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ROCK EN SEINE 2017: JOUR 3 [LIVE REPORT]

ROCK EN SEINE 2017: JOUR 3 [LIVE REPORT]

28 August 2017 | PAR Gaspard de Florival

C’est le troisième et dernier jour du festival francilien. Les jambes sont lourdes, les oreilles fatiguées mais pas le temps de niaiser comme on dit. Il y a du beau monde à écouter cet après-midi. Au programme: la polonaise Brodka, Roméo Elvis x Le Motel, le copain Mac Demarco et les prodiges de Lemon Twigs.

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Il fait chaud, très chaud à Paris pour ce dernier jour de festival. Les points d’eau et les bars sont pris d’assaut. Tout est bon pour retrouver un peu de fraicheur. C’est chose faite avec la première artiste de la journée, la polonaise Brodka. Installée sur la petite scène Firestone, celle qui est une star dans son pays après avoir remporté un télé-crochet nous présente son premier album en anglais Clashes, une petite pépite de rock/ folk. C’est dans une robe rouge et noir et avec les cheveux rasés pour l’occasion que Brodka transporte la centaine de spectateurs vers sa musique torturée aux sombres accents organiques et parfois christiques. Brodka ne doit pas faire plus d’1m65 mais elle occupe l’espace grâce à sa magnifique et puissante voix. Elle maîtrise parfaitement son sujet. Les mélodies sont sombres, le clavier NORD de sa musicienne se charge de colorer le tout d’une ambiance planante, parfois inquiétante. Côté morceaux, Horses et My name is youth sortent du lot. Le public a aussi le droit à une chanson en polonais ce qui ravie une spectatrice. Le concert se termine par un quart d’heure très rock, dans un bourdonnement de saturation et de disto, les structures des titres rappelant parfois celles des Clash. On en redemande. C’était le premier concert de Brodka à Paris, sûrement pas le dernier, le potentiel est énorme.

Direction la scène du bosquet pour écouter le live de Roméo Elvis, ovni de cette nouvelle génération de rappeurs que rien n’arrête. Le belge est entouré du beatmaker Le Motel et de Swing du collectif L’Or du Commun en backeur. A voir l’excitation d’avant concert, on se rend compte que la fan base française est déjà très importante. A peine monté sur scène que le rappeur prévient : c’est son troisième concert en trois jours. Même s’il semble émoussé entre les morceaux, ce rythme de tournée ne l’empêche pas de faire le boulot, et bien. Et puis la foule, principalement composée de jeunes, qui connait les lyrics sur le bout des doigts, l’aide en l’accompagnant sur l’ensemble des titres. Ce sont donc comme des classiques que Sabena, Drôle de Question ou encore Bébé Aime la Drogue sont joués cet après-midi. La chaleur étouffante n’empêche pas une partie du public de faire un pogo. L’autre s’évente comme elle peut. On le sait, le rap en festival, c’est souvent quitte ou double mais ce dimanche la belle et singulière voix rauque de Roméo Elvis a fait le job et le rappeur convainc qu’il est légitime pour jouer dans la cour des grands.

Pas question de s’arrêter en chemin et ce même s’il faut traverser tout le domaine jusqu’à la grande scène pour voir le prochain concert. On ne loupe pas Mac Demarco. Venu présenter son nouvel album, This Old Dog, plus calme et sage que les précédents, Mac Demarco, fidèle à lui-même, livre une performance une nouvelle fois mémorable. Sur la scène sont installées des tables et des chaises, comme au bistrot, pour les chanceux qui ont la possibilité de déguster le concert avec un verre de vin rouge. C’est la première fois que l’on voit ça! On était en droit de se demander si la grande scène n’était pas justement trop grande pour le canadien, de se questionner sur le fait que sa musique, plutôt familiale, était davantage magnifiée sur une scène plus intimiste. C’eut été oublier que Mac est avant tout un showman qui, même s’il ne perd jamais son second degré, délivre sa musique de la plus belle des manières. Niveau setlist, on a le droit à des morceaux des différents albums. Le sublime One More Love Song, entre autres, pour le nouvel opus et des tubes plus anciens comme Viceroy et Salad Days que la foule, dense en cette fin de journée, connait par coeur. On a même le droit à une reprise onirique de A Thousand Miles, la chanson un peu bébête de Vanessa Carlton. Côté scène, Mac est, on le sait, un sacré boute-en-train. C’est en sirotant son whisky, la clope au bec que le musicien invite des personnes du public à pousser la chansonnette avec lui sur scène. Ces derniers rejoindront ensuite le fameux bistrot, le plus naturellement du monde. C’est comme ça dans le monde de Mac, les gens rigolent, dansent et sont tout simplement heureux d’être là. En ce sens, il semble que le mot cool ait été inventé pour lui. Reviens vite l’ami.

On termine cette quinzième et belle édition du festival par le live des petits américains de Lemon Twigs qui, grâce à un album intitulé Do Hollywood, ont déjà conquis la planète rock. Il était donc intéressant de voir comment ce groupe, qui a à peine 20 ans de moyenne d’âge, se débrouillait en live. Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’on a pas été déçu. Arrivés tout droit des années 60, de par leurs accoutrements fluos et leur musique pop baroque rappelant ainsi les Beatles ou les Kinks, les Lemon Twigs impressionnent par leur maturité. Ne nous méprenons pas, ils ne sont pas anachroniques pour un sous car ils offrent un bonbon sucré de belles mélodies universelles et intemporelles. Il faut dire que les uns sont tous plus doués que les autres. Les frères D’Addario s’échangent guitares, batterie et synthés, le tout avec une facilité déconcertante. Danny Ayala, le pianiste virtuose, colore de sonorités jazzy l’univers du groupe et la bassiste Megan Zeankowski (que l’on oublierait presque) donne des bases solides à l’ensemble. Et les voix, que dire des voix? Elles sont bluffantes. Les D’Addario et Danny ont des voix très complémentaires. Que ce soit sur I Wanna Prove To You ou These Words, on se croirait revenu au temps de Pet Sounds ou Revolver. Sur scène, les deux frangins sont déchainés mais donnent le sentiment d’un contrôle total à tel point que l’on pourrait croire que cela fait quarante ans qu’ils tournent ensemble. Le concert touche à sa fin et le groupe entame As Long As We’re Together comme si eux non plus ne voulaient pas que la musique s’arrête. Le superbe show des Lemon Twigs clôt de la plus belle des manières ces 3 jours de live report. On retrouvera le groupe en septembre pour la sortie d’un nouvel EP. On a déjà hâte.

© visuel: image officielle

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Gaspard de Florival

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