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Dictionnaire impertinent de la gastronomie: Périco Légasse, le protecteur du terroir

03 December 2012 | PAR Jean-Paul Fourmont

Chroniqueur gastronomique et rédacteur  à « Marianne », Périco Légasse vient de publier, aux éditions Bourin, un intéressant Dictionnaire impertinent de la gastronomie avec des illustrations de Tignous.

Sait-on encore manger en France ?
Telle est, en quelque sorte, le fil rouge du Dictionnaire du journaliste de Marianne. Lérico Pégasse critique le fait que la croyance – infondée – du consommateur selon laquelle « tout est devenu bon et pas cher ». Lui déplait également la « chimie agricole » qui dénature toutes nos campagnes. L’artisanat de bouche ne trouve pas non plus grâce aux yeux de l’auteur.

Suite à ces réquisitoires, dans un élan cocardier, Périco Légasse indique « que ceux qui ont la chance de vivre en France et d’en partager les bienfaits » devraient mieux se comporter à table. Certaines expressions sont très poétiques, voir lyriques, comme « gastronomer » ou se « forger un vécu », « l’huile de moi », la « gâte sauce », etc.

La table des entrées est extrêmement variée : tour à tour, l’auteur explique des notions de la gastronomie comme abattoir, aligot, écailler, tomate, cabillaud, faisander. Chaque entrée est étudiée de la façon la plus complète possible, comme les paragraphes relatifs au cabillaud ou à la morue vivante. C’est un poisson gras de la famille des gadidés, pêché, puis surpêché dans les mers froides de l’océan Atlantique. La morue, explique l’auteur, est en fait du cabillaud.

Le camembert doit son essor à Napoléon III et au chemin de fer. Le cassoulet proviendrait, quant à lui, de la rencontre entre les Arabes, qui goûtaient la fève ou le haricot, et les Amériques. Ces contacts successifs ont permis d’enrichir ce plat. La recette du coq au vin a, elle aussi, évolué : elle ne se fait plus aujourd’hui qu’avec du poulet, et non du coq. Ce que déplore l’auteur.

Un pamphlet ?
Périco Légasse a voulu faire un pamphlet, mais son ouvrage ressemble plutôt à une conversation entre initiés. Il reproche une dénuration de la gastronomie, mais il encense beaucoup de grands cuisiniers et regrette qu’au pays de la gastronomie les connaisseurs sont plus rares qu’on le croit.

A qui la faute ? Il critique, notamment, les lycées hôteliers. Il faudrait s’intéresser davantage au monde de la gastronomie et à l’apprentissage qui dans ce milieu est particulièrement dur pour les jeunes. Nombre d’entre eux restent sur le « bord de la route ». Est intéressante la dénonciation du lobby agroalimentaire, qui industrialise nos campagnes pour produire de la malbouffe, la publicité, qui en fait la propagande, et la grande distribution, qui remplit nos chariots de marques « vues à la télé ».

Par contre, la charge contre Jacques Chirac (à partir de propos de Jean-Pierre Coffe) ne présente pas un intérêt majeur. L’entrée consacrée à Jean-Pierre Coffe est du même acabit… Souvenons-nous que l’auteur est fréquemment intervenu dans les émissions du médiatique Coffe. Toutefois, Périco Légasse ne passe pas sous silence que Jean-Pierre Coffe n’a pas hésité à « se vendre » pour un plat de lentilles en faisant de la publicité pour de célèbres réseaux de grande distribution discount.

Le protecteur du terroir
Est quelque peu superflue, car extrêmement convenue, l’entrée sur Stéphane Le Foll, qui est depuis quelque mois ministre de l’agriculture et que Périco Légasse qualifie complaisamment de « protecteur du terroir », rien de moins… Cet apparatchik du PS n’a jusqu’à maintenant rien prouvé de particulier. S’il était le directeur de cabinet de François Hollande, le chevalier du « terroir » vient seulement d’être élu député pour la première fois, après plusieurs vaines tentatives.

L’auteur semble oublier l’impact de la crise actuelle. Sur la forme, il est dommage que l’auteur prenne parfois des libertés avec la langue française, car cela n’ajoute rien à la force et aux valeurs qu’il veut incarner. Beaucoup d’entrées sont néanmoins très réussies et parviennent à sauver cet ouvrage. Il était temps de remettre les points sur les « i de la gastronomie » et de rompre avec le culinairement correct.

Périco Légasse, “Dictionnaire impertinent de la gastronomie”, Novembre 2012, François Bourin éditeur, 283 p., 22 euros.

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Jean-Paul Fourmont
Jean-Paul Fourmont est avocat (DEA de droit des affaires). Il se passionne pour la culture, les livres, les gens et l'humanité. Contact : [email protected]

One thought on “Dictionnaire impertinent de la gastronomie: Périco Légasse, le protecteur du terroir”

Commentaire(s)

  • Un peu d’impertinence ne nuit pas à la gastronomie authentique de nos terroirs…

    December 3, 2012 at 18 h 20 min

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