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Cannes 2016, Jour 2 : Guiraudie à nu, ouvertures en cascade, Loach convaincant et Rocco pour finir

Cannes 2016, Jour 2 : Guiraudie à nu, ouvertures en cascade, Loach convaincant et Rocco pour finir

13 May 2016 | PAR Geoffrey Nabavian

Notre première journée pleine à Cannes 2016 nous a mis face à pas mal de beaux films, à des célébrations nombreuses, et à un acteur qu’on n’aurait jamais pensé croiser, au final…

Ce matin-là, on s’attendait à beaucoup de rires, et beaucoup de sexe. En fin de compte, Rester vertical, premier film de la journée, présenté en Compétition, s’est révélé surtout très personnel. On a vraiment aimé cet essai aux allures autobiographiques, peignant un plus tout jeune homme en fuite perpétuelle, qui tourne et retourne dans des coins très reculés. Alain Guiraudie, auteur de L’Inconnu du lac, s’est livré à nous dans cette nouvelle oeuvre, avec beaucoup de finesse et de pudeur. Pour lire notre critique de Rester vertical, cliquez.

Notre avis est aussi à voir en vidéo :

A onze heures, c’est sur une Plage Nespresso caressée par le soleil et par un petit vent frais que nous avons pu deviser avec les cinq jurés de la Semaine de la Critique 2016, assis en face de nous, à une dizaine de centimètres de distance. La Présidente, Valérie Donzelli – dont on avait bien apprécié le précédent film, Marguerite et Julien – a insisté sur le souhait de ses collègues d’accompagner les jeunes réalisateurs présents cette année, et donc confrontés à l’épreuve du Festival, stimulante tout autant qu’angoissante ou fatigante. Les jurés, tous réalisateurs, ont confirmé qu’ils avaient bien vécu de telles émotions, lors de la présentation de leurs précédents films à Cannes : Nadav Lapid avait ainsi défendu, en 2014, son Institutrice, qu’on avait beaucoup aimée. Idem pour David Robert Mitchell, venu sur la Croisette la même année avec It follows, exemple de buzz éclair. On a été heureux d’avoir un échange hors des cadres avec ce jury, qui compte également Alice Winocour et Santiago Mitre.

L’après-midi, notre premier film visionné dans la section Un certain regard nous a laissés perplexe : Personal affairs, signé par la réalisatrice Maha Haj, ne nous a offert hélas que des tranches de vie assez opaques, prises au sein d’une famille arabe disséminée entre Nazareth, Ramallah et la Suède.

Un peu plus tard, en revanche, cette section Un certain regard 2016 s’est vue ouverte, officiellement, par Thierry Frémaux, délégué général du Festival de Cannes, qui a salué le travail des techniciens oeuvrant sur les projections, avant de pousser les membres du jury officiel à s’exprimer tous dans leur langue maternelle. On a pu être marqués par la robe, assez jolie, d’une actrice qu’on aime bien, Céline Sallette. Mais notre quiétude s’est vue tout à coup perturbée par le film d’ouverture de notre section : le dévastateur Clash, de Mohamed Diab. Tourné avec une énergie éblouissante et grisante, et une envie de cinéma démente. Pour lire notre critique de Clash, cliquez.

Au même moment, un petit peu plus loin sur la Croisette, une autre sélection donnait son coup d’envoi : celle de la fameuse Semaine de la Critique 2016, dont on avait rencontré le jury le matin même. Chance, c’était le nouveau film de Justine Triet, Victoria, tout en folie douce et juste, qui ouvrait les festivités. On avait heureusement pu le découvrir à Paris. Donc, pour lire notre critique de Victoria, cliquez.

A la fin de cette journée, on avait également dans notre besace un joli souvenir : celui du nouveau film de Ken Loach, Moi, Daniel Blake, en Compétition pour la Palme d’or. Malgré le fait qu’on l’ait découvert à 16h30, assis sur un coin de marche parce que tous les fauteuils étaient pris, et malgré ses ingrédients déjà beaucoup vus chez le maître britannique, on a marché. Aux côtés de Daniel et Katie les courageux. Pour comprendre comment, et lire notre critique de Moi, Daniel Blake, cliquez.

Avant de lancer les bobines du côté de la Quinzaine des Réalisateurs, Céline Sciamma et Catherine Corsini ont récompensé le cinéaste Aki Kaurismäki ((La vie de bohêmeTiens ton foulardTatiana, Le Havre,…). Elles ont lu une belle et longue lettre au finlandais , le remerciant de prêter attention aux déclassés, aux marginaux qui, sans un récit, n’existeraient pas à nos yeux. Absent, en tournage au Groenland, Kaurismäki était représenté par Jean-Pierre Darroussin, sobre et plein d’esprit. A suivi un discours percutant des intermittents du spectacle. Ensuite comme film d’ouverture, c’est Marco Bellocchio qui en a eu les honneurs avec Fais de beaux rêves, un film auscultant sans complaisance, sur un mode lancinant, la douleur de perdre sa mère. Notre critique.

Au soir, suite aux dernières séances, la place fut laissée à la musique, et… au sexe ! Nous sommes montés à la Villa Schweppes, pour la soirée d’un film un peu particulier : Rocco. Un documentaire sur la plus célèbre star masculine du cinéma porno européen. L’intéressé était là, accompagné de sa femme, Rosa Caracciolo. Que dire ? Quand on a Rocco Siffredi à quelques mètres de soi, on l’observe, pour son parfum sulfureux… Après quelques cocktails bien dosés en Schweppes, et en épices, sirotés devant une vue panoramique de Cannes endormie, on a pu goûter les rythmes colorés du DJ Greg Boust, avant de pénétrer un autre registre, avec le set de Matias Aguayo. Le DJ chilien établi en Allemagne a empoigné le micro pour lancer ses rythmiques quasi tribales. Musique electro aux beats lourds derrière, scansion devant : l’homme impressionne par son énergie. De minuit trente à plus de deux heures du matin, il a tenu la scène. Avec, parfois, quelques images de femmes nues derrière lui… A deux heures précises, on s’est dit qu’il était temps d’aller faire quelques rêves reposants, avant d’affronter un lendemain chargé, qui convoquerait notamment Bruno Dumont et la belle Soko…

*

Visuels :

Thierry Frémaux ouvrant la section Un certain regard

Le dispositif de la rencontre avec les jurés de la Semaine de la Critique

Les jurés de la section Un certain regard : de gauche à droite, Céline Sallette, Jessica Hausner, Ruben Östlund, Marthe Keller et Diego Luna, avant Thierry Frémaux

(Tous : © Geoffrey Nabavian)

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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