Fictions
“Vous connaissez peut-être” : Joann Sfar sans fard

“Vous connaissez peut-être” : Joann Sfar sans fard

13 September 2017 | PAR Marine Stisi

L’an passé, Joann Sfar faisait également sa rentrée avec Albin Michel en publiant Comment tu parles de ton père ?, un livre particulièrement touchant et parfaitement autobiographique. Il revient cette année avec Vous connaissez peut-être, un roman tout aussi intime mais moins sentimental.

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Une thérapie camouflée

Joann Sfar prévient d’emblée : il ne va pas écrire un livre sur sa mère après en avoir écrit un sur son père. Peut-être parce que sa mère, il ne l’a que très peu connue. Bien que grandir sans mère peut expliquer un livre – ils ont été nombreux, les écrivains, à utiliser l’écriture comme thérapie – ce n’est pas son but aujourd’hui. Joann Sfar n’écrit pas un livre sur sa mère. Même si son livre parle essentiellement d’une femme qui en est le sosie et qui, à quelques lettres près, porte le même prénom qu’elle. Ce livre parle de Lili, une femme rencontrée sur internet. Aussi simplement que ça.

Nous voilà ainsi, nous, lecteurs, devenus témoins d’une relation 2.0. En réalité, on se demande dans les premières pages à quoi il veut en venir. A la fois description canine (Joann Sfar adopte un chien, un bull-terrier et nous ne louperons pas une miette de l’adoption) et élucubrations de ses aventures virtuelles, on peine à accrocher au récit… Puis il admet que toutes ces pages pour tourner autour du pot, c’était peut-être un peu long. Une étincelle s’éclaire. Joann Sfar lit dans nos pensées. Oui, c’est un peu long, alors ?

Le vif du sujet

Alors il commence son récit, enfin. Sa rencontre purement virtuelle sur facebook avec Lili. Pendant des mois, il entretiendra avec elle une relations à distance, par téléphone, sms, mails interposés. Quelques photos aussi. Mais jamais de rencontres. Jamais de vraies rencontres, autour d’un café, d’un verre. Peut-il vraiment faire confiance à Lili, une femme qui semble tout droit sortie d’un rêve, à la vie comme un film ?

Le livre finit par nous accrocher. Par cette histoire absurde d’abord – curiosité, quand tu nous tiens ! – puis grâce à la plume cyniquement délicieuse de Joann Sfar, son je-men-foutisme, sa sincérité, sa légèreté et son humour, bien sûr. Un humour décomplexé d’auto-critique et d’auto-moquerie. Joann Sfar peint sans le moindre complexe un bien piteux tableau de lui-même mais avec un second degré tel qu’on adore ce personnage un peu paumé, un peu geek, un peu maladroit.

“Je mets la main sur la carte d’étudiant de mon père et sur la mienne. Lui en 1958, il était en métropole depuis moins d’un an, il étudiait à Aix, le droit. Moi, pendant ce temps, je veux dire moi au même âge, je faisais philo à Nice. C’est drôle. Sur les photos on a le même âge mais lui a déjà l’air d’un papa et moi j’ai déjà l’air d’un branleur.”

Joann Sfar, Vous connaissez peut-être, Editions Albin Michel, 18,50€, 272 pages.

Visuel : (c) DR

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Marine Stisi
30% théâtre, 30% bouquins, 30% girl power et 10% petits chatons mignons qui tombent d'une table sans jamais se faire mal. Je n'aime pas faire la cuisine, mais j'aime bien manger.

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