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[Interview] Benjamin Francis Leftwich “J’ai une relation très viscérale avec la musique”

[Interview] Benjamin Francis Leftwich “J’ai une relation très viscérale avec la musique”

24 October 2016 | PAR Aurelien Bouron

Nous nous sommes assis avec Benjamin Francis Leftwich, le chanteur folk britannique, pour avoir une conversation sur son dernier album, sa vie, ses inspirations, ses concerts. Un artiste envoûtant, qui nous accroche avec sa voix, sa musique et ses mots. Ce lundi 24 octobre, il sera au Point Ephémère, à Paris, pour faire découvrir son dernier album “After the Rain”.

Votre nouvel album vient après un moment très difficile pour vous, la mort de votre père, l’écriture et la composition on été une thérapie pour vous?

Je pense que c’est thérapeutique, et ça aide à aller mieux, mais je ne pense pas que quelque chose comme ça peut être vraiment réparé. La musique m’aide à être en paix avec moi-même. D’ailleurs, je ne fais aucune distinction entre ma vie personnelle et ma vie musicale. Donc certains jours, la musique est votre meilleure amie, et d’autres, elle devient votre pire ennemie. J’ai une relation très viscérale avec la musique quand j’écris.

Comment la musique peut être votre pire ennemie ?

Quand j’arrive à créer quelque chose avec une certaine valeur spirituelle, je me sens bien, mais quand j’ai de la difficulté à atteindre cet objectif, je me sens mal, car j’y tiens énormément, à la musique, à l’art. Ça m’affecte, profondément.

On voit que votre monde tourne autour de la musique. Mais qu’est-ce qui a donné autant d’importance à ce domaine dans votre vie ?

En grandissant, j’écoutais les Beatles et Nina Simone, et ce sont mes premiers souvenirs musicaux quand mon père les écoutait dans notre maison. Quand on est jeune, on ne sait pas vraiment de quoi on tombe amoureux, mais c’est juste les mélodies, leurs sonorités, c’était si excitant et ça l’est toujours. J’aime juste ce que je ressens quand j’écoute de la musique et mes artistes préférés. J’apprends d’eux, je m’en inspire.

Qui sont vos musiciens préférés qui vous inspirent tant ?

Bruce Springsteen, The Beatles, Fleetwood Mac, PJ Harvey, Kanye West..

Donc même ce qui touche au Hip Hop et R&B?

Oui, j’adore, c’est très récent pour moi. J’ai commencé à aimer il y a trois ou quatre ans. J’ai grandi en écoutant beaucoup de musique acoustique, ce qui a eu une influence sur mon premier album. Alors que cet album est plus comme une vague… des hauts, des bas, de la joie, de la tristesse et un message plus clair.

Qu’est-ce qui inspiraient ces joies et ces peines dans votre album ?

C’est difficile de mettre un nom dessus, c’est très viscéral. C’est ce que j’aime à propos du hip hop d’ailleurs, il n’y a pas de filtres, dans les paroles ou dans la musique. C’est une expression très libre.

Pour écrire vous avez besoin de cette liberté, d’être dans un certain contexte ?

Il faut que je sois d’humeur adaptée, que j’ai le besoin de m’asseoir et d’écrire. Mais parfois, les premières étincelles pour une chanson viennent à un moment spécifique, puis le reste vient après, je dois donc essayer de tourner cette étincelle en chanson. Il n’y a pas vraiment de règles, il faut juste prendre la vague quand elle vient.

Vous avez une histoire derrière l’une vos chansons ?

Oui, la chanson Tilikum, la première de l’album. Le refrain est très gentil, plein d’amour, alors que les couplets sont plus agressifs. Je les vois comme un œil vers le futur.

La chanson, Some other arms est à propos de cette difficulté de laisser quelqu’un partir et d’être heureux pour cette personne. (Il se met à chanter en Anglais) « Je ne te souhaite aucun mal, si d’autres bras te rendent heureuse. »

Pour ce qui est de Tilikum, est-ce que c’est lié à l’Orque, appelé Tilikum, rendue connue par le documentaire « Blackfish » ?

Oui, j’ai regardé ce documentaire, et j’ai été très touché par la façon dont les orques étaient traitées à SeaWorld. Aux alentours de cette période, j’allais avoir un bébé qu’on allait nommer Tilikum, pour faire honneur à la force de l’orque. Cette chanson est à propos de ma relation avec la personne avec qui j’allais avoir cet enfant. Tilikum est un titre parfait, principalement car cette personne se reconnaîtrait immédiatement.

Toutes vos chansons viennent d’expériences personnelles ?

