Fictions
Retour aux sources murakamiennes avec “Écoute le chant du vent” et “Flipper, 1973”

Retour aux sources murakamiennes avec “Écoute le chant du vent” et “Flipper, 1973”

16 February 2016 | PAR Audrey Chaix

On ne présente pour l’écrivain japonais maintes fois annoncé comme le nouveau prix Nobel de littérature : chacun de ses nouveaux romans est un événement littéraire à l’échelle mondiale, alors qu’il déploie son univers où le réalisme flirte avec les frontières du surnaturel, un savant mélange qui lui est unique, et donne à tous ses romans une atmosphère si particulière, dans laquelle le lecteur se laisse entraîner sans trop savoir où l’histoire va l’emmener.

haruki-murakamiCe n’est cependant pas à proprement parler un nouveau roman de Murakami que Belfond propose en cette rentrée littéraire de janvier : écrits dans les années 1970, ces deux courts romans, Écoute le chant du vent et Flipper, 1973, sont des œuvres de jeunesse, baptisées “romans de cuisine” par leur auteur, tout simplement parce qu’il les a écrits assis à la table de sa cuisine, alors qu’il était jeune marié et patron de coffee shop. C’est ce qu’il raconte dans une préface où il retrace sa vocation d’écrivain, révélée lors d’un match de base ball.

Comme toujours avec Murakami, difficile de raconter l’histoire de ces deux romans dont le second est la suite de l’autre. On y retrouve d’ailleurs les personnages de La Course du mouton sauvage, œuvre qui clôt la trilogie et qui a rendu l’auteur célèbre en France. On y retrouve le narrateur, un jeune homme un peu paumé : il est étudiant dans le premier volume, et associé d’une petite entreprise de traduction dans le deuxième. Dans le premier roman, le point central est un bar tenu par J, un Chinois, où le narrateur retrouve son ami le Rat, avec lequel il refait le monde en buvant de la bière. Le J’s Bar et le Rat sont moins centraux dans Flipper, 1973, alors que le narrateur se retrouve happé par l’influence hypnotisante d’un flipper qui semble lui parler.

On retrouve ici les germes de l’univers de Murakami, cette capacité des objets à fasciner l’homme, au point de rendre troubles les frontières entre réalité et rêve, à tel point que le lecteur en perd ses repères. Sans jamais être inquiet, cependant, car tout semble arriver de manière si naturelle que l’on accepte avec bonne grâce ces incursions dans le fantastique. D’autant plus qu’en raison de leur brièveté, ces deux romans sont une parfaite entrée en matière dans l’univers du grand Murakami pour ceux qui ne connaîtraient pas encore son œuvre.

Écoute le chant du vent, de Haruki Murakami. Traduit du japonais par Hélène Morita. Éditions Belfond. Paru le 14 janvier 2016. 300 p. Prix : 21,50 €.

murakami-bibliothequeEn bonus, Belfond propose aux lecteurs français une nouvelle de Murakami, L’Étrange bibliothèque, illustrée par Kat Menschik. Un jeune garçon, venu emprunter quelques livres à la bibliothèque de son quartier, se retrouve séquestré dans un cachot par un étrange vieillard qui le nourrit de savoir pour mieux se délecter de sa cervelle rendue juteuse par la connaissance. Un homme-mouton et une jeune fille muette lui viennent en aide pour échapper à cette inquiétante figure.

Ce livre relié et cartonné est un petit bijou à (s’)offrir : la nouvelle de Murakami fait froid dans le dos, et les illustrations de Menschik accompagnent le texte autant qu’elles ont leur propre existence. Sombres couleurs, ombres cachées, menaces qui apparaissent en filigrane … Menschik a su capturer l’ambiance de cachot et de désespoir qui habitent la nouvelle. Un très bel ouvrage.

L’Étrange bibliothèque, de Haruki Murakami. Illustré par Kat Menschik. Traduit du japonais par Hélène Morita. Paru en novembre 2015. 72 p. Tarif : 17 €.

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Audrey Chaix
Professionnelle de la communication, Audrey a fait des études d'anglais et de communication à la Sorbonne et au CELSA avant de partir vivre à Lille. Passionnée par le spectacle vivant, en particulier le théâtre, mais aussi la danse ou l'opéra, elle écume les salles de spectacle de part et d'autre de la frontière franco-belgo-britannique. @audreyvchaix photo : maxime dufour photographies.

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