Danse
Angelin Preljocaj peint sa Fresque au Grand Théâtre de Provence

Angelin Preljocaj peint sa Fresque au Grand Théâtre de Provence

24 September 2016 | PAR Camille Bardin

Grand habitué de l’exploration des contes, Angelin Preljocaj revient cette année avec La Fresque, une adaptation inédite pour ballet du traditionnel conte chinois La peinture sur le mur. Il sera jusque samedi prochain au Grand Théâtre de Provence de Aix en Provence puis parcourra la France avec ses dix danseurs.

La peinture sur le mur est un conte fantastique chinois qui plonge le lecteur dans l’exploration des mystères picturaux. Fort d’un pouvoir surnaturel et d’évocations symboliques, ce conte retrace l’histoire de deux voyageurs qui se réfugient dans un temple, un jour de mauvais temps. Au sein de celui-ci ils découvrent une fresque, où plusieurs jeunes femmes jouent dans un champ de pins parasols. Frappé d’amour pour une des jeunes femmes, le premier voyageur rentre par magie dans la fresque et épouse la dessinée. Forcé de quitter le tableau, le visiteur y laisse sa bien-aimée. Mais ce passage a transformé la toile… La jeune femme aux cheveux longs est désormais coiffée d’un chignon, coiffure caractéristique des femmes mariées chinoises.

La chevelure comme symbole de la féminité

C’est cette notion de chevelure qui va servir de fil rouge à Angelin Preljocaj. Il ne va donc pas hésiter à solliciter les longs cheveux de ses danseuses pour en faire un véritable accessoire. Ainsi le chorégraphe respecte en tous points les thèmes abordés et développe avec justesse et lyrisme la métaphore capillaire qui entoure cette fable. Animé par de formidables idées, Angelin Preljocaj propose même des acrobaties circassiennes, où les danseurs s’échappent de la scène en agrippant les longues chevelures de leur partenaire, stupéfiant.

En duo comme un quintet, la délicatesse des danseurs est à couper le souffle. La mise en scène est rythmée. Le chorégraphe réussit avec génie le mariage entre les pas et les nombreux statismes, évocation évidente à la fresque aux jeunes femmes. Terriblement sensuel, le couple que forme Yurié Tsugawa et Jean-Charles Jousni, nous porte pendant toute la durée du ballet dans leur boudoir amoureux. Plus inattendu, le dixtuor masqué, qui pourrait dénoté avec le reste de la pièce créer un contraste encore inédit dans ce ballet très lisse. Angelin Prejlocaj reprend alors les codes des sauts saccadés et corps cassés d’Igor Stravinsky en les associant à la reprise electro-pop d’une fugue de Bach par Nicolas Godin.

La scénographie envoûtante de Constance Guisset

Et dés le début, la magie opère. Alors que les danseurs n’ont pas bougé d’un pouce, la scène est magnétique. Sur une fine toile qui nous sépare des planches, sont projetées des vidéos de cheveux qui flottent dans l’eau. Comme les nuages de fumées de cigares dans les vieux bars de La Havane, ils ondulent dans l’espace. L’ambiance est envoûtante. Avec cette fine pellicule qui devient un support de projection d’images, Constance Guisset invente une nouvelle scénographie, qui sépare les danseurs du public. Sans pour autant les exclurent. Une idée originale qui parfait la métaphore du tableau portée par la chorégraphie d’Angelin Prejlocaj.

Après avoir fait dialoguer danse et texte, Angelin Prejlocaj dresse les liens entre le virtuel et le réel et nous fait basculer dans une autre dimension. Une dimension poétique, accessible aux plus petits, que l’on a du mal à quitter à la fin du ballet.

Visuel: © JC Carbonne et Studio Constance Guisset

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Camille Bardin

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