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[INTERVIEW] ANNE PAULY NOUS EMBARQUE POUR LE FESTIVAL QUEER LOUD & PROUD, À LA GAÎTE LYRIQUE.

[INTERVIEW] ANNE PAULY NOUS EMBARQUE POUR LE FESTIVAL QUEER LOUD & PROUD, À LA GAÎTE LYRIQUE.

05 July 2017 | PAR Nicolas D'hervilley

Le festival LGBTQ+ qui célèbre toute la culture queer revient cette année pour une deuxième édition à la Gaité Lyrique du 6 au 9 juillet à Paris. Pour tous, c’est l’occasion parfaite pour casser les normes, redéfinir les codes avec une programmation artistique et culturelle éclectique.

C’est en plein mois de Juin, que nous avons rencontrés Anne Pauly, une des commissaires du festival Loud & Proud aux côtés de Fany Corral, et Benoît Rousseau. Attablés à une terrasse d’un café du Carreau du Temple à Paris, elle a pu répondre à quelques-unes de nos questions.

Au même titre que la première édition, l’idée fondatrice du festival est de questionner en profondeur pour mieux remettre en cause la représentation et la visibilité des minorités sexuelles et de genres dans la culture tout en redonnant la priorité à ces identités. Elle nous indique que le festival s’organise et a été conçu autour d’un point essentiel qui est de ‘’donner et offrir un espace aux artistes que nous invitons’’. Créer, dénoncer et partager via les pratiques artistiques et culturelles ce que c’est d’être queer à l’heure actuelle.

Et justement, c’est quoi être queer ? Avant même d’être utilisé comme un terme représentant une certaine fierté, il est à l’origine d’un mot américain qui signifie et qualifie la communauté LGBT de « tordu » Ce terme à ensuite évolué en insulte populaire (équivalent du « pédé » en français) le terme “queer” souhaite marquer la différence de celles et ceux qui n’entrent pas dans le moule de la société cishétérosexuelle, blanche et normée. Des concerts, des ateliers, performances, des rencontres et des projections rythmeront ce festival.

En ce qui concerne la scène musicale lors du festival, il est précisé :

“Cette année, nous sommes bien plus dans la découverte par rapport à la première édition où il fallait marquer le coup avec de têtes d’affiches.”  Cette édition regroupe des artistes aux univers plus pointus, plus marqués et expérimentaux en prenant l’exemple de MOOR MOTHER qui navigue entre un rap noir et profond, mélange de punk et de musiques afro sur fonds de racisme et de capitalisme, on nous promet une « Une expérience intense qui prône la diversité au sein de la communauté queer”

Par ailleurs, le festival Loud & Proud propose également, outre une programmation musicale novatrice et éclectique, des ateliers et des conférences incitant à une réflexion sur des sujets encore trop peu abordés dans notre société hétéro-normative actuelle. Ces réflexions représentent les enjeux économiques et sociopolitiques de la communauté queer dans son ensemble comme dans sa diversité.

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C’est avec émotion qu’Anne Pauly nous raconte les différentes projections prévues pour cette deuxième édition. Les thèmes sont divers et vont d’une large réflexion sur l’interdiction de la PMA (Procréation Médicalement Assistée) aux couples de femmes en France avec la projection en avant-première du film d’Emilie Jouvet intitulé Aria (2017) à une analyse profonde et révolutionnaire du rapport – incontestablement masculin – de notre société à la science et aux innovations avec Donna Haraway : Story Telling for Earthly Survival imaginé en 2016 par Fabrizzio Terranova. Cette année l’importance de la mémoire dans la communauté queer est de mise. En effet, les projections comptent quelques documentaires et hommages aux grands noms de l’activisme queer, notamment la projection d’une oeuvre quasiment inconnue en France, A Litany for survival : The life and work of Audre Lorde (Gay et Pakerson, 1995) retraçant la vie de la poétesse et militante noire et lesbienne du même nom.

Enfin, le Loud & Proud ne s’intéresse pas uniquement au passé mais se projette bien évidemment vers l’avenir. En effet, ce samedi sera projeté Images of Future Past, une sélection innovante de courts métrages queer, oeuvre du Collectif What’s your Flavor ?, s’attachant à penser nos lendemains à partir des images du passé.

