Classique
Ouverture de la saison 3 du Centre de musique de chambre de Paris

Ouverture de la saison 3 du Centre de musique de chambre de Paris

27 November 2017 | PAR La Rédaction

« Allez au concert comme au cinéma ». Voici ce qu’on lit sur la feuille de présentation générale de la saison 2017-18 du Centre de musique de chambre de Paris. Un concept innovateur qui grouille d’idées, mais fait d’une formule simple : du jeudi au samedi, chaque soirée se compose de trois moments courts — à 19h30, concert de jeunes talents d’une durée de 30 à 40 minutes ; à 20h30 « Freshly composed » pour présenter une pièce qui vient d’être composée, jouée par le compositeur (10 minutes) ; et à 21h, concert de la troupe, mis en perspective par de courtes pièces, textes et/ou projections vidéo.

Par Victoria Okada


Renouveler la perception du concert

Cela se décline en trois période, de novembre à décembre, puis de janvier à février, et enfin, en mars. Un même programme par période est présenté pendant trois semaines, neuf fois au total. À quoi s’ajoute le désormais fameux « Bach & breakfast », concert participatif un dimanche matin par période pour venir répéter et chanter en concert des cantates de Bach, ainsi que des soirées spéciales.
Tout se résume par cette phrase que l’on peut lire sur le site du Centre : « L’ambition du Centre est de renouveler la perception du concert, en transformant sa forme, en jouant sur l’accessibilité des œuvres et la proximité des interprètes, en se concentrant sur le plaisir du spectacle vivant. »

Le Quatuor Zaïde dans le quatuor de Franck
Le 23 novembre dernier, la « saison 3 » du Centre s’est ouvert à la Salle Cortot. L’ambiance est détendue, la salle est pleine de jeunes gens, certainement des amis et des connaissances de musiciens (et eux-mêmes musiciens, visiblement). Après une brève présentation par Jérôme Pernoo, directeur artistique du projet, le quatuor Zaïde interprète le Quatuor de César Franck, une très belle œuvre mais curieusement très mal connu. Les quatre jeunes femmes (Charlotte Juillard, Leslie Boulin Raulet, Sarah Chenaf et Juliette Salmona), inspirées et investies, imposent naturellement une écoute attentive chez les auditeurs, si concentrés que personne n’applaudit après une formidable performance, avec de beaux phrasés et des tensions bien dosées dans chaque mouvement… malgré la mention encadrée et en majuscule dans le programme : « APPLAUDISSEZ QUAND VOUS VOULEZ ! » suivi d’une petite explication : « La mode du XXe siècle qui consiste à ne pas applaudir entre les mouvements d’une œuvre est historiquement absurde. »
À la fin de cette première partie de la soirée, une petite collation pour ceux qui veulent, et pendant que d’autres gagnent leur place pour la deuxième partie, le jeune compositeur John Gade présente ses Trois petites pièces dans le cadre de « Freshly composed ».

« Parlez pas de Mahler ! »

On assiste ensuite au concert-spectacle « Parlez pas de Mahler ! » autour des Chants d’un compagnon errant de Gustave Mahler. On voit d’abord sur le mur de la scène se projeter des bulles de SMS (avec des bruits d’écriture et d’envoi) invitant au spectateur d’éteindre le portable, mais le message ne s’arrête pas là. Ces textos ponctués de smiley introduisent efficacement et avec humour chaque œuvre, suscitent des sourires de l’assistance, et font détendre l’atmosphère de la salle déjà bien à l’aise par rapport aux autres concerts de la musique classique. Le programme (voir ci-après), éclectique dans le style mais cohérent dans l’esprit, est assuré par dix jeunes instrumentistes et le baryton Laurent Naouri. Pour le contrepoint XIX de l’Art de la fugue de Bach (arrangé pour dix instruments), le sujet, le contre-sujet et leurs variants sont projetés sur le mur au moment exact de leur passage. Le fait de voir ces éléments se dérouler les un après les autres ou s’enchevêtrer comme un puzzle, rend la fugue plus familière, voire amusante.
On doit ensuite confronter un terrible tremblement de terre imaginé par Haydn, ici avec des instruments utilisés souvent dans la musique baroque, avant d’assister à La mort du Poète sur un poème de Lamartine (« Le poète mourant », tiré des Nouvelles méditations poétiques, 1823). Jérôme Ducros, que nous connaissons comme un excellent pianiste chambriste, propose dans cette commande de 2008 une fresque intérieure exprimée en deux temps : dans un premier temps une musique souvent dissonante et d’un ton plutôt inquiétant, qui se transforme, dans un deuxième temps, en une esthétique post-romantique. La mise en espace, non seulement pour le chanteur mais aussi pour tous les musiciens, permet de saisir la musique de manière plus vivante, sans que les mouvements ne gênent notre ouïe. La même remarque va — et surtout — pour les lieder de Mahler. Laurent Naouri apporte, avec sa voix, une riche expérience de scène aux jeunes interprètes enthousiastes. Formant un ensemble homogène et de haute volée, ils jouent tous les œuvres par cœur (excepté l’Art de la fugue). Le spectateur sent dans leur interprétation un bel esprit d’équipe, se complétant les uns les autres et apportant chacun leur pleine qualité, indispensable pour la musique de chambre.

La première session à ce programme se prolonge jusqu’au 9 décembre.
Bach & Breakfast : dimanche 3 décembre à 10h.
Soirée spéciale Dark Concert (concert sensoriel dans le noir) : jeudi 14 décembre à 20h30.

Programme « Parlez pas de Mahler ! »
Francis Poulenc : Valse-improvisation sur le nom de BACH pour piano
Johann Sebastian Bach : Contrepoint XIX de l’Art de la Fugue
Joseph Haydn : « J’ai soif » et Tremblement de terre, extraits des Sept dernières Paroles du Christ pour quatuor à cordes
Jérôme Ducros : La Mort du Poète pour baryton, cordes et piano
Ludwig van Beethoven : Variations sur la Flûte enchantée de Mozart pour violoncelle et piano
Gustav Mahler, Les Chants d’un Compagnon errant (arr. Arnold Schönberg)

Laurent Naouri, baryton
Javier Rodriguez, flûte
Bertrand Laude, clarinette
Nadia Bendjaballah, percussions
Sophie Aupied, accordéon
Ryo Kojima, violon
Brieuc Vourch, violon
Tanguy Parisot, alto
Caroline Sypniewski, violoncelle
Cécile-Laure Kouassi, contrebasse
Yedam Kim, piano

Texte et photos : Victoria Okada

(c) Charly Mandon

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