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Cannes : une Semaine de la Critique 2014 très « à bout de souffle »

Cannes : une Semaine de la Critique 2014 très « à bout de souffle »

23 April 2014 | PAR Geoffrey Nabavian

Elle est née en 1962, avec pour but de proposer une sélection de films légèrement en marge. Elle a connu des coups durs et des annulations, mais aujourd’hui, elle est toujours là. Et cette année, elle propose un programme toujours aussi excitant. Qui s’annonce par ailleurs éreintant. Retenez votre souffle, il va falloir courir, pour rattraper ces personnages et leurs destins en fuite.

Gloire aux faux documentaires, et aux films tournés en caméra numérique ! En 1961, le Festival de Cannes vit la présentation, dans une petite salle, de The Connection, film de Shirley Clarke ressorti tout récemment, tournant, dans tous les sens du terme, autour d’une transaction de drogue, reconstituée avec les apparences de la réalité. Une œuvre guère taillée pour une compétition « officielle », selon certains… L’Association Française de la Critique de Cinéma – devenue depuis le Syndicat Français de la Critique – eut en conséquence l’idée d’imaginer chaque année une sélection parallèle.

Affiche Semaine de la critiqueElle a connu des heurts, cette Semaine de la Critique, au cours de son histoire. Mais ça ne l’a pas empêchée de décerner son Grand prix notamment à Cronos, premier film de Guillermo del Toro, au cultissime Clerks, les employés modèles de Kevin Smith, à Amour chiennes, magnifique première œuvre d’Alejandro Gonzalez Inarritu, ou à Depuis qu’Otar est parti… de Julie Bertuccelli.

Cette année, les jeunes réalisateurs sont décidés à le faire courir, leur public. Les films présentés – pour la plupart des deuxièmes longs-métrages – en témoignent. Lorsqu’ils sortiront en salles, en 2014 ou alors courant 2015, lequel de ces destins choisirez-vous de suivre ? Celui des trois personnages vivant dans l’urgence croqués par le cinéaste d’origine haïtienne Djinn Carrénard et son « cinéma de guérilla » – souvenez-vous, Donoma ! sorti en 2011, et officiellement réalisé avec… 150 euros ! – dans Faire l’amour, film d’ouverture de la sélection ? Celui de Léonard, Camerounais, et de Hope, Nigériane, avançant vers l’Europe dans Hope, du français Boris Lojkine, connu pour ses documentaires inspirés ? Celui de Davide, gamin de quatorze ans aux allures de fille, partant vivre parmi les marginaux d’un parc de Catane, sous la caméra de l’italien Sebastiano Riso, qui signe ici un film titré Darker than midnight ? Celui de deux femmes, l’une israélienne, l’autre palestinienne, amenées à échanger leurs vies dans Self made, film de Shira Geffen, réalisatrice israélienne des Méduses ? Celui d’Eric, 10 ans, gamin de Colombie tiraillé entre un père irresponsable, une mère de substitution bien imprudente et les différences sociales qui minent la Colombie, dans le premier film de Franco Lolli, Gente de bien ? Celui de Charlie, fille de 17 ans, que son amour pour une camarade de lycée va mener très loin, sous la direction de Mélanie Laurent, qui signe Respire, sa seconde réalisation ? Et pourquoi pas, tout simplement, les destins horrifiques ? Celui de Jay, jeune fille qui se retrouve suivie par on ne sait pas trop quoi suite à sa première relation sexuelle, et ce dans un film de David Robert Mitchell, justement titré It follows. Ou celui d’une femme qui devient… loup-garou, eh oui ! Mais un loup-garou très spécial, puisqu’au centre d’un film danois, When animals dream, de Jonas Alexander Arnby.

05_HippocratePas de quoi souffler ! Allez, quelques-uns ont pensé aux plus fatigués d’entre vous. Vous pourrez ainsi découvrir Hippocrate, second film de Thomas Lilti, portant sur un jeune apprenti médecin incarné par… Vincent Lacoste, enfin dans un rôle sérieux ! Ou un enfant de cinq ans au très précoce don de poète dans L’Institutrice, de l’israélien Nadav Lapid. Et même, pour ceux qui veulent du silence… The Tribe, film ukrainien en langue des signes ! Réalisé par Myroslav Slaboshpytskiy. Sauf que le bruit des paroles y est remplacé par celui… des coups ! Et oui, le film sera dur… Plus des courts-métrages : histoires de prostituée, de jeunes perdus sur une route, de directeur de lycée qui se bat contre un crocodile… On arrête.

Qu’en dire, de cette sélection ? Que sa double nature – aller à toute vitesse, et sonder le cœur en même temps – correspond à la personnalité d’Andrea Arnold, réalisatrice britannique désignée pour présider le jury du Grand prix. L’alchimie s’opérera-t-elle ? on va retenir – tant qu’on peut – notre souffle…

Visuel: affiche de la Semaine de la Critique 2014 © Festival de Cannes

Visuel: Hippocrate, 2014 © Festival de Cannes

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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