Chanson
[Chronique] « Ici le Jour (a tout enseveli) » de Feu ! Chatterton : et tout est lumineux

[Chronique] « Ici le Jour (a tout enseveli) » de Feu ! Chatterton : et tout est lumineux

23 October 2015 | PAR Bastien Stisi

Après des débuts qui leur avaient valu l’étiquette (trop vite collée) de nouveaux apôtres d’une chanson / rock français revigoré(e)s (les noms de Bashung, de Gainsbourg et de Cantat traînaient dans le coin), les cinq garçons de Feu ! Chatterton valident sur ce premier album une mutation plus pop voulue depuis longtemps, le tout rendu possible à la faveur d’une centaine de lives habités donnés au cours des derniers mois et grâce à la production forcément adaptée d’un spécialiste de l’écart entre textes lettrés et compositions popées (Samy Osta, producteur de La Femme, de Rover, de Juniore…) 

[rating=4]

Et cette mutation contrôlée, il ne faut qu’une seule petite seconde à ce premier album pour la valider de manière définitive. Car celui-ci est introduit par les résonances très électro-pop d’ « Ophélie », dont les contours rappellent largement cette « Malinche » tubesque et addictive que l’on n’a certainement pas oublié de replacer sur ce premier LP, un morceau qui impose déjà une certitude : Ici le Jour (a tout enseveli) ne sera pas, comme le laisserait pourtant penser son titre éminemment littéraire, un album où le son ne serait que le vernis venant si discrètement habiller le mot.

Car si l’album laisse évidemment, parce que c’est là l’ADN même du projet, une très large place aux rimes feutrées et précieuses d’Arthur, récitées avec aisance (« Le Long du Léthé », « Harem », « Porte Z ») lorsqu’elles ne sont pas lancées avec vaillance (« La Mort dans la Pinède », « Côte Concorde »), celui-ci marque aussi par sa faculté à alterner les ambiances, lui qui pioche autant dans la disco pop tropicale (« Boeing ») que dans les traversées morriconniennes (« Fou à Lier »), dans le post-rock cotonneux (« « Vers le Pays des Palmes », uniquement instrumental) que dans le rock sentencieux (« Côté Concorde »). Un album de chansonnier (Arthur l’affirmait en interview : « la chanson peut être poétique mais n’est pas de la littérature »), et donc un album de musiciens. Confirmation grandiose d’un écart tellement dur à envisager.

À découvrir absolument en live où le groupe est parvenu à passer d’une formation très marquée « chanson » à des préoccupations largement plus rock (au Trianon bientôt, puisque le groupe y enchaîne 3 dates), et à écouter en studio à la lumière d’une bougie maigrie, qu’on veillera à alterner avec la lumière d’une boule à facettes grossie. Ici le Jour a tout enseveli. Et le monde (celui de la pop chantée en Français, essentiellement) s’en trouve d’un coup beaucoup plus lumineux.

Feu ! Chatterton, Ici le Jour (a tout enseveli), 2015, Barclay, 53 min.

Visuel : (c) pochette de l’album

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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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