Et Carolyn Carslon entra au Panthéon
Le 19 septembre est la journée de commémoration des victimes de terrorisme de l’année en cours. Drôle de symbole et d’écho pour la clôture de Monuments en Mouvement. Le matin, aux Invalides, François Hollande affirmait la nécessité de “demeurer ensemble”, le soir, avec à ses pieds Les grands hommes, Carolyn Carlson a dansé The Black River, une oeuvre en résonance avec les grands deuils de l’histoire.
Carolyn Carslon nous le confiait récemment en interview : “Seule la renommée demeure. Quand vous voyez tous ces grands hommes dans la crypte et que vous pensez que malgré leur immense célébrité, ils n’étaient que de passage. Je pense que c’est fantastique de pouvoir danser dans un tel lieu. Moi aussi, je ne suis que de passage. Il n’y a rien de sinistre là-dedans. Il y a 25 ans, j’avais un appartement avec de très grandes fenêtres qui donnait sur le Père Lachaise, cela rendait fou mes amis. Moi j’entendais les esprits. Cela fait partie de la vie.”
La chorégraphe américaine n’est donc en aucun cas impressionnée quand elle pénètre dans temple laïque. Vêtue de blanc, prés de la statue ailée dédiée aux soldats elle incarne les quatorze stations de la chapelle entièrement peinte de Scrovegni à Padoue. Elle est spectrale et sculpturale, infiniment longue. La musique de Gavin Bryars, relecture contemporaine d’une composition qui aurait pu être baroque, accompagne pleinement le geste qui apparaît comme une marche quasiment immobile. L’américaine aujourd’hui âgée de 73 ans offre une danse centrée sur le haut du corps où les bras, le buste et visage sont d’une expressivité saisissante. Cette marche là passe par toutes les étapes, de la douceur à la douleur, les cris sont étouffés, le visage se pare de cordelettes.
Ce bref solo de 25 minutes est d’une intensité parfaite pour clore Monuments en Mouvement dans ce lieu et ce contexte particulier.
Visuel :
©Baptiste Evrard