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We love arabs, chef d’oeuvre d’humilité

We love arabs, chef d’oeuvre d’humilité

23 November 2016 | PAR Araso

Le festival Temps Danse Théâtre se poursuit au Monfort. L’occasion de revoir des pièces au propos infiniment humain et intelligent auquel il est difficile de ne pas souscrire. Dans une programmation soignée comme on les aime, on retrouve les sublimes «Finir en Beauté» et «Moi Corinne Dadat» de Mohamed El Khatib. Ils sont en bonne compagnie avec le chef d’oeuvre «We love arabs» de Hillel Kogan, auréolé d’un succès autant critique que public au dernier Off d’Avignon. Hilarant, sensible et beau à se damner. 

[rating=5]

La salle est pleine à craquer. On connaît le propos: un chorégraphe israélien invite un danseur arabe  pour un duo improbable. Ca sent la discussion politique sur fond d’actualité bouillante et ne présage rien qui puisse faire bouger les zygomatiques. Pas même un petit peu. Un nombre surprenant de parents y ont emmené leurs tous petits. Une erreur de casting? Un malentendu? Après tout la pièce ne dure que 45 minutes, le risque est donc limité.

Ce qui suit contredit toutes les attentes. Vierge d’a prioris et d’une quelconque familiarité avec les critiques, on en profite encore plus. Hillel Kogan est un personnage, parfait dans le rôle du chorégraphe perché au ton légèrement pincé et faussement précieux. Il sent que l’espace lui résiste, il «comprend qu’il appartient à un arabe.» Un remous prévisible parcours la salle. Qui est cet individu qui ose mettre les pieds dans le plat avec un sujet pareil? Est-il fou? Est-il suicidaire? Ni l’un ni l’autre. Il est redoutablement intelligent.

Il est rejoint par Mourad Bouayad qui remplace Adi Boutrous, le danseur avec qui la pièce a été initialement créée. A l’opposé de son partenaire, Mourad oppose une musculature sèche, nerveuse, un verbe court et caustique. Le contraste est en soi une réussite. Dans son dialogue avec Mourad, Hillel Kogan va pousser jusqu’au paroxysme les ridicules et les préjugés, usant de la caricature sans jamais se positionner en moralisateur ni en donneur de leçons. Il nous met face à l’absurdité de la posture, questionne sans jamais donner la réponse. Le résultat est aussi hilarant que fragile, une prouesse rhétorique et esthétique.

Les deux s’apprivoisent dans un ballet qui n’aurait jamais dû avoir lieu, qui est pourtant si proche de la réalité. Armés respectivement d’un couteau et d’une fourchette, unis par un masque tribal à base de houmous, érigé en symbole suprême d’Israël, leurs corps dansent une partition à mourir de beauté, bijou d’intelligence, de sensibilité et de finesse. On en ressort sinon grandis au moins déridés une bonne foi(s) pour toute.

«We love arabs» de Hillel Kogan avec Mourad Bouayad a été présenté au Monfort dans le cadre du festival Temps Danse Théâtre les 18 et 19 Novembre 2016. Le festival continue jusqu’au 26 Novembre. 

Visuel © DR

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