Classique
L’Oratorio de Noël de Bach embrase la Philharmonie de Paris.

L’Oratorio de Noël de Bach embrase la Philharmonie de Paris.

23 December 2016 | PAR Bérénice Clerc

La période de noël bas son plein, Hannukah est sur la même période, tout le monde se presse pour l’obligation des cadeaux, la joie visible, le désespoir profond, la mélancolie bien accrochée sur chaque bonnet des Pères Noël ou aux flèches des sapins.

Parfois même l’absence, le vide clignote sur chaque guirlande et pourtant l’hiver arrive, le gris est percé par le soleil et la lumière revient gisant dans le détail, partout et nulle part, juste à saisir.

L’oratorio de Noël est un de ces détails, une beauté qui perçât la grisaille de décembre pour emporter loin dans l’extase, les éclats colorés de la musique et laisser les spectateurs avec des paillettes .

L’oratorio de Noël de Bach est un grand classique mais rares sont les versions intégrales, Laurence Equilbey, Accentus et Le poème harmonique firent le grand saut de 17H à 18h30 puis de 20h30 à 22h.

Chaque cantate est un voyage à elle seule, un univers sonore différent, un jour précis au moment de Noël. Toute l’histoire de Jésus, cette histoire qui a peut-être existée et qui fait battre le cœur, chanter des louanges et murmurer des prières à tant d’humains encore aujourd’hui.

Une famille de migrants juifs, la nativité, un bébé, la beauté de la vie, la circoncision, l’ange, l’Epiphanie, tout est raconté, une jolie histoire qui donnerait envie de croire en tout et se termine sur « Qu’est l’humain ? ». Chacun devrait pouvoir répondre à cette question !

Accentus est là, le Poème Harmonique aussi, accompagnés par trois solistes et Laurence Equilbey les pieds au sol et les mains nues pour diriger avec foi et éclat les instrumentistes.

Il fait noir comment dans une forêt la nuit, la lune et les étoiles éclairent la scène, chaque musicien, chanteur ou soliste pareil à une luciole s’allume dès qu’une note le traverse.

Dès la première cantate, l’impulsion est donnée, l’énergie de la joie profonde est là, elle ne quittera pas la scène, acclamations et trompettes vont résonner partout.

Douceur profonde, tendresse et élévation sont présentes, le hautbois et les vents font merveilles. Les violons, le violoncelle ne sont pas en reste et l’orgue dissémine ses notes avec délicatesse.

Les percussions comme souvent sous l’impulsion de Laurence Equilbey sont précises et enivrantes. Accentus exulte, pureté, précision, articulation impalpable, allemand délicat, des graves au hautes-contre les voix résonnent, se superposent semblable à un millefeuille croustillant, léger, croquant, moelleux aux saveurs raffinées, délicates, puissantes et multiples.

Les solistes féminines fidèles à la tradition classique du concert ont sélectionné leurs plus belles robes pour briller de mille feux, tenir debout, sans trop marcher, pouvoir gonfler sa cage thoracique pour respirer et porter loin la voix.

Emöke Barath fait naître l’émotion chaleureuse du soprano, le phrasé est agréable, le souffle et le vibrato à la hauteur de la salle et de la partition.

Michaela Selinger chante le rôle en alto legato, legato sur un tapis volant d’aigus, sa voix peine hélas à dépasser le milieux de la salle mais ce qui parvient est néanmoins agréable.

Chez les hommes, le costume est aussi sélectionné selon le style de chacun, sombre obligatoire chez le chanteur « classique » semble-t-il !

Adreas Wolf, charme et sourire accrochés au visage presque angélique ancre son chant dans les tréfonds des graves et les éclats du medium. Il est plongé totalement dans son rôle, les yeux accrochés aux regards des spectateurs sa voix tonnante maintient la braise de la partition enflammée par son souffle suave.

Werner Güra solide et emporté par le son, vocalise et fait briller les aigus solidement ancré à la scène.

18h30, la fin du premier cycle est annoncée par les bravos et les hurlements de la foule, des saluts et le froid de l’hiver en chemin saisit les spectateurs dehors.

Ils semblent tous perturbés par les cris et la vision d’humains en l’air, très, très haut, trop haut, tournant dans le vide, suspendus au niveau des nuages absents. La sensation forte des manèges d’une fête foraine est incompréhensible par certains, les cris restent.

Un peu de chaleur, un verre, un dîner, le temps passe vite, la chaleur de Noël est restée, les spectateurs déjà présent à 17h et les nouveaux, vierges du début de cette intégrale s’installent.

Il faut chaud, le crépitement d’une cheminée est presque audible, une odeur de cannelle, de vanille ou de clémentines flotte à l’intérieur de chacun, l’esprit de Noël est là.

Comme lors du premier concert chaque mouvement est creusé. Comme du métal en fusion, Laurence Equilbey travaille la matière avec délicatesse, énergie, contrôle, jaillissements de couleurs. Sautillante, emportée, précise, passionnée comme une enfant qui a encore accès et laisse libre court, l’espace de quelques notes, à ses émotions premières.

Rien n’est surjoué, tout est nécessaire ici et maintenant comme si demain était un mot inventé, une croyance pour oublier l’intensité du présent.

Triomphe pour ce moment de grâce qui donnerait envie de croire en l’Amour, l’humain, la lumière, les couleurs et les beautés de la vie. Les spectateurs applaudissent, crient, se lèvent pour célébrer l’équipe musicale pendant de longs saluts humbles et heureux qui comme des créateurs firent un beau voyage.

La magie et la chaleur de Noël étaient bien présentes à la Philharmonie, si vous voulez les vivre comme si vous y étiez, vous pouvez le faire sur Culturebox dès le 23 décembre.

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Bérénice Clerc
Comédienne, cantatrice et auteure des « Recettes Beauté » (YB ÉDITIONS), spécialisée en art contemporain, chanson française et musique classique.

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