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Cannes 2018, Semaine de la critique : “One Day” de Zsófia Szilágyi, drame sur la charge mentale d’une mère

Cannes 2018, Semaine de la critique : “One Day” de Zsófia Szilágyi, drame sur la charge mentale d’une mère

10 May 2018 | PAR Aurore Garot

La Semaine de la critique commence bien sa 57e édition, avec “One Day” (“Egy Nap”) de la réalisatrice hongroise Zsófia Szilágyi. Un film bouleversant tant dans sa mise en scène que dans son scénario qui fait ressentir aux spectateurs la charge mentale d’une mère de famille.

La cinéaste surmonte avec brio ce défi qu’elle s’était lancée, à savoir : transformer une vie ordinaire et routinière (inspirée d’une lettre d’une amie qui lui raconte une journée type) en un scénario de film qui tient la route. Anna (Zsófia Szamosi), la protagoniste, est une mère de trois enfants, qui travaille en donnant des cours d’italien à temps partiel tout en s’occupant d’eux et de la maison. Les aller-retours à l’école, à la crèche, aux cours de violoncelle, d’escrime, de danse, les tâches ménagères, les problèmes financiers, de plomberie, la cuisine… Ces nombreuses tâches forment sa routine hebdomadaire qu’elle organise à la minute près, quitte à se tuer physiquement et à s’épuiser psychologiquement. Mais la seule pensée qu’a Anna, c’est son mari qu’elle soupçonne d’être infidèle. Une angoisse qui va la suivre toute la journée en même temps qu’elle court à droite à gauche…

Zsófia Szilágyi joue la carte de l’immersion totale des spectateurs dans la vie de son héroïne, en offrant à l’écran tout ce qu’il y a de plus réaliste, du fond sonore sans filtre dans lequel nous entendons tous les petits bruits du quotidien (les cris des enfants qui jouent avec leurs couverts, le linge en train d’être étendu, le clignotant dans la voiture…), au scénario lui-même qui met en avant la difficulté d’être une mère et l’angoisse des conséquences de l’infidélité sur la vie de famille.

Au-delà de sa vie, c’est dans son état d’esprit et dans son mal-être que nous nous logeons au point de ressentir sa douleur rendue visible par la mise en scène et par le jeu bouleversant de Zsófia Számosi qui nous rend émotionnellement encore plus proche de son personnage. Son regard vide, ses cernes prononcées, la banalité de ses paroles qui se résument à ce qu’elle dit à ses enfants, à savoir : « allez, lève-toi », ou encore, « dépêche toi, on va être en retard »…

Anna n’est plus que l’ombre d’elle-même, le fantôme piégé dans une routine sans fin, une femme malmenée par la vie et par son mari qui, en plus de ne pas l’aider au quotidien, la trompe. Pourtant, elle ne lâche rien, elle encaisse, elle se tait malgré l’écrasement et le manque de reconnaissance à son égard et elle s’occupe de ses enfants, seuls êtres à pouvoir encore la faire sourire.

Anna est une héroïne. Mais une héroïne du quotidien, qui donne toute son énergie à sa famille au point de ne plus en avoir pour elle-même. Elle est aussi et surtout la personnification d’une réalité sociale : la charge mentale ou comme titrait L’Express il y a tout juste un an, “le syndrome des femmes épuisées d’avoir à penser à tout”. 

Bande-annonce : 

Visuels : ©Balázs Domokos

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Aurore Garot

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