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Le poétique “Sur le chemin d’Antigone” de Philippe Car

Le poétique “Sur le chemin d’Antigone” de Philippe Car

24 January 2014 | PAR Amelie Blaustein Niddam

L’Agence de voyages imaginaires semble s’être installée durablement à Paris. Elle a posé ses caravanes dans le bijou métallique qu’est le Théâtre 13 Seine pour trois spectacles. En ce moment, il faut s’empresser de tracer sa propre route Sur le chemin d’Antigone, à voir dès 10 ans.

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©Elian Bachini
©Elian Bachini

Après Le Bourgeois Gentilhomme créé au Japon avant Le Cid né en Espagne et au Maroc, le Théâtre 13 Seine nous invite au Burkina Fasso où cette Antigone est née. Le voyage est long et il nous amène vingt-cinq siècles plus tôt, au moment où Sophocle a pensé ce mythe fondateur.

“Savoir dire non, savoir tenir bon”, telle est la devise que la conteuse répète sans relâche pendant l’entrée, sous les airs sombres de deux accordéonistes, du public. Les trois personnages ont l’allure de clowns graves. Le visage peint en blanc et les yeux très ourlés de noir.  Elles vont jouer tous les protagonistes de la pièce. Créon ( frère de Jocaste), Ismène et Antignone, filles d’Oedipe, et Hémon, le fils de Créon, cousin et fiancé d’Antigone.

La compagnie s’amuse à relire l’histoire sans la galvauder. Ici, nous sommes dans un acte sensible proche du cirque, où les inventions sont nombreuses et poétiques dans le pur esprit  du théâtre de troupe. Un lit devient trône majestueux, puis prison minuscule. Un drap de velours sera un monumental manteau.La féerie prend le pas sur le texte pour nous faire danser une ronde ne nous enfermant pas dans la tragédie.

Faire rire avec Antigone ? Ce tour de force est ici possible, quand, entre les scènes, la talentueuse Valerie Bournet quitte la voix de petite fille d’Antigone, les grosses lunettes de Créon pour être le chœur qui décrypte et soulage. Le choix du merveilleux et de la douceur pour raconter l’histoire de cette famille maudite par l’inceste opère comme dans une histoire pour enfants, aux mots horribles mais que l’on lit d’une douce voix. On sait dès le début qu’Antigone va mourir pour avoir osé désobéir à son oncle et contre son ordre avoir réalisé l’affront d’enterrer dignement son frère Polynice.

Il y a une idée à la seconde dans ce spectacle qui s’amuse avec bon gout à confondre le mot et la chose dans de belles trouvailles comme celle qui fait perdre (vraiment) la tête à Hémon, l’amoureux transi et quitté. C’est dans le bleu nuageux du ciel qui occupe tout le plateau, de la scène au mur du lointain que l’histoire de celle qui est morte pour ses idées prend une hauteur didactique et accessible.

Les trois clowns-mimes-comédiennes-musiciennes sont irréprochables et limpides dans leur proposition sensible qui rend le malheur plus léger. Elles nous emportent sur ce chemin dont on doit sortir grandi.

Visuel : ©Elian Bachini

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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