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Nelson Goerner impressionne le Théâtre des Champs Elysées dans un programme Schubert, Beethoven et Chopin [Live-Report]

Nelson Goerner impressionne le Théâtre des Champs Elysées dans un programme Schubert, Beethoven et Chopin [Live-Report]

16 December 2017 | PAR Yaël Hirsch

Dans le cadre des concerts produits par Jeanine Roze, le pianiste argentin Nelson Goerner a succédé à l’adulé Grigory Sokolov au Théâtre des Champs Elysées, ce vendredi 15 décembre 2017. Devant le rideau doré de la scène Art Nouveau, il a impressionné un public mélomane et exigeant dans une programmation Schubert / Brahms / Beethoven qui a fonctionné comme une réelle montée en puissance.
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C’est dans une pénombre un peu byzantine que nous sommes entrés dans la Sonate N°15 en la majeur de Schubert. Assis loin du piano, l’énergie concentrée dans ses mains, Nelson Goerner a commencé en nous entraînant dans naïveté rythmée et l’ambiance bucolique du premier mouvement Allegretto moderato. D’une dextérité folle, brillant dans le jeu des contrastes, le pianiste a même été applaudi en cours de route avant de reprendre pour nous régaler d’élégance et de souplesse, avant de rentrer de tout son corps dans le mouvement Andante, concentré d’énergie et d’émotion. Toujours grosse d’émotion, la célérité a pris des proportions impressionnantes dans l’Allegro qui a fini de nous emporter et de nous convaincre.

Après une brève pause, place à l’exercice de style porté à son paroxysme avec deux cahiers de variations de Brahms sur un thème de Paganini en la mineur. Un brin militaire mais donnant à reconnaître le fameux thème du caprice 24, si familier au violon, très vite les notes s’égrènent, toutes appuyées, le corps entier du pianiste semble impliqué et alors même que le son semble flirter avec la saturation, la clarté est au rendez-vous de chaque temps de ces 28 variations que Goerner enchaîne avec une délicatesse et une concentration qui forcent le respect.

Après l’entracte, il reste encore quelque chose de la première partie allemande de ce programme dans le Chopin de Goerner. Evitant tout sentimentalisme, montant encore en puissance dans la clarté et la délicatesse, il commence par deux nocturnes (opus 15 n°1 en fa mineur et n°2 en fa dièse mineur) qui donnent e la : la douceur est là, dès les premières notes et la légèreté se fait plume comme pour contrebalancer la force des émotions. Le pianiste et son public sont échauffés, et prêt à voir Goerner gravir la sonate n°3 en si mineur comme une montagne. Commençant de manière solennelle et grave, le Allegro Maestoso se fait insistant et lancinant jusqu’à entrer dans le public comme une plainte. Encore la tentation d’applaudir dès la fin du premier mouvement, tellement Goerner sot triomphant de la lutte avec l’ange. Et non pourtant, le pianiste poursuit : l’incision décisive du Scherzo fait l’effet d’un électrochoc et l’on repart avec lui en ascension avec le Largo, lui aussi majestueux. La solennité et l’agilité culminent dans le Finale, qui se clôt comme une paire d’yeux qui tombe dans le sommeil. Applaudi à tout rompre, Goerner semble très heureux et offre généreusement trois bis à son public où il semble libéré de toutes les lois du trac et de la pesanteur pour finir de bluffer et d’enchanter un public qui termine le concert en ébullition.

visuel : YH

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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