Danse
La Fiesta punk d’Israël Galvàn bordélise la Cour d’Honneur du Festival d’Avignon

La Fiesta punk d’Israël Galvàn bordélise la Cour d’Honneur du Festival d’Avignon

17 July 2017 | PAR Amelie Blaustein Niddam

On pensait ne pas se remettre si rapidement du glacé et tourbillonnant Ibsen Huis, vu la veille dans la cour du Lycée Saint Joseph. On ne pensait pas non plus qu’Israël Galvàn, connu des services depuis longtemps puisse faire une pièce explosive où on le retrouve à son meilleur niveau de danse. C’est génial, c’est dément,  La Fiesta divise la Cour, entre huées et bravos. Jubilatoire.

Le plateau est défini par des lignes de chaises. Normal pour un spectacle de Flamenco. Il y a des tables comme des plateformes ici et là. Bientôt des apparitions. La massive Uchi qui incarne le compàs et toute l’Espagne donne le ton de cette fête anti-mondaine, qui se déroule forcement dans la rue du quartier, mais quel quartier ? On va voir danser, chanter et jouer cette troupe qui fusionne les univers de Fellini et Almodovar. Uchi donc, mais également Eloísa Cantón, Emilio Caracafé, Israel Galván, El Junco, Ramón Martínez, Niño de Elche, Minako Seki, Alia Sellami vont incarner une cacophonie démente, celle des nuits où l’on dort pas, celle où les fêtes s’enchaînent et s’enchevêtrent.

Galvan arrive à genoux, rampant sur scène avant de danser allongé le flamenco. C’est délirant. Il rappelle là qu’il s’est blessé en février 2016, il n’y a pas si longtemps, et que même avec les genoux explosés, il continuerait de marquer le rythme.

Taper sur tout, tout le temps. Même sur le mur de la cour dans ce qui est peut-être le geste le plus fort de cette Fiesta incroyable. Taper sur tout et mélanger ce qui ne doit pas l’être : les chœurs byzantins incarnés par l’Ensemble Polytropon, une ligne de gars aux allures de gardes du corps postés au premier rang dans le public et un flow de rap… par exemple.

On ne sait pas où regarder, nous sommes des enfants plongés dans des questionnements de grands. Fiesta est une arène où tous sont des taureaux. Il y a Niño de Elche qui cherche les sons, Alia Sellami qui chante “Dido’s Lament” de Purcell à genoux, prise dans le brouhaha des mains qui tapent le flamenco, des pieds qui tapent aussi, sur des supports sonorisés qui décuplent les sensations de vibration. Il y a Galvàn qui fait glisser ses talons sur le métal dans un bruit d’horloge. Il y a la belle Eloísa Cantón qui joue du violon cassé dans une robe rouge à la fermeture éclair descendue. Il y a des explosions de pièces d’or dans une lumière blanche, il y a l’ombre de Galvàn qui est portée sur le mur et qui vrille.

En 2007,  Israël Galvàn dansait dans des cercueils pour La Edad de Oro à Boulbon. On ne sera pas étonnés alors de le retrouver enragé, hurlant sa danse pour arriver à un but, réunir la famille en cercle autour de lui pour garder intacte l’énergie comme un feu vital qui ne doit pas s’éteindre.

Il n’y a rien de lyrique ici, rien d’explicatif, rien qui ne peut ressembler à une histoire. C’est une bombe qui explose en faisant des dégâts dans la Cour d’Honneur. Galvàn interpelle, choque, dérange. C’est la plus belle nouvelle du Festival d’Avignon.

Visuel : (c) Aleksandra Kononchenko

 

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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