Oui bien sûr, comme j’ai dit, je ne fais aucune distinction entre ma vie personnelle et musicale. Mais les humains ont tous les mêmes sources d’inspiration, et c’est un processus intéressant. Ça commence dans la tête, avec plein d’idées, et ça ressort en une chanson de trois minutes. On passe par plusieurs étapes très différentes pour arriver à ce résultat : L’écriture de chanson, l’enregistrement en studio et la performance en concert.

Si toute vos chansons sont très personnelles, est-ce difficile parfois d’être sur scène et de partager autant de choses intimes ?

Parfois oui, mais c’est aussi une véritable leçon d’humilité d’être face à un public qui reçoit et me renvoi tellement.

C’est presque une conversation entre vous et le public ?

Exactement ! Pas seulement au niveau de la musique, mais aussi au niveau de l’énergie et l’ambiance générale. C’est non seulement une conversation, mais aussi une vraie relation.

Vous avez beaucoup de liens avec l’Australie et Sydney, une ville qui tourne beaucoup autour de la musique, c’était un lieu qui vous a inspiré ?

Le style de vie et la culture de Sydney sont incroyable, entre la musique, la vie nocturne, la mode… J’ai d’ailleurs écrit « Some other arms » quand j’étais là-bas, car je ne pouvais pas rentrer chez moi sans avoir écrit au moins un chanson là-bas ! J’ai donc crée cette chanson sous le Harbour Bridge, dans la maison de mon oncle.

Je fais aussi référence à Sydney dans « Tilikum » lorsque je dis « je suis juste de l’autre côté du Harbour Bridge »

Vous parlez beaucoup de la nature et de l’océan dans vos musiques…

Oui, les métaphores naturelles me suivent beaucoup depuis le 1er album. En grandissant dans le Yorkshire, j’étais entouré par des forêts magnifiques,  un très beau littoral, donc je pense que j’ai beaucoup été influencé par tout ça.

Vous avez publié les versions remixable de Tilikum et de Mayflies, pourquoi ?

Mon premier album a tellement été remixé, et je ne sais pas vraiment pourquoi. Mais je vois ça comme le plus grand des compliments de voir un autre artiste qui réinvente ce que je fais, pour apporter une énergie différente. Peu importe le genre de musique, si j’aime ou pas, c’est un beau compliment.

Je suis devenu ami avec Kygo… et si je passais aux festivals dans lesquels il passe, et que je jouais mes chansons à ma façon, le public serait un peu dubitatif, alors que quand c’est Kygo qui réinterprète mes chansons, c’est une grosse ambiance. Et l’inverse est vrai bien entendu, Kygo ne pourrait pas faire grand-chose à un concert de folk ! (rires)

Quand vous êtes en concert maintenant, il y a une différence par rapport à avant ?

La différence principale est que je ne suis pas sur scène drogué ou alcoolisé, alors que pour le premier album je l’étais constamment. Ce changement modifie ma perception des choses, je deviens plus authentique, et j’ai l’impression que je suis meilleur techniquement.

L’autre différence est que j’interprète des nouvelles mais aussi des anciennes chansons. Je peux donc adapter mes concerts, jouer des chansons en fonction du public. Je me concentre vraiment sur les émotions que véhicule ma musique.

Ça doit être frustrant de vouloir faire connaître vos nouvelles chansons alors que beaucoup veulent entendre les anciennes en live ?

Oui et non ! C’est vrai que j’ai très envie de partager mes nouvelles musiques, de communiquer avec le public en me servant de ce que j’ai créé récemment. Cependant, j’ai pris une grande pose de 3 ans entre mes deux tournées, donc les anciennes chansons semblent toujours nouvelles pour moi. Et il y a des gens qui découvrent ces musiques pour la première fois, c’est ce qui est beau avec le streaming ! La musique est partagée, réécoutée… Et c’est aussi une question de respect, et d’harmonie avec le public. Je veux qu’ils découvrent de nouvelles choses, mais aussi m’assurer qu’ils passent un très bon moment.

Dernière question, vous aimeriez composer une musique pour le cinéma ?

J’aimerai beaucoup ! Je suis allé à Los Angeles récemment où on a pu discuter de ça avec des studios. L’idée d’écrire quelque chose pour une création visuelle d’une autre personne est vraiment quelque chose d’excitant pour moi. Je ne suis pas simplement un amoureux de la musique, je suis un amoureux de l’art en général.
Et on a tous un souvenir d’une scène de film géniale accompagnée d’une musique parfaite. Quand le son et l’image vont ensemble, les sentiments sont amplifiés, comme la scène de fin du film « Blow » avec Johnny Depp. 

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Aurelien Bouron

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