitch (Ladislav Elgr) prêt à ruiner son grand amour Polina (Anna Nechaeva) pour assouvir sa passion. Quant au général, il compte sur le décès de sa tante Babolenka (Puissante Renée Morloc) pour pouvoir s’offrir une vie avec la demie-mondaine Blanche (Kai Rüütel) mais les rouages du jeu et de l’âge jouent contre lui.

Dans un décor années 1920 et avec des costumes magnifiques, Karin Henke propose une mise en scène aussi élégante que profonde pour cet opéra sur l’addiction. Alors que la scène monte comme un escalier avec une reproduction troublante des scènes et un doublage non moins troublant des chanteurs par des comédiens, une foule de joueurs grinçants traverse régulièrement la scène comme le souffle tragique de l’Histoire. Tandis que Dmitri Jurowski dirige l’orchestre symphonique de l’Opéra des Flandres avec autant d’ombres qu’il faut pour jouer une partition qui commence sur des bruits inquiétants en guise d’ouverture et où aucune mélodie ne peut jamais éclore, le choix d’un visuel expressionniste essentiel pour nous plonger dans cette terrible comédie humaine est judicieux.

L’esprit du casino est là marqué par de grands néons où les messages du destin passent plus sûrement qu’à travers un cœur ou un Oracle. L’on sort de l’opéra troublé aussi bien par la voix d’Anna Nechaeva que par le final visuellement magnifique où les jetons tombent du ciel comme des bombes. Une œuvre lyrique importante du 20e siècle trop rarement montrée, à voir absolument avant le le 19 juin à Gand et le 7 juillet à Anvers. Attention lire le livret avant, le spectacle est en Russe sous-titré en flamand.

visuel : photo officielle

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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