“Singspiele” Les mille visages de Maguy Marin
Le Centre Pompidou donne à revoir le chef d’oeuvre qu’est Singspiele, un spectacle inclassable, qui ne se range pas, ni en théâtre, ni en danse, ni en performance, ni en théâtre d’objet et qui offre une réflexion folle sur l’image que l’on donne de soi.
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David Mambouch est prostré, le long d’une palissade peu accueillante sur laquelle, trois patères supportent des vêtements. On le sait, la chorégraphe Maguy Marin voit dans la mode et le costume un geste très intime. C’était le cas dans ses précédents spectacles, tels que Umwelt, Turba ou Faces. Ici, elle efface le visage du danseur qui porte un masque. Mais quel masque ! A la façon d’un flip-book figuratif, il devient homme, femme, vieux, jeune, statue, enfant, connu ou inconnu.
Maguy Marin nous donne à voir une drôle de déambulation horizontale où, en une fraction de seconde, le danseur devient celui qu’il représente. Une tête plus haute et, il est une dame du monde, le corps en avant, il devient une star de la télévision. Au sol, le corps glissant, il est un mendiant.
Elle met ici en scène l’idée que de la condition sociale découle une posture. On le sait. Mais le voir, et le voir se décupler quasiment à l’infini, dans un geste performatif d’une exigence démente, cela se charge d’une force artistique et émotionnelle folle.
Il devient à chaque fois un autre, unique. Il y a cette magie qui se niche dans le détail qui voit des gestes infiniment petits nous faire passer d’un monde à un autre. Avoir l’air de….Avoir le costume de l’emploi. Marin nous montre le chemin des grandes illusions.
C’est à voir, il reste de la place, jusqu’au 23 janvier à Beaubourg.
Visuel : ©Rouaud