Dans la continuité des projections, les ateliers proposés par ce festival reposent encore et toujours sur une thématique politique chère aux combats queers. L’importance de la mémoire des combats menés et des souffrances endurées restent un thème central de cette édition. En conséquence, Elisabeth Lebovici, professeure à SciencesPo Paris, historienne et critique d’art est invitée à présenter son nouvel ouvrage intitulé Ce que le Sida m’a fait, Art et Activisme à la fin du XX ème siècle. Cette conférence fait office de transmission d’un combat toujours d’actualité, d’une génération à une autre avec la participation du journaliste de Libération, Florian Bardou.

Par ailleurs, de nombreux ateliers tournés vers les enjeux présents et futurs sont également proposés. On compte ainsi sur la journée du dimanche organisé par le collectif Le Reset pour “lutter contre le cyber harcèlement” avec l’atelier Cryptoparty, pour “découvrir et jouer à des jeux vidéos” lors de l’atelier Jeux Vidéos Queers et pour découvrir le fonctionnement d’une imprimante 3D avec la création de clitoris en plastique. Face aux violences queerphobes et racistes de nos sociétés actuelles, et “puisque les images dont on nous abreuve sont très largements dystopiques, avec ce sentiment d’urgence et d’avenir sombre qui semble s’annoncer” il est important de nous repenser et nous réinventer sous le spectre positif de l’utopie. C’est en ce sens que Alice Carabédian et Claire Finch propose une conférence – intitulée Qu’à cela ne tienne – suivie d’un atelier création et invention (textes, dessins, etc) utopiques. Un atelier qui promet joie, réconfort et émancipation. Il est essentiel de comprendre à quel point la communauté queer est large et plurielle. Les combats menés par cette dernière le sont tout autant. Il faudra donc compter sur une conférence dansante intitulée Décoloniser le Dancefloor organisée par Ari de B, Eva Bouillon et Majda Cheikh sur l’importance de la vision politique des danses telles que le twerk ou le voguing. Enfin, les combats queers sont féministes, en conséquence, le collectif La Rage propose un atelier Sérigraphie Féministe durant lequel il est possible de découvrir la technique artisanale et manuelle de sérigraphie sur papier pour créer pancartes et affiches féministes, queers et vénères.

« Ici, on donne justement la voix et la possibilité à des artistes de tous milieux et de genres confondus à s’exprimer et revendiquer ces différences. On pense que le fait que tu fasses partie d’une minorité, conditionne ta vision du monde et ta façon de créer, donc programmer des artistes qui sont dans des démarches engagées, politiques et culturelles que l’on considère comme « hors-norme » permet d’ouvrir un portail. La culture queer est belle et importante de diversité, et c’est ce que l’on voulait montrer dès la première édition »

En plein mois de Pride, la programmation, belle et éclectique se veut riche de représentants de la culture queer. Elle sera portée par des artistes engagés sur les questions radicales de genres et de sexe. Les images, les textes et les performances seront forts de sens, parfois bruts et violents pour faire écho à ce monde actuel, cette société qui veut conditionner. Cette société faite d’inégalités, de racisme, d’homophobie et de transphobie.

Même si le vendredi est essentiellement consacré à la danse, et le dimanche au cinéma, les amateurs de musique seront comblés puisqu’il sera possible de voir le rappeur Mykki Blanco que l’on ne présente plus, la DJ et chanteuse de Sexy Sushi, Rebeka Warrior, en passant par le duo déjanté Easter, et les Norvégiennes totalement barrées de Smerz.

On a déjà hâte, et on retrouvera avec plaisir une scène clubbing, électro avec d’autres styles aux sonorités différentes qui feront bouger le corps et l’esprit. On y retrouvera le Parisien Kiddy Smile, grand patron de la scène queer voguing française, qui revisite avec finesse et intelligence l’esprit de la house music. « Beats infectieux, lyrics engagées et hooks somptueux : Let a bitch know ! » Et  puis Big Dipper, à mi-chemin entre un rap inflammable et sulfureux.

 Rassemblement et célébration sont les mots d’ordres de ces 4 jours intensifs.

C’est l’occasion pour toi, pour nous et pour ceux qui viendront de se sentir libre, de faire partie d’un groupe, de discuter et d’échanger à tous les niveaux.

Festival Loud & Proud, du 6 au 9 juillet à la Gaîté Lyrique à Paris. Informations et billetterie ici.

Par Nicolas D’Hervilley et Hakim Akcha

© Visuels Loud & Proud et Gaité Lyrique

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Nicolas D'hervilley

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