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[Live report] Les Black Strobe à la Boule Noire : disco-rock viril et animal

[Live report] Les Black Strobe à la Boule Noire : disco-rock viril et animal

07 March 2013 | PAR Bastien Stisi

En marge de la préparation d’un second album, qui viendra compléter courant 2013 les morceaux de l’EP The Girl From The Bayou sorti en février, Arnaud Rebotini et les Black Strobe répétaient hier soir leurs gammes à la Boule Noire dans une salle archi-comble, orchestrateurs d’un voyage rock et électro hybride sur les rives d’un Mississippi à facettes et d’une discographie vieille de quinze années…

Si son nom est constamment associé ces derniers mois à celui du petit prince émergeant de la scène techno française Yan Wagner, dont il a produit et arrangé le premier album, c’est une autre des productions de Rebotini, les talentueux Kill for Total Peace, qui effectuent la première partie du concert, eux que l’on a également vu associés au parrain technoïde Rebotini (et au dj Turzi) à l’occasion du projet Code Napoléon. Synthés graves à la Kraftwerk, voix aérienne et dézinguée, guitare indisciplinée, boucles tortueuses rappelant les morceaux les plus déglingués des Animal Collective, psychédélisme tendu et grave citant dans ses grandes largeurs les Velvet ou les Sonic Youth, le duo déblatère sa désinvolture frondeuse une large demi-heure durant, le temps d’étaler aux yeux de la Boule Noire le talent brute dont les deux artistes se font les porteurs, et de laisser la place au show viril d’Arnaud Rebotini et de sa bande.

Sur une scène habillée par une brume factice et par des néons blanchis et scintillants qui donnent à la salle des allures de temple disco sous acide, la large et imposante silhouette d’Arnaud Rebotini se dessine partiellement, avant de s’imposer pleinement aux yeux de la Boule Noire sous un tonnerre d’applaudissements. Moustache épaisse et saillante, cheveux en arrière, costard deux pièces, chemise largement ouverte laissant ressortir une épaisse pilosité et une chaîne brillante, Rebotini balance virilement son allure de crooner des années 50 sur la scène en même temps que les notes discos et animales de « The Girl From The Bayou », titre phare de son dernier EP en date. Le public bombe le torse plus qu’il ne se trémousse, transpire de sueur et de testostérone, et profite d’un jeu de lumière mouvant, fuyant et particulièrement niché, qui ne s’arrête jamais bien longtemps sur le visage du chanteur afin de renforcer l’atmosphère d’étrangeté électronique et rockeuse qui entoure le quatuor.

Électro hybride et vénéneuse indifférente au temps et aux saisons, sonorités discos fondues dans une épaisse dose d’acide (« Chemical Sweet Girl »), beats technos confondus avec des riffs guitareux flirtant nettement avec le hard rock (« Shining Bright Star »), blues cradingue et vicelard au chromosome Y, le show rustique et élégant de Rebotini et des Black Strobe atteint un apogée techno admirable sous le longiligne « Italian Fireflies », qui transporte la Boule Noire dix années en arrière, et rappelle à la salle que le groupe n’a pas besoin de la lourdeur des guitares pour balancer leur monde et le transporter dans une frénésie transcendante et véritable.

Rebotini n’a sans doute pas échauffé sa voix avant le concert en ingurgitant un piment bien épicé, à la manière des chanteurs rustiques de la Nouvelle-Orléans dont il revendique les influences. Au lieu de ça, c’est une kyrielle de pintes de bières (un peu de vodka, aussi) qui viendront rafraîchir le gosier du polyvalent Rebotini, plus sexué que jamais, qui lorsqu’il ne porte pas le micro sous son épaisse moustache, fait rugir énergiquement les notes de son synthé ou même d’un harmonica que l’on imagine tout droit issu des contrées moites et fertiles de la Nouvelle-Orléans.

Enfin, après un rappel fructueux et une agression constante des tympans sifflotant des visiteurs, les guitares baroudeuses et alourdies de « I’m a Man » et la prose macho et séductrice de Rebotini, dernièrement entendu au sein de la bande originale du Django Unchained de Tarantino, résonnent dans l’éther étouffant et survolté de la Boule Noire, frénésie terminale d’une efficacité redoutable que les Black Strobe semblent ne jamais devoir interrompre. La veste de Rebotini est tombée, la chemise est largement déboutonnée, la foule laisse éclater une acclamation grandiose et sincère venant valider une performance de très haute volée. La Boule Noire, elle, éponge encore la sueur sexuée répandue dans son antre hier soir durant l’intégralité du concert…

Visuels © : Louise Vendel

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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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