Pop / Rock
[Live report] Savages à La Maroquinerie

[Live report] Savages à La Maroquinerie

02 December 2015 | PAR Bastien Stisi

Hier soir à La Maroquinerie, au moment d’interpréter le grand tube « Shut Up », et c’est amusant de l’exprimer à ce moment-là, Jehnny Beth admet qu’elle s’est récemment « cassée la voix », s’excusant presque d’avance du calvaire qu’elle va devoir faire subir en conséquence à son auditoire déjà complètement dedans. Au lendemain d’un live absolument époustouflant, on se demande encore pourtant ce que cela aurait été, si la chanteuse du groupe de filles le plus couillu d’Angleterre avait été en pleine possession de ses moyens…

Car ce live-là, et à l’image de celui que Savages avait déjà donné à La Route du Rock cet été, restera indéniablement comme l’un des plus marquants de l’année. Parce que celui-ci n’aura pas laissé une seule seconde de répit à un public en nage dans la fosse et en extase un peu plus haut, et bien qu’une grande partie des morceaux interprétés hier soient encore parfaitement inconnus aux oreilles de la plupart (Adore Life, le 2nd album du quatuor, ne sort qu’en janvier).

Parce que Jehnny Beth, surtout, aura été très grande. Et ce sera ce soir, sacré bonus, exprimée quasiment autant en Français qu’en Anglais (oui, parce que les plus fidèles le savent : Jehnny la Londonienne s’appelle en réalité Camille, et est née à Angoulême). Et si les détracteurs continueront à détracter (sa manière de prendre constamment la pose pour  les photographes, diront-ils, renvoie tout de même souvent à l’idée de « posture »), les adorateurs, eux, risquent bien de continuer à l’adorer. Ceux-là noteront son magnétisme et son charisme toujours bluffant, sa manière de gesticuler et d’applaudir son groupe à chaque intervalle, et surtout hier soir, sa capacité à enfiler, par sa gestuelle harangueuse et les lyrics de ce second album aux titres évocateurs (« Evil », « The Answer », « Sad Person »…)  ce costume de prêcheuse punk qui la rapproche, et n’ayons pas peur des filiations pompeuses, autant de l’ex Sonic Youth Kim Gordon (le côté « noise noir ») que de Patti Smith (le côté « poétesse punk »).

Jehnny grande par le talent, et par la taille, aussi. Mais cette prouesse-là, c’est aussi le public qui aura contribué à l’accomplir. Élevée par la foule, au point de pouvoir déplacer elle-même les lumières (le plafond de La Maroquinerie n’est pas haut, mais tout de même), il lui permettra de s’imposer comme l’astre noir absolu de cette release avant l’heure.

Et puis, quelques instants plus tard, les acclamations émises à l’égard des acteurs d’aujourd’hui (qui sont en l’occurrence quatre formidables actrices) le seront à l’égard des acteurs d’hier. Car Jehnny vient d’expliquer qu’il y a quelques mois, en studio, elle avait participé à Los Angeles à l’enregistrement du « I Love You All The Time » d’Eagles Of Death Metal, auxquels elle avait donné quelques petits conseils sur les quelques mots en Français que le groupe souhaitait intégrer au morceau. Une longue, très longue ovation, bien sûr, accompagne ses mots. Il circule alors dans l’air une certaine dose d’émotion que chacun pourra aisément imaginer…

L’hommage est somptueux, la reprise efficace, et dernier acte symbolique d’un live qui n’en aura décidément pas manqué, c’est « Adore » qui y succède, et ses lyrics d’une simplicité absolument essentielle en ces instants. « Adore life », gémira-t-elle ainsi souvent. Soit la synthétisation de tout ce que l’on aura vu ce soir. Et de tout ce qu’il faudra s’appliquer à retenir, afin d’aborder demain.

Visuel : (c) Robert Gil

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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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