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[Live report] Little Dragon, London Grammar et SBTRKT au festival We Love Green

[Live report] Little Dragon, London Grammar et SBTRKT au festival We Love Green

01 June 2014 | PAR Bastien Stisi

Lancé en 2011, le festival écolo responsable We Love Green accueillait hier au Parc de Bagatelle la première journée de son édition 2014, marquée par les performances pas toujours convaincantes d’une line up étirée entre pop-folk mesurée et sets électroniques gonflés.

« Un festival ancré dans les problématiques de son temps » et dans des préoccupations écologiques soigneusement présentées : dans son format citoyen, militant, didactique et ludique, le We Love Green rappelle le Solidays, voir la Fête de l’Huma, à ceci près que les vieux cocos à bérets communistes sont remplacés ici par des hipsters à poil long et des hippies à iPhone, par des gamines aux fleurs dans les cheveux, sur les tee-shirts, dans les esprits, par une bonne humeur tout de même honnête et parfaitement ostentatoire.

Véritable place to be de ce samedi idéalement ensoleillée (pour célébrer le vert, c’est quand même plus sympa d’avoir un ciel bleu), le We Love Green propose cette année une nouveauté centrale, en doublant les scènes proposées lors des précédentes éditions, et en présentant une scène consacrée à la musique pop, rock et folk, et une autre, plus indie encore, exclusivement consacrée aux sets électroniques de Djs en furie.

Cette nouveauté, ajoutée au combat ardemment mené, justifie sans doute le prix des billets (à peu près aussi cher qu’un kilo de fraises acheté chez Naturalia…) d’un festival ou même les pop-corn sont sans OGM, mais où l’organisation pêche parfois encore un peu (des festivaliers qui attendent une heure à l’entrée à cause d’un problème dû au scan billetterie, c’est encore moyen).

Du militantisme, du vert…et aussi de la musique !

Au We Love Green, il y a donc aussi de la musique, et une line particulièrement pointue qui, après avoir présenté le set hip hop, house et schizophrène de deux gentils nounours (l’omnipotent leader de Hot Chip Joe Goddard et Ras Rundell, regroupés sous le projet The 2 Bears), accueille sur la Scène Live l’Islandais Asgeir, accompagné par trois musiciens sur scène, et constructeur d’une pop folk aérienne, suave et délicate. La performance est propre, froide et bouillonnante comme les paysages volcaniques évoqués dans le sublime In The Silence, mais le propos est sans doute trop pondéré pour espérer débuter avec efficacité un festival de cette ampleur.

Et ce n’est pas la performance complètement acoustique de l’icône pop folk Cat Power, venue réciter quelques instants plus tard les belles compositions de son album Sun, qui changera la donne. Seule face à l’immensité de la scène, la voix grave et marquée par cet accent du sud des États-Unis qui la caractérise, Chan Marshall tente de résonner dans les travées d’un festival où la plupart demeureront encore davantage préoccupés par l’avancée de leur joli bronzage que par ce qui est en train de se dérouler sous leurs yeux.

Il faudra en réalité attendre, dans les alentours de 20h, l’arrivée des Suédois de Little Dragon pour donner à cette édition 2014 de We Love Green la sensation de débuter enfin pour de vrai. La foule grossit à vue d’œil (et de barbe), les burgers bio et sans frites à 10 euros pièce ont du mal à satisfaire les estomacs des festivaliers, trois garçons et une fille (la chanteuse d’origine japonaise Yukimi Nagano) investissent un espace sur lequel interviendra pendant une heure une série de tubes irrésistibles (le nasillard « Little Man », le léger « Klapp Klapp », le délicieux « Sunshine »), pop du Nord dandy, synthétique et eighty mieux habitée que celle de leurs voisins Islandais du début de l’après-midi. Les bassins et les corps bougent enfin, on pense aux compatriotes de The Knife, on apprend que de l’autre côté du Parc, sur la scène Electronic, l’Écossais Jackmaster ne pourra finalement pas se présenter, laissant à Gerd Janson, à Dj Tennis et Luke Jenner (l’ancien chanteur de The Rapture), et surtout aux fous furieux Pedro Winter (le fondateur d’Ed Banger) et Riton le loisir de grossir leurs sets initiaux d’une demi-heure supplémentaire…

London Grammar : en live, de la pop recyclable ?

Au We Love Green, on s’en rappelle alors en se baladant un peu au sein des multiples stands didactiques proposés à l’intérieur du Bagatelle, tout est recyclable : le mobilier, la signalétique, les déchets triés avec minutie par un public concerné (enfin, plus tellement après 23 heures…) et peut-être aussi malheureusement la pop assombrie de London Grammar, tête d’affiche absolue de la journée, qui ameute les foules sur la grande scène dans les environs de 21h30.

Secondés par un quatuor de cordes (trois violons et un violoncelle) et aussi sexy sur scène qu’un Bescherelle écrit en langage anglo-saxon,  le trio britannique, emmené par sa chanteuse Hannah Reid, débute sans folie par le tube « Hey Now », et récite sans les froisser les compositions de leur très bel album If You Wait, un album qu’il conviendra définitivement d’écouter d’abord dans l’intimité du studio. Le live proposé par la grande révélation pop folk 2.0 de l’année tourne parfois à la démonstration vocale un peu veine, imposant le chant d’Hannah Reid aérien et très haut perché (et splendide, sans aucun doute) au détriment de toute communion et de toute imagination scénique. On s’ennuie un peu, on ne s’emballe même pas pour l’interprétation de la reprise sous Prozac du « Nightcall » de Kavinsky, on regrettera, surtout, que le concert n’ait pas été à la hauteur des deux derniers morceaux interprétés hier soir (les très diffusés « Wasting My Young Years » et « Metal & Dust »), enfin adaptés et gonflés pour les besoins de la scène.

La nuit tombe alors sur le We Love Green, en même temps que les masques (aztèques et tribaux) sur les visages des membres de SBTRKT (prononçons « subtract ») et de son leader Aaron Jerome, orfèvre d’un post dubstep azimut, tribal, angélique, et voluptueux, sonorités construites dans un univers autre qui crève le cœur mais fait quand même bouger les corps des plus réceptifs.  Sur scène, on a fait installer un chien géant semblable à un Cheval de Troie informe. Ajouté aux tipis clairsemés un peu partout dans Bagatelle et qui agrémentent le paysage d’une teinte éminemment païenne, la scénographie, curieuse et accrocheuse, se trouve en parfaite résonnance avec le set plein de finesses et de talents d’un groupe londonien bientôt rejoint sur scène par le délicat Sampha, venu poser sa voix d’humain aux côtés des machines, et notamment sur le merveilleux « Hold On ».

On entendra les compositions de Transitions, on miroitera encore sur un prochain album qui devrait voir le jour très bientôt, on se tournera déjà vers la programmation d’un dimanche marqué par les performances à venir de Moodoïd, d’Earl Sweatshirt, et surtout de Foals.

Une programmation à retrouver juste ici, sur le site officiel du festival We Love Green.

Visuels : © Robert Gil

[Live report] Jazz sous les Pommiers 31/05 : Brad Meldhau, Anoushka Shankar, Chassol, Jean-Pierre Como.
Debout, Super! de Gwendoline Raisson et Ella Charbon
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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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