Cinema

L’Absence, ou la perte de soi

01 February 2010 | PAR Delphine Ameline

Cyril de Gasperis signe son premier film – « L’absence » – emprunt de réalisme et de sensibilité. Félicia est auxiliaire de vie auprès d’Anna, une sexagénaire que la démence a rendu dépendante. Quand le mari d’Anna disparait, les deux femmes se retrouvent seules, en autarcie, dans une maison au creux des marais.

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Des hurlements, des gémissements. Anna (Liliane Rovère) est prostrée dans son grand fauteuil rouge, telle une reine, elle exige, elle se plaint, elle est assistée et râle. Félicia (Cécile Coustillac), l’auxiliaire de vie, jeune, belle et fraiche vit avec Anna et son mari. Elle se dévoue totalement à sa malade. Un soir, le mari disparait. Félicia va rester et le réalisateur pose dès lors la question du temps : est-il possible d’habiter un présent perpétuel ? La caméra suit le quotidien d’Anna, à travers l’aide de Félicia, dans un hyperréalisme enrobé de couleurs mélancoliques. Un cycle d’images revient encore et encore, une répétition des mêmes gestes dans une ambiance pesante, une maison pleine de silence…

Ce film montre la difficulté d’être subordonné à un autre au quotidien pour les gestes les plus simples. Et pourtant, celle qui se perd dans cette absence d’existence, c’est la jeune Félicia. Elle est comme absorbée par la vie d’Anna. Elle n’existe pas. Le contraste est mis en évidence grâce à Michelle (Jocelyne Coustillac)– une femme terre à terre, pleine de vie – qui vient aider Félicia chaque jour.

Certains pourront parler d’amour, parce qu’une jolie relation mère – fille se tisse entre les deux femmes. Pourtant, la dévotion de Félicia devient vite une servitude. L’absence s’entend alors autrement : ne pas être sa place. Ce n’est donc pas l’absence du mari qui importe, mais l’absence de vie de Félicia, consommée par son aînée. Filmé par des plans séquences qui vont jusqu’à l’épuisement du temps, d’autres plans fixes révèlent des tableaux lugubres. Celui de Félicia dans le jardin, devant la maison, assise sur les marches. Un tableau qui se répète chaque jour.

La prestation de la jeune Cécile Coustillac est remarquable. Femme de théâtre, elle fait sa première apparition au cinéma dans ce long-métrage. Elle joue face à Liliane Fovière, figure familière du théâtre et du cinéma français depuis les années 70 et Jocelyne Desverchère, actrice française reconnue.

Un trio d’actrices justes dans un récit hyperréaliste aux couleurs d’un tableau à la française.

« L’absence » de Cyril de Gasepris avec Liliane Rovère, Cécile Coustillac, Jocelyne Desverchère, Jean-Baptiste Malartre, Adrien de Van et Olivier Broche.

Sélection officielle au Festival de Pusan 2009, Les films sauvages et Saraghina films, Sortie le 10 mars 2010

Bande annonce du film :

Robert Doisneau, “Du métier à l’œuvre”, un témoignage social
General Elektriks : L’électron libre
Delphine Ameline

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