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[Live report] Oxmo Puccino et Ibrahim Maalouf à la Philharmonie de Paris

[Live report] Oxmo Puccino et Ibrahim Maalouf à la Philharmonie de Paris

06 February 2015 | PAR Elie Petit

C’est l’histoire d’une grande puis petite, puis grande blonde, d’un trompettiste changé en chef d’orchestre et d’un slameur passé récitant. Qui se produisent dans le cadre de la programmation de la Philharmonie pour quatre grands soirs. Et qui, par toutes sortes de prodiges, réenchantent le plus connu et repris des contes d’enfants.

Comme dans toute histoire qui se respecte, chacun entre à son tour. Les soixante choristes de la Maîtrise de Radio France, les cuivres, les bois, les cordes, les premiers violons, les percussionnistes et le groupe de rock, guitare, basse, clavier et batterie. Et Alice, et le Chapelier, la Reine…

Corde à corde, tout le monde s’accorde. Les bois se mettent au la. Maalouf entre en scène dans la clameur, veste noire et cravate rouge.

Tout a commencé en 2010 quand le festival d’Ile-de-France lui a commandé une création autour du merveilleux. Il a opté pour une réécriture d’Alice Au Pays des Merveilles. Et pour la magie du verbe, il a fait appel à la plume enchantée d’Oxmo Puccino. Mais aussi à son flow et à son charisme fou. Le slameur tourne, page à page, le livret qu’il a lui-même échafaudé, à partir du conte de Lewis Carroll.

Sous les jeux de lumière et les ampoules pendues, la salle, plongée dans le noir, s’éveille. On imagine la forêt, les rencontres d’Alice et ses métamorphoses physiques. Maalouf est le chef, le chef d’orchestre, sur son estrade, devant son pupitre, sans baguette. Oxmo regarde, Oxmo lit et on sent une once, rare, de chant dans ses premiers mots.

Passé l’introduction, le premier thème « Longtemps, Doucement » laisse place à l’énergie folle de la maîtrise et de l’orchestre. « Bienvenue au pays d’Alice !!! » décoche Oxmo Puccino.

Entre musique de film, funk, soul, les compositions de Maalouf touchent juste. Oxmo est à l’aise, comme dans ses chansons, sur scène, sans sembler sourciller d’être orchestré. Et l’on repense à son expérience révolutionnaire, quand il s’était associé aux Jazzbastards, pour son projet « Lipopette Bar ».

Après la mise en bouche, Maalouf se retourne, prend l’embouchure et dégaine ses mélopées et ses arabesques, armé du son caractéristique de sa trompette fredonnante de tous ses quarts de tons.

Des allures de Pierre et le Loup, de Bobby Womack symphonique, de Morricone au milieu des courses dans les terriers et des chenilles qui fument le narguilé. Le conte se déploie devant les yeux ébahis, sur une scène qui prend toutes les couleurs d’un arc-en-ciel délirant.

Oxmo Puccino fait dans la haute couture, devance les cuivres et les chœurs, et compose rimes après rimes, d’assonances en enjambements, par son jeu de mots fabuleux, ce récit initiatique fantastique.

Maalouf, par ses gestes, construit, jetées par jetées, les décors des châteaux, des exécutions, et l’humeur changeante de la Reine, de ses cartes. Et Oxmo Puccino formule des textes extraordinaires où les hérissons sont des ballons, appuyé par la finesse des voix de la maîtrise. Moments de grâce suspendus aux lèvres, aux bouches grandes ouvertes.

Jusqu’au final éblouissant, les deux comparses, la Maîtrise de Radio France et l’orchestre du CNR de Paris ne font jamais retomber le plaisir sur les visages des spectateurs conquis.

Comme dans la métaphore d’un rêve, dans une grande métamorphose musicale. Comme dans un pays merveilleux.

Retrouvez ici notre interview d’Ibrahim Maalouf et d’Oxmo Puccino.

Visuel : (c) pochette de Alice au Pays des Merveilles d’Ibrahim Maalouf et d’Oxmo Puccino

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