Pop / Rock
[Live report] Fidlar, Fat White Family, Savages & Jagwar Ma à La Route du Rock

[Live report] Fidlar, Fat White Family, Savages & Jagwar Ma à La Route du Rock

15 August 2016 | PAR Bastien Stisi

 Quatrième et dernier soir hier pour La Route du Rock, qui clôturait une édition bien compliquée en terme de fréquentation (15 000 billets vendus, loin du record de 27 000) mais pas cette fois en terme de logistique globale (ni météorologique, mais ça, personne n’y peut grand-chose), avec une soirée qui proposait un large tour d’horizon de ce qu’implique le terme de « punk » en 2016.

Fidlar, Fat White Family : punk bordel

Punk d’abord, avec les Californiens fous furieux de Fidlar (Fuck It Dog Life’s A Risk), qui après le passage très convainquant des Lush sur la Scène du Fort – dans la série des groupes cultes noisy pop britannique qui, après My Bloody Valentine, Slowdive et Ride viennent chaque année à La Route du Rock re-pointer le bout de leurs guitares – viennent se faire à 22h les porte-étendards en short d’un skate-punk tapageur, insolent, soiffard et post-adolescent, ces gamins qui reprennent le « Sabotage » des Beastie Boys en introduction de leur live et que l’on a déjà vu, autre extrémité de la courbe punk, reprendre le « Dammit » de Blink-182 (et aussi les Ramones mais ça, bon, la référence est bien marquée). « Punks », « West Coast », « Cheap Beer » et l’hymne « Why Generation », au moins aussi nihiliste que celui des Who, afin de présenter les deux albums d’un groupe déjà référence en matière de punk sauvageon à la diction gueuleuse. Slame, pogos bien organisés, des bières qui se cognent, et un bon gros bordel sur la Scène des Remparts.

Plus brute, plus décousu, plus malade aussi, le punk psychédélique des Fat White Family que l’on fait s’enchaîner sur la Scène du Fort dans la foulée, qui débutent avec « Whitest Boy on the Beach », le furieux morceau introducteur de leur second et dernier album en date (Songs for Our Mothers) qui fait déjà tomber, au moins aussi vite que d’habitude, la chemise de Lias Saoudi, chanteur et leader de cette famille un brin dégénérée. Plus tard, on le verra jeté dans la fosse, le verbe fort et le regard habité, au service d’un live malheureusement une nouvelle fois un peu frustrant et pas totalement abouti. Parce que même avec cette famille-là, parfois, on s’ennuie aux repas de famille.

Savages, Sleaford Mods : punk rebelle

Plus politique, plus engagé, plus révolté (c’est même son fond de pensée premier, et le thème revendiqué d’Adore Life, leur second album sorti cette année) le punk de Savages, évidemment mené par l’hypnotique Jehnny Beth qui sortira une nouvelle fois un live abrasif, hautain et particulièrement lyrique (de « Shut Up » à « Husband », de « The Answer » à « Evil »), mais qui, s’il séduira la plus large partie de cette foule qui se fracasse et se trouve une nouvelle prêtresse Riot grrrl sur « I Need Something New », lassera tout de même un brin les autres (et rien à voir avec le fait que Jehnny Beth, qui  s’appelle dans le civil Camille Berthomier en étant née à Angoulême, s’obstine à s’exprimer en Anglais entre ses morceaux…) : c’est que Savages, on les a déjà vu au même endroit l’année dernière ici même, et que deux fois en deux ans, bon, il faut croire que l’effet de surprise magistral qui avait si bien fonctionné la première fois ait du mal à se reproduire la seconde…

Mais le plus punk de tous est sans doute celui qui arrive ensuite Scène des Remparts. Plus névrotique (et avec un peu plus de tics…) que ses prédécesseurs, Jason Williamson et son acolyte qui balance les prods (ensemble, ils forment Sleaford Mods) livreront l’un des très grands lives de cette dernière journée, déversant le flow volubile, appliqué et absolument nécessaire (dans le sens : il faut qu’il le fasse, sinon ça va mal se passer…) de ce parolier au charisme certain avec une armée de « fuck off » (adressés à l’England, principalement) et un format minimaliste (prod + lyrics) qui fonctionnera à merveille. On parle de bière, de baffes et de lendemains sans grasses. Ce type-là fascine et reçoit une ovation à la hauteur de sa performance.

Jagwar Ma : la transe pour terminer

Et puis, point terminal magistral de ces quatre journées de festival – dont on placera au sommet le live de La Femme hier – la perf des Australiens de Jagwar Ma, venus remplacer The Avalanches qui avaient dû annuler il y a peu, et qui atomiseront, à 3 heures du matin, les esprits et les corps des quelques derniers festivaliers demeurés dans le coin. Quelques morceaux issus de ce nouvel album à venir (dont l’ultra-efficace « OB1 ») et bien entendu les classiques issus d’Howlin, ce disque formidablement accrocheur et addictif sorti il y a trois ans, plein de ce groove électronique, de ces rythmiques tribales et de ces mélodies désarticulées qui font follement danser et que l’on retrouvera sur « Come Save Me », sur « Uncertainly », sur « What Love », et sur l’implacable « The Throw ». Énorme transe avant de partir. À l’année prochaine.

Visuels : (c) Ybouh

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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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