Musique
Festival d’Ile de France : Sandra Nkake remplit le contrat, Joy Frempong surprend

Festival d’Ile de France : Sandra Nkake remplit le contrat, Joy Frempong surprend

14 October 2012 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Pour le dernier week-end du Festival d’Ile de France, la tendance était au black girl power. Au programme notre adorée Sandra Nkake qui a déroulé la parfaite partition du si bon Nothing for Granted  et en première partie, un coup de foudre, pour le sound system venu d’ailleurs de la surprenante Joy Frempong.

Depuis 2 mois, le  Festival envahit l’Ile de France de musique avec comme ligne directrice celle de la Diaspora. Ce n’est pas un hasard si étaient réunies sur scène hier soir dans une Cigale (presque) bondée la franco-camerounaise Sandra Nkaké et la zurichoise ghanéenne Joy Frempong.  Deux chanteuses engagées, on entendra Sandra Nkaké lancer un appel au vote anti-Fn et Joy Frempong hurler contre le racisme par le biais d’une allégorie sur les cheveux frisés. Alélouia ! On nous invite à nous assumer. Beau programme.

Si Joy Frempong qui se présente sous le pseudonyme Oy séduit déjà les avertis depuis 2010, date de son premier album «First box then walk», chez Creaked Records, il n’est pas si fréquent de la croiser sur scène. Elle a une voix jazz mais s’en sépare vite pour mêler à son timbre des effets, un arsenal électro, le récit d’un conteur et un batteur vêtu du tiare et le visage entièrement voilé, accoutrement tant provocateur que spectaculaire.  Il suffit d’écouter quelques chansons pour réaliser bien vite que tout cela n’est qu’humour. Les mythes se mélangent au futur. Des histoires dont la philosophie est  «tu as quitté ta maison, ma maison est chez toi” ou “Ce ne sont pas les problèmes qui cherchent les hommes mais les hommes qui cherchent les problèmes”.  Sa musique est extra-ordinaire, totalement surprenante. Elle vient offrir du hip-hop d’un âge indéfini, de l’électro qui pourrait être berlinoise. Elle chante en anglais, en ghanéen, un peu en français. Elle est insaisissable.

Mais il est déjà temps de laisser place à la formation de Sandra Nkake. Le second étage de la Cigale s’ouvre et se remplit. Elle arrive à six comme si chanter seule était impossible, elle se cache aussi derrière des mouvements qui disent les paroles de ses chansons, majoritairement en anglais. Sandra Nkaké a peut être le plus beau timbre du moment, profond et suave mais elle lui laisse peu de fois le soin de se déployer pleinement. Ce n’est pas un hasard si son premier titre s’appelle “En équilibre”, d’ailleurs magnifique.

Sur scène, il y a son éternel Ji Drû, flutiste dantesque, prêt à tout pour bouffer la scène, elle invite notamment le crooneur Hugh Coltman, le lecteur Jules-Edouard Moustic le rappeur Mike Ladd,  le harpiste Christophe Minck à introduire les morceaux où à les ponctuer d’un poème d’Edouard Glissant comme le fera le truculent présentateur du JT de Groland.

Pendant prés de deux heures avec une énergie digne des hautes heures du funk la troupe envoie les titres de l’album, le tendre Always stay the same, le violent Like a Buffalo… De la rage, la belle dame en a et c’est fort agréable quand elle la place dans une reprise efficace de Killing in the name des Rage against the machine.

Efficace, léché, produit, c’est paradoxalement ce que l’on peut reprocher à ce beau concert. Le plus beau moment est sans doute celui où Ji Drû démonte sa flûte traversière, se mettant à faire des vocalises. On s’attend à être bluffés et le miracle ne surgit pas, la version de You’d better dance est parfaite mais ne parvient pas à surpasser la virtuosité.

A album magnifique, concert superbe. Comme dans la version CD, les titres croisent la soul, le jazz, le hip-hop. Mais il est très frustrant de voir la formation se lâcher dans le show plutôt que dans la partition. La magie vient sur un No more trouble ou elle se confronte le visage seul dans la lumière à la voix brute, un instant seulement.

Il ne faudrait pas perdre la spontanéité des premiers concerts de Push Up ou l’energie de son album  Mansadi pour ne pas emprunter la voix d’un spectacle trop précis. Laisser la place aux merveilleux musiciens !

Visuels : (c) ABN

 

 

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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