Opéra
Dans la “Lucia” de Serban, la soprano Pretty Yende brille

Dans la “Lucia” de Serban, la soprano Pretty Yende brille

18 October 2016 | PAR Yaël Hirsch

Après plus d’une cinquantaine de représentations dans les décors imaginés par le metteur en scène Andreï Serban (1995), la Lucia Di Larmermoor (1885) de l’Opéra Bastille est de retour jusqu’au 16 novembre 2016. Dans le rôle titre, ce 17 octobre 2016, prenant la suite de chanteuses illustres comme June Anderson, Natalie Dessay, Patrizia Ciofi ou Sonia Yoncheva, la Sud-Africaine Pretty Yende (en alternance avec Nina Minasyan) a été ovationnée dans le rôle de l’amoureuse folle de Walter Scott. Une belle production où des décors qui ont pu choquer il y a 20 ans sont devenus d’un élégant classicisme.

[rating=4]

Sous le pouls mesuré battu par le chef Riccardo Frizza, l’Orchestre de l’Opéra de Paris bat la mesure de la passion romantique 19e qui fait se rencontrer l’Italie (Donizetti) et l’écosse (Walter Scott) dans la ville lumière. Dans un grand demi cercle où l’espace se sculpte tout en verticalité, la mise en scène élégante d’Andreï Serban s’est inspiré de l’architecture de la chapelle de la Salpêtrière où Charcot soignait/étudiait (entre autres) les hystériques pour parler de l’enfermement et de la folie de Lucia. Tour à tour salle de sport (qui a dû choquer à l’époque mais est vraiment élégante aujourd’hui même si les balançoires sont un peu étonnantes), caserne militaire et hôpital, ce demi cercle central fait du public le gardien de la tour central du grand panoptique où une civilisation de famille, de sang et d’honneur a pu enfermer les femmes. Dans ces décors, l’orchestre se fait donc discret pour laisser retentir des voix qui chantent le devoir, l’amour et la désillusion.

Dans la distribution de ce lundi 17 octobre 2016, ces voix sont exceptionnelles, toutes. Dès les première notes, dans le rôle du frère, Enrico, Artur Rucinski est parfait. Et en Lucia, la belle et puissante Pretty Yende emporte l’adhésion du public dès le “Regnava nel silenzio” et en face d’elle, en suivante, Gemma Ni Brihain est juste parfaite. L’arrivée de Piero Pretti en amant Edgardo donne lieu à un duo d’une pureté à couper le souffle, très structuré, mesuré, enveloppant et qui culmine avec le Ah! Verranno a te sull’aure” de la fin de l’acte I. A l’acte II, on retrouve le timbre chaleureux de Artur Rucinski et, alors que des passerelles sont lancées en diagonales dans l’espace vertical de la chapelle, les voix et les se disposent de manière à saturer l’espace et la tension culmine avec le fameux sextuor de la fin de l’acte. La tension monte, la folie est là et le troisième acte vient dénouer les derniers doutes, notamment à la fameuse scène de la folie “Oh, giusto cielo!…Il dolce suono” où Pretty Yende ravit le public.

Une consécration pour la magnifique soprano et un grand moment d’opéra pour le public qui sort bouleversé par les voix multiples de cette excellente production de Lucia Di Lamermoor.

Lucia Di Lamermoor, de Gaetano Donizetti, mise en scène Andrei Serban, direction : Riccardo Frizza, choeurs et orchestre de l’Opéra de Paris. Avec dans le rôle de Lucia : Pretty Yende (14, 17, 23 oct., 4, 8, 16 nov.) ou Nina Minasyan (26, 29 oct., 11, 14 nov). Durée du spectacle : 2h40 avec 30 min d’entracte.
visuel : Sebastien Marthe / Onp

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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