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Much loved : un film subversif interdit au Maroc

Much loved : un film subversif interdit au Maroc

15 September 2015 | PAR Kalindi Ramphul

Much Loved, qui sortira demain dans les salles de l’hexagone, a déclenché bien des polémiques. Un nouveau visage de la femme, un regard neuf sur la prostitution, le tout sur un fond d’humour grinçant, Nabil Ayouch a fait de son film une oeuvre si forte qu’elle en a été censurée. Jugé immoral, le film pourtant primé au récent festival d’Angoulême aura été interdit au Maroc. Retour sur une censure toute regrettable. 

Noha, Randa, Soukaina et Hlima, sont quatre prostituées qui vivent à Marrakech. Much Loved, récompensé par le Valois d’or au festival du film d’Angoulême raconte l’histoire d’une amitié entre ces femmes invisibles, complètement ignorées de la société marocaine et qui pourtant, vivent, aiment et rient. Vendre leurs corps, c’est leur métier mais elle ne veulent pas en faire tout une affaire. Elles ne dramatisent pas leur situation et narrent librement, parfois même avec humour, leurs anecdotes quotidiennes. Soirées, alcools, danses sensuelles, mais aussi famille, amitié, amour et franchise, Nabil Ayouch nous présente des héroïnes, fortes et fragiles, bref, des héroïnes pleine d’humanité. Un véritable rafraîchissement.

Le cinéaste qui a rencontré 200, peut-être même 300 prostituées avant de trouver les quatre interprètes de Much Loved, ne veut pas les présenter “comme des victimes” mais bien comme des guerrières. Si, d’après lui, la prostitution est un thème souvent abordé au Maroc, il n’est pourtant pas souvent exprimé au cinéma. C’est donc sans retenue superflue que l’artiste a décidé d’aller contre la pudeur marocaine et présente une oeuvre brute, sans fioritures, loin des chichis américains.

Si Much Loved a su toucher le coeur et les tripes des français, il n’en a bien sûr pas été de même au Maroc. Le film devait sortir à l’automne mais des extraits circulant sur le net ont créé une telle controverse dans le pays aux moeurs toujours conservatrices, que le gouvernement marocain a décidé, en mai, d’interdire l’oeuvre en salles. Nabil AYouch a révélé être “interloqué par l’ampleur qu’ont pris les événements”. Le réalisateur qui voulait éveiller les consciences a malheureusement vu son travail être censuré et déclare dans une interview donnée à TV5 Monde “C’est bien dommage que le film vive dans le monde entier sauf au Maroc.”

Certains sujets ne peuvent trouver leur place dans un pays où la pudeur est omniprésente mais peut-être la polémique fera t-elle avancer les choses. L’homme qui “voulait montrer la femme derrière la prostituée” espère en tout cas, pouvoir un jour assister à la projection de son film dans une salle marocaine. C’est le tout le mal qu’on lui souhaite.

Visuels ©: DR et Affiche officielle du film

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Kalindi Ramphul

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