Musique
[Live-Report] Mashrou’Leila + Bachar Mar-Khalifé à la Cigale dans le cadre du Festival d’Ile-de-France

[Live-Report] Mashrou’Leila + Bachar Mar-Khalifé à la Cigale dans le cadre du Festival d’Ile-de-France

10 October 2016 | PAR Elie Petit

Soirée sous le signe du Liban dans le cadre du Festival d’Ile-de-France. Le groupe Mashrou’Leila et Bachar Mar-Khalifé et ses musiciens ont mis le feu à une salle qui  brulait déjà d’impatience avant même le début du concert, une Cigale comble et humide.

Le Festival d’Ile-de-France, jeune cette année de ses 40 ans célébrait la musique arabe moderne avec les concerts successifs, à la Cigale, de Mashrou’Leila et Bachar Mar-Khalifé. Une soirée doublement exquise pour les amoureux de ces artistes singuliers.

Bachar Mar-Khalifé, que nous chroniquions dans sa perfomance piano solo au Grand Palais il y a quelques mois, est cette fois-ci accompagné d’un batteur, d’une sitariste et d’un bassiste. Lui oscille entre le piano et le synthé. C’est parfois doux mais c’est souvent survolté. Avec ferveur, le public reprend les titres phares du dernier album du franco-libanais.

Il hurle parfois tel un homme qui perdrait son calme et passe ensuite à une berceuse inquiétante. Les sons se superposent, le bruit est immense, les instruments sont de cordes et de bois et sonnent pourtant parfois électronique. Il déclame par moments quelques mots et son “O Seigneur accordez-moi cette dernière prière… Et laisse-nous tranquille.” fais rire l’assistance. Plus qu’il fit rire la Sûreté générale libanaise qui interdit la chanson en 2016 pour des paroles “portant atteinte à l’entité divine”. Alors le public rit et Mar-Khalifé continue.

Une grande complicité se dégage de certains passages avec le batteur. On a adoré ses réinterprétations de Lemon et Ya Nas. Parfois on ne sait pas où il nous emmène, il nous perd mais on fait confiance. C’est tout. Le public est en délire sur la fin. C’est la fin. Pour mot de conclusion et dans la même solennité que pour ses prises de paroles précédentes, il compare sa liberté et la détention de George Ibrahim Abdallah. Inattendu. Rendre hommage à un terroriste dans une salle de concert, c’est plutôt rare de nos jours. Rien ne le justifie, quelque soit la polémique sur sa durée de détention. On est refroidi.

On passe à autre chose et on attend le groupe Mashrou’Leila. Leur dernier passage en France, à la Gaité Lyrique avait fait sensation. Nous les y découvrions. La fosse est globalement restée en place. Le rideau s’ouvre, des étoiles apparaissent sur l’écran géant derrière la scène. Chacun des musiciens du groupe de pop-rock qui fait chauffer le monde arabe arrive un par un. Puis c’est évidemment au tour du charismatique Hamed Sinno, l’auteur des textes et chanteur, de rejoindre les autres.

Depuis leur dernière rencontre avec le public parisien, ils ont parcouru le monde avec leur 4ème album, sans jamais renoncer à leurs textes engagés, notamment sur l’homosexualité et la liberté. En 2016, on leur interdira de jouer à Amman, en Jordanie. Leurs fans, rebelles à la décision se mobiliseront et feront changer d’avis au gouverneur d’Amman. “Une leçon précieuse” dit le groupe, remerciant ses fans, sans pour autant se produire finalement, pour des raisons de délais trop court.

Il y a désormais de l’image avec la musique live du groupe. Des vidéos de mariées, de villes, de personnages masqués, d’hommes qui se maquillent. La nuit, beaucoup de nuits urbaines. Et la fête. Et le cuir, des chaînes. Et enfin cette femme qui revêt un voile érotisé. Des hommages à toutes les créatures nocturnes, que la conformité cache.

Le chanteur explique ses chansons, couvert par le brouahah de la foule. On comprend à chaque fois le message de révolte contre toutes les privations de liberté. On lui réclame de parler en arabe. Il continue en anglais. Il danse et déchaine la fosse. Il murmure sensuellement à l’oreille du violoniste. Il s’élève contre les concepts d’identité collective et adresse un doigt d’honneur à ceux qui définissent la masculinité. Il hurle de sa voix d’opéra.

Mashrou’Leila propose à la salle de chanter les refrains d’une chanson avec eux. Une grande réussite. Sur toute la ligne, ce soir-là, à la Cigale.

Visuels : DR

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Elie Petit
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